Ils sont 181 binômes sur la ligne de départ, disséminés dans les 40 cantons alsaciens. Il faudra deux tours, les dimanches 20 et 27 juin, pour déterminer lesquels de ces tandems homme-femmes participeront jusqu’en 2026 à la gestion du nouveau département alsacien, qui répond au nom de Collectivité européenne d’Alsace (CeA).
Les Départements s’occupent notamment de :
- L’action sociale (RSA, aide à l’enfance, handicap, personnes âgées) ;
- La construction, l’entretien et l’équipement des collèges ;
- Le service départemental d’incendie et de secours (SDIS) des pompiers ;
- L’aide aux communes, notamment dans le milieu rural, le remembrement agricole, l’aménagement foncier ;
- Le Sport, la Culture, le tourisme, en partage avec d’autres collectivités.
À Strasbourg, une part importante de l’action sociale, la principale compétence du Conseil départemental, fait historiquement l’objet d’une délégation à la municipalité. La dernière convention porte sur la période 2018-2025.
Par rapport aux autres départements, la CeA a quelques compétences supplémentaires, mais limitées. La principale est la gestion des anciennes routes nationales. Dans d’autres domaines, comme le bilinguisme, le transfrontalier ou le tourisme, il s’agit surtout de coopérations avec l’Éducation nationale, la Région Grand Est et les intercommunalités sur le moyen terme. Le premier budget de la CeA est de 2,02 milliards d’euros.
Au soir des deux tours, il y aura comme souvent deux manières de regarder les résultats. Ceux à l’échelle de l’Alsace, et ceux dans sa capitale, Strasbourg.
En Alsace, la majorité alsacienne s’ouvre à la majorité présidentielle
À l’échelle de l’Alsace, l’enjeu est de voir si la majorité de droite et du centre sera renouvelée. Cette « majorité alsacienne » compte formellement s’élargir à la majorité présidentielle née en 2017, puisque la ministre déléguée à l’Insertion, Brigitte Klinkert, est candidate à Colmar. On retrouve quelques candidats étiquetés LREM, Modem ou Agir, parfois en tandem avec des élus « Les Républicains », sans que cela n’ait causé trop de remous localement. Dans certains cantons, il arrive aussi que plusieurs binômes de droite et du centre se concurrencent en fonction des histoires locales et de la situation politique.
Sur son extrême-droite, le Rassemblement national a investi des candidats dans tous les cantons alsaciens sauf deux. Compte tenu de ses scores passés, il devrait tabler sur de bons résultats au premier tour et des qualifications au second. Pour attester d’une « progression », il faudra que le parti de Marine Le Pen réussisse à remporter des seconds tours et intégrer pour la première fois une assemblée départementale alsacienne.
Les écologistes présentent ou soutiennent des binômes dans la plupart des cantons, parfois dans de larges alliances à gauche, parfois avec des candidats non étiquetés mais engagés localement. Se qualifier à plusieurs seconds tours, mais surtout créer des surprises dans certains cantons serait le signal que les idées écologistes rencontrent un écho électoral en Alsace, et pas seulement dans les centres urbains.
Le parti régionaliste Unser Land présente 21 binômes, comme en 2015, dans les secteurs ruraux. Comme le RN, il fait face à la difficulté de se qualifier et surtout de remporter des seconds tours. Même si le mode de scrutin ne lui est pas favorable, il espère aussi intégrer l’assemblée alsacienne et peser dans les débats sur l’avenir institutionnel de l’Alsace.
À Strasbourg, match entre PS et écologistes, demi-accord dans les bastions de droite
À Strasbourg et dans ses six cantons, difficile de ne pas lire les enjeux sous le prisme des nouveaux rapports de force issus des élections municipales de 2020.
À gauche, les récentes tensions entre socialistes et écologistes structurent les candidatures. Ainsi, cinq des six conseillers départementaux sortants du Parti socialiste repartent en campagne, en misant notamment sur leur ancrage et leur notoriété locale. S’ils ne devaient pas être renouvelés par les électeurs, une page se tournerait pour le PS à Strasbourg. Le parti est localement en proie à d’importantes divisions stratégiques. Ses cadres sont partagés entre une attitude hostile ou conciliante à adopter vis-à-vis de leurs anciens alliés écologistes, qui les ont supplantés en 2020. Ces fractures se répètent sur les listes des élections régionales. Des Socialistes bas-rhinois se retrouvent avec l’écologiste Éliane Romani, officiellement investie par le PS dans le cadre d’un accord, d’autres sont proches de « l’Appel Inédit » conduit par l’ancienne ministre socialiste Aurélie Filippetti. Quelques nouvelles têtes, dont un membre de la France insoumise, sont investies dans des cantons moins favorables électoralement.
Les écologistes font, eux, le pari du renouvellement. Dans une alliance avec plusieurs partis de gauche (PCF / Place publique / Génération.s / Alternative alsacienne), ils présentent 12 candidats sans mandat actuel ou passé. Atout ou handicap ? D’ordinaire, les élections départementales voient beaucoup de maires, adjoints et autres élus locaux sortants se présenter pour surfer sur leur identification par les électeurs de leur canton, dans un scrutin où les enjeux sont difficiles à percevoir. Mais les écologistes mettent en pratique leur opposition aux cumuls des mandats. Si aucun de ces binômes ne devait l’emporter à Strasbourg le 27 juin, ce résultat pourrait néanmoins sonner comme un avertissement pour la municipalité écologiste, un an après sa victoire.
Unis au second tour des élections municipales en 2020, la droite et LREM se concurrencent officiellement sur tous les cantons, sauf le 4 (Robertsau-Wacken) le bastion historique de la droite et du centre. L’ancienne tête de liste Jean-Philippe Vetter (LR) fait équipe avec Anne Tennenbaum, du micro-parti de centre-droit Agir, allié de LREM. Dans le canton 6 (Meinau-Neuhof), secteur quadrillé par le tandem Pascale Jurdant-Pfeiffer (UDI) et Jean-Philippe Maurer (LR), élus depuis les années 2000, la majorité présidentielle a certes mis un candidat Modem, mais très peu connu. En revanche, la concurrence à droite s’annonce rude dans le canton 5 (Orangerie-Esplanade-Krutenau), remporté par le PS en 2015. L’élu sortant Nicolas Matt (passé chez LREM) se voit challengé à la fois par Jean-Emmanuel Robert, cadre de LR et ancien élu, et par une ex-colistière d’Alain Fontanel (et donc de Nicolas Matt), Laurine Roux du Parti radical, elle-même en tandem avec Richard Seiler, ancien colistier de… Jean-Philippe Vetter.
Des binômes en quête de surprise et de poids électoral
Dans les trois autres cantons (1-2-3), de nouvelles têtes ont été investies par les partis de droite et LREM/Modem. Cela permettra de jauger du poids électoral des deux camps dans des secteurs où ces formation sont moins implantées. Ces candidats auront comme tâche ardue de créer des surprises en profitant de la division PS / EELV pour se qualifier au second tour, puis jouer les troubles-fête.
Moins implanté à Strasbourg et sans élu municipal depuis 2020, le RN présente des candidats dans cinq des six cantons. En 2015, il avait accédé à deux seconds tours dans les quartiers ouest (cantons 2 et 3). Enfin, d’autres binômes « sans étiquette » ou « divers » souhaitent peser sur les débats dans les différents cantons, grappiller des pourcentages qui pourraient manquer à l’un ou l’autre débat pour se qualifier au second tour et donc s’ancrer dans le paysage politique micro-local. À noter notamment, l’arrivée du parti strasbourgeois Égalité républicaine et sociale (ERS) dans 4 cantons, où l’on retrouve des fondateurs de la jeune association de locataires des bailleurs sociaux Alis.
En 2015, quatre des six cantons strasbourgeois avaient été remportés par des adjoints au maire socialiste et deux par la droite, déjà dans l’opposition.
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