Archevêque de Strasbourg depuis 2017, le début de la fin commence en juin 2022 pour Mgr Luc Ravel. À cette date, le Vatican annonce le lancement d’une « mission apostolique », une sorte d’enquête interne, concernant les méthodes managériales de l’ancien évêque aux armées. Dix mois plus tard, l’archevêque de Strasbourg démissionne officiellement. Résumé d’un feuilleton à rebondissements, entre crise ouverte avec le Vatican et soulèvement d’une partie des croyants catholiques contre leur archevêque.
Dès le 27 juin, le Vatican missionne l’évêque de Pontoise Mgr Stanislas Lalanne et le secrétaire émérite du dicastère pour le clergé Mgr Joël Mercier pour enquêter sur le terrain du diocèse de Strasbourg. Une trentaine de prêtres et de laïcs sont auditionnés. Selon le journal La Croix, ce sont bien les méthodes managériales de Mgr Luc Ravel qui font l’objet des investigations ecclésiastiques.
En octobre 2022, Mgr Lalanne rend ses conclusions au Vatican. Toujours d’après La Croix, le cardinal Marc Ouellet convoque ensuite l’archevêque de Strasbourg pour lui signifier la volonté du Saint-Siège de mettre fin à ses fonctions. Fidèle aux exigences du Concordat, la représentation du Pape demande à Luc Ravel d’envoyer une lettre de démission à l’Elysée.
Une série d’évictions
Mais l’archevêque de Strasbourg ne suit pas la consigne. Plusieurs sources évoquent une date limite pour la présentation de la démission, le 15 février. Mi-février, Luc Ravel aurait envoyé un courrier… avec un texte trop flou pour être pris comme une démission.
Le conflit entre Luc Ravel et le Vatican devient public un mois et demi plus tard. Mardi 4 avril, les Dernières Nouvelles d’Alsace révèlent le limogeage de l’évêque auxiliaire Mgr Christian Kratz par voie de courrier sous la porte à 6 heures du matin. L’archevêque de Strasbourg défend cette éviction en pointant la passivité du religieux dans une affaire de matériel pédopornographique détenu par un aumonier du collège Saint-Étienne à la fin des années 2000. Mais selon La Croix, qui cite une source romaine, cette décision de Luc Ravel aurait une autre motivation : Mgr Christian Kratz était pressenti par le Vatican pour prendre la place d’archevêque de Strasbourg.
Dans la foulée, Mercredi 5 avril, une quinzaine de catholiques ont manifesté sur le parvis de la Cathédrale pour demander la démission de l’archevêque. Quelques jours plus tard, des « chrétiens du diocèse de Strasbourg » créent une pétition pour lui demander de quitter ses fonctions. Elle atteint rapidement plus de 1 000 signatures. Acculé vers la sortie, Mgr Luc Ravel a passé ses dernières semaines d’archevêque de Strasbourg bunkérisé. Certains le décrivent comme malade. D’autres assistent impuissants à la série d’évictions lancée par l’évêque : mardi 18 avril, le vicaire général Hubert Schmitt est évincé du conseil épiscopal. Comme les Dernières Nouvelles d’Alsace le racontent, il est accusé d’attouchements sur un jeune servant de messe il y a trente ans.
Un diocèse fictif pour limoger Luc Ravel
Le lendemain, mercredi 19 avril, les Dernières Nouvelles d’Alsace révèlent une procédure canonique visant le père Bernard Xibaut, chancelier du diocèse, pour des « gestes déplacés » sur un séminariste en 2006. Quelques jours plus tôt, le père Bernard Xibaut prenait la parole sur BFM Alsace pour évoquer la probable démission de l’archevêque de Strasbourg.
Le Boléro de Ravel a pris fin le jeudi 20 avril. Craignant sans doute d’autres évictions et une division plus profonde encore du diocèse de Strasbourg, le Vatican a choisi une voie en dehors du Concordat, qui ne nécessite pas d’approbation de la part du président de la République. Mgr Luc Ravel va être transféré dans un diocèse fictif, comme l’avait été l’évêque d’Évreux Mgr Jacques Gaillot, exfiltré en 1995 en étant nommé dans le diocèse de Partenia, en Algérie.
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