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Essentielles mais « cassées », les caissières de Auchan Hautepierre demandent un peu de reconnaissance

Vendredi 20 avril, une quarantaine de salariés de Auchan Hautepierre ont brièvement cessé le travail pour protester des salaires trop faibles et l’absence de prime Covid. Après un an de crise sanitaire, les caissières dénoncent la pression morale de leurs managers et celle de clients agressifs.

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photo du débrayage Auchan Hautepierre

Vendredi 30 avril à 10h, dans le froid et la pluie, une quarantaine de salariés sur les quelques 400 de l’hypermarché Auchan de Hautepierre se sont rassemblés devant le magasin, à l’appel des syndicats CGT, FO et CFDT. Ces magasiniers et caissières ont cessé le travail pendant une heure, une première depuis plusieurs dizaines d’années dans cet hypermarché aux conditions de travail difficiles mais aux syndicats peu habitués à appeler à la grève.

Les employés se sont mobilisés pour protester contre la trop faible augmentation des salaires, seulement 0,8% en 2021. « Un taux inférieur au niveau de l’inflation, malgré les résultats très positifs de l’entreprise », souligne Monique Jrajria, déléguée syndicale de la CGT pour Auchan Hautepierre.

Également au centre des revendications : la « prime Macron« , pour les « travailleurs de la deuxième ligne ». Il s’agit d’un complément de salaire pour dédommager les salariés face aux risques pris pendant la crise sanitaire mais le groupe de grande distribution a décidé de ne pas en faire bénéficier ses employés. « Auchan était fier de travailler avec nous pendant la première vague. Là ils sont tellement fiers de nous qu’ils ne veulent pas nous donner la prime Covid », lâche avec amertume l’élue CGT, caissière depuis 35 ans.

photo du débrayage Auchan Hautepierre
Une quarantaine d’employés du Auchan de Hautepierre ont quitté leur poste vendredi 30 avril.
Photo : VV / Rue89 Strasbourg / cc

Les caissières craignent des suppressions de postes

Le magasin prévoit de diminuer le nombre de caisses avec hôtesse pour les remplacer par des îlots de paiements automatiques, dont certains n’accepteront plus les espèces. Les caissières craignent des suppressions de postes. Giovanna Sagliano, caissière de l’hypermarché depuis 1989 et élue CGT au Comité social et économique (CSE), déplore la situation :

« Il y a toujours plus de travail et toujours moins de bras. Depuis jeudi par exemple, on doit nettoyer les caisses automatiques toutes les heures. C’est impossible. Et les départs à la retraite ne sont pas remplacés. Nous, les anciennes, on n’est plus qu’une cinquantaine sur les 140 salariés qui travaillent en caisse. La direction préfère embaucher des contrats professionnels, qu’ils ne gardent que six mois. »

photo de Giovanna saglianno
Giovanna Sagliano travaille au Auchan de Hautepierre depuis 1989. Photo : VV / Rue89 Strasbourg / cc

« On est cassées »

Des scanners qui ne fonctionnent pas, des téléphones en panne, des tapis dont la propreté laisse à désirer… « Les caisses sont foutues », s’agace Rolande, caissière du magasin depuis 1999. Selon les employées, le matériel dysfonctionnel n’est pas systématiquement remplacé. « Si une chaise est cassée, on nous dit simplement d’échanger avec une autre caisse », explique Anne (le prénom a été changé). La jeune femme, qui travaille depuis dix ans dans l’hypermarché, assure que le même matériel est utilisé depuis son arrivée.

photo de Roland, caissière à Auchan
Rolande est caissière à Auchan Hautepierre depuis 22 ans. Photo : VV / Rue89 Strasbourg / cc

« Les chaises sont cassées, et nous aussi on est cassées », s’énerve Karin, 21 ans de caisse à Hautepierre. À côté, Sylvie, acquiesce : 30 ans de travail en caisse lui ont valu une opération du dos, une tendinite dans chaque épaule et trois hernies. « Les gestes répétés et la manipulation de produits lourds, c’est loin d’être anodin » précise celle qui affirme pourtant aimer son métier. « Quand les douchettes sont en panne, on est obligées de soulever les packs d’eau de six kilos par exemple ».

De nouvelles caisses devraient être installées au Auchan de Hautepierre en juin, mais cela ne rassure qu’à moitié les caissières. « Ces caisses seront plus puissantes mais les installations sont fragiles. Déjà aujourd’hui quand on branche les deux chauffages de l’îlot, c’est toute la ligne de caisse qui saute », prévient une autre salariée.

Une double pression difficile à encaisser

Ces caissières dénoncent aussi des pressions morales. « On a mal au ventre avant d’appeler pour un arrêt maladie car on sait que l’on va se prendre des remarques. Une fois, ma cheffe m’a répondu “c’est la journée des handicapées” quand je suis allée la voir pour lui dire que j’étais malade », lâche Sabine, en caisse à Auchan depuis 30 ans. Un constat qui n’étonne pas Monique Jrajria, élue CGT. Il n’est pas rare que des employés lui fassent part de réflexions reçues de managers après une absence pourtant justifiée.

Mais la pression se fait aussi ressentir auprès de clients, « de plus en plus agressifs depuis le début de la crise sanitaire », affirme la déléguée syndicale. Certaines caissières reconnaissent ne pas toujours se sentir en sécurité face à des clients qui refusent de porter le masque ou qui ne comprennent pas qu’ils ne peuvent pas se présenter à plusieurs en caisses automatiques. « Ça va parfois jusqu’aux insultes », raconte Anne, qui peine à se faire entendre par dessus les applaudissements.

Les salariés du magasin de Hautepierre ne sont pas les seuls à se mobiliser contre la chaîne de grande distribution. Un débrayage est prévu à Auchan Baggersee samedi 22 mai à 10h.


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