Après la pause hivernale, les hostilités reprennent au conseil municipal. La première séance de l’année 2023 a lieu lundi 30 janvier dans l’hémicycle rénové du centre administratif. Dès le début des débats, le conseiller Jean-Philippe Vetter (Les Républicains) donne le ton en interpellant la maire Jeanne Barseghian (EE-LV) pour une question d’actualité refusée. Sombre histoire d’un mail envoyé par le conseiller municipal de droite à une heure jugée trop tardive par l’exécutif écologiste. S’ensuit une cascade de réactions outrées, venant de toutes les oppositions. « La crédibilité d’une assemblée, c’est le respect de son fonctionnement », déclame Catherine Trautmann avec solennité. Agacement manifeste dans les rangs de l’exécutif, qui s’impatiente bruyamment. La séance va être longue.
Montant total des emprunts : 273 millions d’euros
Le débat d’orientation au budget a été un exercice fastidieux pour la majorité. Mais cette discussion est obligatoire avant le vote du budget de la Ville. En 2022, la municipalité s’est endettée de 32,24 millions d’euros supplémentaires. Le montant total des emprunts est ainsi passé de 241 millions d’euros au 1er janvier 2021 à 273 millions d’euros à la même date en 2022. « Vous vous retrouvez dans la situation de la cigale qui, une fois la bise venue, se retrouve fort dépourvue », persifle Alain Fontanel (Renaissance) avec lyrisme.
Si l’ancien premier adjoint de Roland Ries reconnaît un « effet marqué de la crise énergétique », il ne désarme pas : « Vous ne devez votre salut budgétaire qu’à l’État. » En 2022, la dotation globale de fonctionnement versée par l’État sera de 47,9 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 7,2 millions d’euros pour compenser l’exonération de fiscalité locale.
Dans le sillage d’Alain Fontanel s’ensuit une volée de remarques similaires, dans les rangs de la droite et des socialistes, pointant l’absence de rigueur et l’usage excessif de l’emprunt. Agacée, l’élue de la majorité Suzanne Brolly raille la communion dans les rangs de l’opposition. « C’est un scandale, ces insinuations ! », tempête Catherine Trautmann, subitement hors d’elle.
Syamak Agha Babaei : « Qui a peur de la dette ? »
L’exécutif reste stoïque. « Qui a peur de la dette ? Comme si l’emprunt devait faire peur en soi », réplique le premier adjoint Syamak Agha Babaei. « Oui, nous préférons augmenter notre dette, car nous pensons que la vraie dette est d’abord écologique et sociale. » À titre d’exemple des projets financés, l’élu évoque le projet de végétalisation et de rénovation thermique des écoles, ou l’embauche de nouveaux agents administratifs.
Après une dernière salve d’accusations en légèreté budgétaire, le débat s’achève ; le vote du budget n’aura lieu qu’au printemps, au plus tard le 15 avril.
Légère accalmie dans l’hémicycle
Dans un hémicycle amaigri de quelques élus – pause café oblige – les débats s’apaisent subitement. Pour cause : la résolution portant sur la nomination prévue de Strasbourg comme capitale mondiale du livre en 2024 par l’Unesco fait l’unanimité dans les votes. « L’année 2023 sera la rampe de lancement de ce projet », assure Jeanne Barseghian, qui égraine le nom des villes allemandes (Francfort, Stuttgart, Dresde, etc.) souhaitant s’associer à Strasbourg dans ce cadre. L’élu d’opposition Pierre Jakubowicz (Horizons) propose la création d’un groupe de suivi du projet, un énième comité ad hoc auquel la maire consent.
Après cette parenthèse littéraire, les passes d’armes reprennent vite dans l’hémicycle. Notamment concernant le vote d’une dernière subvention à l’association Les Amis du zoo de l’Orangerie, qui s’occupe des derniers animaux du parc éponyme. Après un imbroglio sur le statut de la structure, la municipalité entérine l’attribution d’une dernière subvention de 5 000 euros pour les frais de renvoi des douze macaques de Tonkean et des six hiboux grands-ducs restants.
En fin de séance, le débat sur l’abrogation de la résolution sur les dispositifs de financements des associations cultuelles relance les saillies. La préfète Josiane Chevalier avait jugé que cette décision était « entachée d’illégalités manifestes ». Par le vote, la municipalité acte donc de la mort administrative du texte. « J’ai eu le droit à une litanie très longue sur le sujet, commence Jeanne Barseghian, j’assume s’il y a eu des imprécisions dans la décision. (…) Pour éviter d’aller au contentieux, nous préférons abroger le texte. » Frissons de satisfaction dans les rangs de l’opposition. Très vite, l’édile douche leurs espoirs en promettant un nouveau texte avec « certes quelques modifications, mais il ne s’agit pas de tout remettre à plat. »
Furieuse, l’opposition se retire
La tension monte d’un cran au moment d’examiner les résolutions. Lorsque le conseil municipal doit traiter celle de Pierre Jakubowicz – « Rouvrir les musées, une priorité » – le premier adjoint Syamak Agha Babaei annonce qu’elle ne sera pas soumise au vote, arguant que la municipalité « va présenter dans quelques jours une modification des horaires ». Réaction immédiate d’Alain Fontanel : « Durant la réunion des présidents de groupe (le matin même, NDLR) il n’a jamais été question de ça. La résolution était inscrite à l’ordre du jour. Elle doit être soumise au vote. »
Face au refus de la majorité, une première suspension de séance est réclamée par le groupe Strasbourg Ensemble d’Alain Fontanel. Alors que l’opposition ne décolère pas, une deuxième suspension de séance est décidée par le PS. Pendant ce temps, Alain Fontanel demande à la maire si d’autres résolutions subiront le même sort. Ce sera effectivement le cas pour la motion des communistes sur le soutien à la mobilisation contre la réforme des retraites. À la reprise, les élus de Strasbourg Ensemble et du groupe LR quittent ensemble l’assemblée. Les élus du Parti socialiste suivront dans la foulée. Même si le nombre d’élus présents est suffisant pour poursuivre, Jeanne Barseghian annonce la fin abrupte du conseil municipal.
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