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CSC de l’Elsau : le préfet signale au procureur des faits « d’intimidations verbales et physiques »

Suite à une réunion sur l’avenir du centre social et culturel de l’Elsau, le préfet du Bas-Rhin a signalé au procureur des faits « d’intimidations verbales et physiques, diffamations et injures ».

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CSC de l’Elsau : le préfet signale au procureur des faits « d’intimidations verbales et physiques »
Avec son balais, son téléphone portable et ses propos, Hmida Boutghata a grandement contribué à l’agressivité dirigée contre les représentants de l’Etat et de la Ville.

Des propos insultants, un balai brandi au visage… Mardi 18 mars, les adjoints à la maire de Strasbourg Guillaume Libsig et Hülliya Turan ainsi que la préfète déléguée à l’égalité des chances Marilyne Poulain ont vécu une réunion publique chaotique au sujet de l’avenir du centre social et culturel (CSC) de l’Elsau. Dans un communiqué publié le lendemain, le préfet du Bas-Rhin Jacques Witkowski déplore que les représentants des financeurs du CSC aient « été violemment pris à partie par les opposants à la liquidation judiciaire » de l’association gestionnaire du centre. Le préfet « condamne fermement ces faits : intimidations verbales et physiques, diffamations et injures ». Il indique avoir « saisi la procureure de la République de Strasbourg ».

Avec cette réunion, la préfecture et la Ville de Strasbourg souhaitaient donner des réponses aux habitants inquiets suite la liquidation judiciaire de l’association gestionnaire du CSC. Ils ont manqué d’information avant la décision du tribunal. La suspension des financements de l’association a été décidée en 2023. Mais les financeurs n’ont expliqué leur choix qu’en mars 2025. Deux audits internes ont mis en évidence une gestion opaque et clanique de la structure, mais dans le quartier, les arguments les plus audibles sont ceux des salariés et des membres du conseil d’administration de l’association. Pour eux, l’association gestionnaire serait victime d’une machination politique et le centre fonctionnait bien. En tout cas toujours mieux que maintenant qu’il est fermé.

Un balai au visage

Une vidéo publiée par Hmida Boutghata, militant de l’association de locataires Alis, permet de saisir concrètement les faits déplorés par le préfet. Dès le début de la réunion, cet habitant de l’Elsau s’avance vers les représentants de la Ville et de l’État. Balai à la main, tendu en direction des élus et de la préfète, il s’adresse en particulier à Guillaume Lisbig, adjoint en charge de la vie associative, qu’il qualifie d’« incapable notoire » avant de prendre un ton plus menaçant : « Vous savez ce qu’on va faire ? On va vous balayer avec ce balai (…) On viendra à Cronenbourg faire le nécessaire. On vous chassera avec les armes de la République. »

C’est ainsi que Hmida Boutghata donne le ton de la réunion. L’atmosphère est pleine de provocations et de propos insultants. « Turan dégage ! Turan dégage ! », lance le militant associatif après s’être à nouveau approché, cette fois de l’adjointe en charge de l’éducation Hülliya Turan. Son balai se trouve parfois à quelques centimètres du visage des représentants des financeurs.

« On les surveille les collabos »

La présidente de l’association du CSC de l’Elsau Soumia Yayahoui s’avance elle aussi à plusieurs reprises. Elle pointe du doigt Hülliya Turan et l’accuse d’avoir « fait mal à 7 000 habitants » du quartier. Elle les désignera plus tard comme une « mafia politique ». Derrière elle, Hmida Boutghata continue de crier : « Voilà la traitresse, la voilà l’indigne de la République. Faut pas oublier les collabos. On les surveille les collabos. »

Un peu plus tard, un habitant du quartier s’adresse à l’adjoint en charge de la vie associative Guillaume Libsig, en le pointant du doigt au niveau du visage : « C’est notre quartier. Vous ne savez pas ce qui se passe ici. Donc vous n’avez pas à venir parler à la place des habitants. »

Interrogé sur le signalement du préfet, la préfète déléguée à l’égalité des chances Marilyne Poulain approuve la démarche en précisant : « Des menaces ont été proférées sur le fait que le quartier allait prendre feu. On peut ne pas être d’accord et j’entends la colère de certains. Mais on ne peut pas accepter une telle violence vis-à-vis de représentants de l’État et d’élus. »

« Par nature le débat public est virulent »

« Ce qui s’est passé dans cette réunion est inacceptable », ajoute Guillaume Libsig :

« Il y avait un niveau de tension organisée et de violences verbales volontaires extrêmement intenses pour transformer ce moment de dialogue en tribunal d’opinion. Ceci nous a empêché de dialoguer avec les habitants sur la continuité des services dont ils ont besoin. Je salue le fait que la préfecture rappelle que les cadres du dialogue républicain doivent être respectés et ne sont pas négociables. On a maintenant besoin d’apaisement et de coopération pour organiser la continuité des services, dans l’intérêt des habitants. »

Dans une réponse écrite à Rue89 Strasbourg, Hmida Boutghata estime que ses actes « visent à dénoncer les manquements, l’inertie des élus ou des décideurs publics ». Il considère que « dans le domaine du discours politique, une certaine dose d’exagération est admise ». Selon lui, « le débat public est virulent par nature » et « la vidéo tournée sur Facebook prouve qu’il n’y a eu aucune violence ni appel à la haine » :

« Le balai est un symbole pour dénoncer l’état de notre quartier abandonné. […] Mes propos sont dirigés vers la fonction, qui relève de la critique légitime, critique qui n’excède pas ce que permet le débat démocratique. Je suis opposé à toute forme de violence. À mon sens, ce signalement participe d’une volonté de criminaliser des militants associatifs et bâillonner les habitants des quartiers. »


#CSC Elsau

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