Depuis la rentrée et surtout depuis la fête de Noël en décembre, parents et salariées de la Crèche privée innovante de Neudorf étaient dans l’incertitude quant à la pérennité de la structure. Dès qu’il a été acté que la crèche quitterait le local de la rue du Fossé-Rietberg à Neudorf pour des raisons de trésorerie, Francine Schoch, patronne de cette structure d’accueil petite enfance 100% privée depuis 18 ans, a promis aux uns et autres son transfert dans de nouveaux locaux et la transformation de la crèche en deux micro-crèches subventionnées par la Caisse d’allocations familiales.
Local vendu vendredi au PS du Bas-Rhin
Seulement, rien ne s’est passé comme prévu et la crèche, qui accueillait encore une dizaine d’enfants quotidiennement, a finalement fermé ses portes hier, mercredi 26 février. Le local sera vendu demain vendredi au Parti socialiste du Bas-Rhin, qui a signé une promesse de vente il y a déjà plusieurs mois et patientait, casant ses salariés ici ou là, dans l’attente d’une solution pour la crèche. Mais, assure Mathieu Cahn, premier secrétaire fédéral du PS67, « nous avons laissé largement le temps à la propriétaire de se retourner, en acceptant de rentrer dans les locaux avec beaucoup de retard. Nous avons géré nos difficultés pour que les parents et les enfants accueillis dans cette crèche ne soient pas pénalisés ».
Pénalisés, de nombreux parents l’ont été et le sont encore, avant tout à cause d’un manque de transparence et de communication dans cette affaire de la part de Francine Schoch. Début février, une mère de famille témoignait :
« L’ancienne directrice a annoncé la fermeture définitive de la crèche par un petit mot dans le sac des parents ! Elle arrête tout et n’ouvrira pas de micro-crèche. Le PS vit lui aussi un « cauchemar », terme employé par la trésorière Caroline Barrière, car ils sont dans un entresol en attendant de recevoir les clés. Ils ont accepté début d’année d’attendre trois mois le temps qu’elle obtienne son agrément pour la micro-crèche. Les parents qui sont restés vont se retrouver sur le carreau à la fin de mois. Quant aux cautions, vous vous doutez bien qu’elles sont encore en sa possession… Du moins en partie, car beaucoup de parents n’ont plus payé depuis décembre. »
« Un mois pour se retourner, nous sommes très en colère »
Une autre confirmait au même moment :
« Mercredi 5 février, nous avons eu un “joli petit mot” de la part de la directrice dans le sac de notre enfant : la crèche ferme ses portes le 28 février ! Voilà ! Même pas un mois pour rechercher un nouveau mode de garde pour notre enfant, une honte ! On se retrouve sans solution. Et c’est sans parler des employées auxquelles elle n’a toujours remis aucun document de licenciement ou autre. Elle attend certainement qu’elles ne se présentent pas le 3 mars afin de pouvoir les licencier pour abandon de poste ! Nous sommes très en colère… Mais que faire ? »
Les événements se sont accélérés ces deux dernières semaines. Le local qui devait accueillir les deux micro-crèches avenue de Colmar n’était finalement plus disponible. « La personne m’a prévenue le 27 janvier qu’elle se retirait du projet », déplore Francine Schoch. « Nous avons informé Mme Schoch que deux micro-crèches côte à côte, cela faisait une crèche, donc que ce n’était pas dans les clous de ce que nous demandions, précise-t-on par ailleurs à la Caisse d’allocations familiales qui délivre les agréments pour ce type d’établissements. Cela, avant même tout dépôt de dossier. » Une précision qui accrédite la thèse défendue par certains parents et acteurs du dossier, selon laquelle Francine Schoch, désireuse de se retirer de cette activité à 67 ans, n’aurait jamais vraiment eu l’intention d’ouvrir ces micro-crèches…
Personnel et enfants pris en charge par le repreneur
Retournement de situation, mi-février, la directrice vend son fond de commerce – la crèche privée de Neudorf, sur le point de fermer, mais également sa micro-crèche encore en activité à Brumath – à la société familiale People and Baby qui gère 160 crèches en France, dont celles d’entreprises ou de collectivités. Une opération qui s’est faite « très rapidement », reconnaît le directeur du développement de People and Baby Charles Benoist, qui confirme : « La crèche de Neudorf n’existe plus ».
Ainsi, le personnel et les quelques familles qui n’ont pas encore trouvé de nouveau mode de garde devraient être « repris » par People and Baby, gestionnaire de deux crèches conventionnées avec la CAF à Strasbourg. Si Francine Schoch se dit « soulagée » par cette solution, les salariées, pour lesquelles Charles Benoist « recherche actuellement une solution », ne sont pas vraiment rassurées. L’une d’entre elles notait mardi :
« On sait que la crèche est vendue, mais on ne sait pas si on va être recasées ou licenciées. Pendant un mois, il a été difficile pour nous de savoir ce qui allait se passer et on craignait une liquidation avec des salaires impayés. On n’a pas vraiment eu d’explication de la part de Mme Schoch, mais on a compris qu’elle ne voulait plus perdre d’argent avec la crèche. La vente, ça lui évite de payer nos licenciements. »
« Moi, je n’ai fait que subir »
Personnel amer et parents également. Beaucoup regrettent de n’avoir été informés qu’au dernier moment, sans respect des deux mois de préavis et sans toujours récupérer leur caution. Alors que Francine Schoch assure que chacun a été remboursé, l’un ou l’autre parent attendraient encore. Du côté de l’ancienne directrice, désormais à la retraite, les comptes non-soldés sont moraux plus que financiers. Francine Schoch tente une dernière justification :
« En se positionnant pour partir les uns après les autres, les parents de Neudorf ne m’ont pas aidé à monter un nouveau projet viable. La personne qui devait me donner ses locaux [avenue de Colmar] a elle aussi tout fichu par terre en se désistant fin janvier. Moi, je n’ai fait que subir. Peut-être que je n’ai pas signalé le déroulement des choses dans les règles de l’art, mais des reproches sont à faire à beaucoup de monde, pas qu’à moi. D’ailleurs, je n’ai aucune nouvelle des parents de Neudorf, à part d’Alicia. Marquez-le dans votre article ! C’est la seule qui m’a aidé avec son mari à déménager le matériel entassé dans la cave par le personnel… »
S’accrochant à une future collaboration hypothétique avec le repreneur de sa société, Francine Schoch attend encore « une reconnaissance, après 18 ans à cheminer toute seule ».
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