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Au conseil municipal, unanimité pour plus d’éthique, mais lors du vote seulement

Dans la plus grande confusion, le conseil municipal a adopté « à l’unanimité » la possibilité de remplir une déclaration d’intérêts pour les élus volontaires. L’opposition a même réussi à pousser le maire et les adjoints à s’engager à publier les leurs. Pour les conseillers municipaux en revanche, personne ne sait vraiment ce qu’il en adviendra.

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Au conseil municipal, unanimité pour plus d’éthique, mais lors du vote seulement

Fabienne Keller, sénatrice du Bas-Rhin (Photo Pascal Bastien)
Fabienne Keller et plusieurs élus UMP ont participé au vote contre leur gré. (Photo Pascal Bastien)

Vent de transparence à Strasbourg ou simple petite brise ? Après avoir pu se targuer d’être la première ville de France à se doter d’un déontologue en novembre, il était question lundi 26 septembre de préciser le rôle du professeur Patrick Wachsmann.

Pour cela, la municipalité a soumis un texte proposant à tous les conseillers municipaux « volontaires » de remplir une déclaration d’intérêts, c’est-à-dire d’indiquer profession, adhésions à des associations, mandats ou encore les parts dans des entreprises, pour s’assurer que leurs décisions ne favorisent pas leur intérêt. Plus personnel, les revenus ou encore l’activité du conjoint doivent figurer dans ces documents. À ne pas confondre avec les déclarations de patrimoines, qui permettent de comparer l’enrichissement personnel d’un élu entre le début et la fin de son mandat.

Une déclaration que le déontologue gardera secrète

Les conseillers municipaux auront la possibilité de remettre cette déclaration au déontologue qui les gardera précieusement et veillera lui-même à ce qu’il n’y ait pas de conflit d’intérêt. Lors de son intronisation, il avait dit « compter sur la presse » pour l’aider à effectuer sa tâche, mais ce vœu semble déjà être un lointain souvenir. Il peut être saisi par n’importe quel citoyen (élu et personnel administratif compris) voire s’auto-saisir.

Bien que ces déclarations soient volontaires (la loi ne permet pas d’obliger un conseiller municipal de remplir un tel document), les débats ont provoqué de la confusion, d’autant plus que le groupe Strasbourg À Vos Côtés (UMP) de Fabienne Keller a déposé deux amendements le matin même qui ont été discutés lors de la séance.

Avant, seul le maire et ses adjoints étaient sommés de remplir une telle déclaration comme l’exige la loi, mais à ce jour elles ne figurent pas sur le site de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Maintenant les conseillers municipaux peuvent se mettre au diapason.

Où l’on change d’avis sur les textes en cours de séance

Sauf que dans ses deux amendements, l’UMP a proposé que les déclarations du maire et de ses adjoints soient disponibles directement sur le site de la Ville de Strasbourg. Malgré une tentative de reformuler l’amendement en proposant à la place « un lien vers le site de la HATVP » (qui ne permet pas en l’état de consulter les déclarations des élus locaux des grandes villes), le maire Roland Ries, visiblement très soucieux d’obtenir l’unanimité de son assemblée, s’est plié au souhait du groupe d’opposition.

Ces amendements et changements d’avis ont nécessité de nombreuses explications de vote et précisions qui n’ont pas semblé suffisantes au moment de voter. Le groupe UMP souhaitant disposer d’une version écrite du texte avant de se prononcer. Fabienne Keller avait beau demander une suspension de séance ou crier « nous ne participons pas au vote », ces efforts étaient vains. Le maire avait estimé qu’il y avait eu assez d’explications et que tout le monde prenait part au vote et donc que l’unanimité tellement recherchée était atteinte bon gré mal gré. Lui-même était pressé de quitter l’hémicycle pour rejoindre l’Élysée et un dîner avec le président colombien.

Une éventuelle publication ne déchaîne pas l’enthousiasme

Maintenant que la disposition est votée, les conseillers municipaux vont-ils « s’empresser » de remplir leur déclaration comme l’espérait Chantal Cutajar, adjointe en charge entres autres de la déontologie quelques jours plus tôt ? Voire de la publier comme les députés français ? Rien n’est moins sûr.

Du côté d’Europe Écologie Les Verts, Jeanne Barseguian a pris l’engagement que tous les élus du groupe rempliront une déclaration pour le déontologue, sans précision sur une éventuelle publication. La question n’a pas été discutée au sein du parti comme l’explique Abdelkarim Ramdane :

« Avec le groupe écologiste nous voulions aller plus loin sur la transparence que le texte proposé et que le déontologue ait plus de pouvoir. Dans notre parti, les profils sont très variés, des retraités, des médecins, des chômeurs, des fonctionnaires et cela peut justement montrer que chacun peut faire de la politique. Cela ne me dérange pas de remplir une telle déclaration car je n’ai rien à cacher. Est-ce que je la publierai ? Je ne sais, on n’en n’a pas vraiment discuté au sein de notre groupe, mais je pense que oui à titre personnel. »

En séance, Éric Sénet (société civile au sein du groupe UMP) s’est, lui, étonné que seule la Ville de Strasbourg soit concerné par une telle charte alors que les décisions économiques importantes se déroulent au niveau de l’Eurométropole (ex-CUS). Également membre de l’opposition, mais affiliée à l’UDI, Pascale Jurdant Pfeiffer a tenu à prendre ses distances avec l’UMP :

« Nous avions pu exprimer nos craintes lors des réunions, qui étaient houleuses au départ. Elles ont été entendues. Cela n’a rien de révolutionnaire, quand j’étais adjointe (entre 2001 et 2008), je remplissais une déclaration de patrimoine au début et à la fin du mandat pour voir s’il n’y avait pas d’enrichissement. Rendre tout public peut être liberticide. Les membres de notre famille peuvent être désavantagés s’ils veulent travailler pour des entreprises qui ont des marchés publics avec la Ville de Strasbourg, j’en ai fait l’expérience personnelle. Contrairement à l’UMP, je ne pense pas que rendre public le patrimoine ou les revenus de l’exécutif (le maire et ses adjoints) soit une bonne chose. Certaines catégories sociales peuvent dès lors estimer que la politique est réservée aux riches et susciter beaucoup d’aigreur. Est-ce que je remplirai une déclaration ? Je me réserve le droit de décider plus tard. »

Son colistier François Loos a annoncé qu’il ne remplirait pas cette déclaration facultative, car il ne se sent pas impliqué par les décisions prises par la majorité. La représentante du FN, Julia Abraham, n’est pas intervenue lors du débat, mais n’est pas hostile à ces déclarations, bien que le sujet lui semble secondaire :

« Je ne me sentais pas directement concernée. Il y a des choses qui me choquent plus comme les subventions aux associations communautaires que droite et gauche votent ensemble. Je fais confiance a priori au déontologue, donc peut-être que je remplirai une déclaration. Concernant à Jean-Luc Schaffhauser (absent à cette séance et qui avait donné procuration à Julia Abraham ndlr) sa déclaration auprès du Parlement européen est déjà publique et bien plus complète que celle proposée ici. »

Les conseillers municipaux hésitants peuvent se rassurer, Chantal Cutajar, a précisé en séance qu’une déclaration mensongère ne pourrait pas être sanctionnée par la loi. Le maire et ses adjoints, s’ils se conforment à leurs engagements, devront néanmoins publier la leur sur strasbourg.eu. Quant à une date pour vérifier si ce vote sera suivi d’effets, il n’y en a tout simplement pas.

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