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Concert : Oxmo Puccino, roi du flow et des mots

Il a hérité du surnom très flatteur de « Black Jacques Brel ». Au-delà de l’illustre mais néanmoins écrasante comparaison, Oxmo Puccino est surtout un mélodiste doublé d’un orfèvre du verbe à la voix de stentor, sacré pour la seconde fois aux Victoires de la Musique. Entretien avec cet humble colosse dont l’imposante carrure occupera la scène de la Laiterie le 14 mars.

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Concert : Oxmo Puccino, roi du flow et des mots

Oxmo Puccino
Oxmo Puccino (Doc. remis)


De la chaleur, de la bonne humeur, une présence et un rire rassurants. Oxmo Puccino avance tranquillement sur cette petite route qui mène vers la quarantaine. Avec un credo, lorsqu’il chante son art dans Le Sucre Pimenté : « Le rap francophone, je vais me le piloter ». Et le volant, Oxmo l’a bien en main, mû par les décisions qu’il prend et qui orientent à la fois sa vie et sa carrière.

« Pour moi, la création ne souffre aucun compromis. Tu dois avoir la passion en toi, l’excitation, la flamme. Le principal, c’est d’arriver au bout de tes envies, mener à bien ton projet grâce aux décisions qui rythment ta vie. Mon but a toujours été le plaisir avant tout »

Voilà donc ce qui explique le parcours de ce Malien de Ségou très vite arrivé dans le 19ème arrondissement parisien pour devenir, aujourd’hui, le conteur des hauts de Belleville et de la Place des Fêtes. Ses armes, dans son environnement urbain loin d’être calme et apaisé, ce sont les métaphores, l’écriture au cordeau, la poésie sauvage, le théâtre tragi-comique de sa zone. L’ado pas encore Oxmo mais Abdoulaye Diarra pose son flow vers l’âge de treize ans.

Il participe au collectif Time Bomb, travaille avec Lunatic (Booba et Ali), collabore avec les X-Men, développe les sessions freestyle de l’émission « Original Bombattak » de la radio Générations. Quelques années plus tard, celui qui est devenu le « Black Desperado » côtoie Kheops du groupe IAM et prend part à plusieurs projets, mixtapes, compilations, bandes originales de films et se concentre surtout sur ses productions personnelles (son premier disque, Opéra Puccino en 1998, puis L’Amour est mort en 2001 et Cactus de Sibérie en 2004). Mais à cette époque, Oxmo Puccino a besoin d’ailleurs :

« Après mon troisième album de rap traditionnel, j’étais dans un no way artistique. Je ne me reconnaissais plus dans ce qui se faisait sur la planète rap. J’avais envie de collaborations, d’autres styles, d’autres voies de création. C’était ça qui me correspondait vraiment et qui me plaît encore, parce qu’on a toujours quelque chose de formidable à partager avec les autres. Et donc, il faut s’en donner les moyens, prendre des décisions qui collent à ce que tu es et désires au fond de toi. Et c’est alors que l’on se permet de révéler ce qu’on est et ce qu’on aime. Moi, je suis comme un sourcier, j’ai toujours besoin de vibrer »

En 2006, la consécration

S’ouvre alors, en 2006, le Lipopette Bar. Cet album paraît sur le prestigieux label de jazz Blue Note, en collaboration avec le groupe The Jazzbastards. L’histoire en clair-obscur d’un troquet avec ses habitués, diva, apprentie chanteuse, gangster, videur et clients peu recommandables. L’accueil est excellent et révèle combien Oxmo Puccino est un virevoltant touche-à-tout de talent qui flirte avec le jazz, les cordes et les cuivres pour laisser s’exprimer une part de lui jusque là trop méconnue. Son histoire artistique est avant tout humaine, cimentée par les rencontres :

« Tous ces coéquipiers contribuent à mener le bateau à bon port. Où que j’aille, je reste moi-même car je suis persuadé que les artistes sont tous des médiums et permettent de transmettre des choses. En quelques mois, quelques années, quelques siècles. Mais au final, tu fais passer un message. Et donc si je vis et travaille à l’instinct, avec des gens d’horizons divers, c’est parce que je ne me soucie pas un seul instant du masque que portent ceux qui m’invitent. »

C’est ainsi qu’Oxmo le généreux écrit pour Florent Pagny et Alizée, chante avec Benjamin Biolay et Adamo, invite Olivia Ruiz et Ben l’Oncle Soul sur un disque, travaille avec DJ Cream et part même avec lui pour une résidence à Bogota avec le groupe colombien Choc Quib Town pour accoucher d’un 4 titres vigoureux sobrement baptisé Paris-Bogota. A l’automne 2012, il est nommé ambassadeur de l’UNICEF France. Et son talent artistique n’est plus à démontrer, unanimement reconnu et apprécié, comme en attestent les deux Victoires de la Musique (pour l’album de musique urbaine) récompensant ses deux derniers disques, L’Arme de Paix en 2009 et Roi sans Carrosse en 2012, sur lequel a opéré le trio de choc Vincent Segal – Vincent Taeger – Renaud Letang. En somme, c’est peut-être cela, être artiste, comme posé par Oxmo dans la chanson éponyme : « Artiste, c’est pas difficile / On essaye de faire un pull avec dix ficelles […] / Artiste, c’est être droit dans ses bottes / Etre des trois sur dix mille, et garder ses potes ».

 

Y aller

Oxmo Puccino en concert le jeudi 14 mars à la Laiterie, 13 rue du Hohwald. A 21h30 sur scène (première partie assurée par Phases Cachées). Tarif : de 24 à 27 euros.


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