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Colloque et expo Visual ecologies : études sur les images du monde vivant dans l’ère capitaliste

Mercredi 22, jeudi 23 et vendredi 24 janvier, l’Université de Strasbourg et la Haute école des arts du Rhin accueillent les travaux d’Ornella Baccarani, Sonia Verguet, Julie Patarin-Jossec et Alexandra David. Les artistes exposent après avoir travaillé sur les rapports des humains aux écosystèmes dans le cadre d’une résidence appelée Visual ecologies.

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Colloque et expo Visual ecologies : études sur les images du monde vivant dans l’ère capitaliste
Élise Haselvander, Enquête matériaulogique (marbre rose et bordeaux) exposée du 22 et 24 janvier à la Misha, 2023.

Alors que des incendies ravagent Los Angeles et que de nombreuses images de cette catastrophe inondent les médias et les réseaux sociaux, le programme de recherche Cultures Visuelles de l’Université de Strasbourg étudie depuis 2023 les images de « mégafeux ». 

Dans ce laboratoire, les chercheurs et les chercheuses tentent de comprendre les effets de ces images sur les imaginaires dans un contexte de crise écologique. En lien avec ces grandes thématiques, un colloque est organisé les 22, 23 et 24 janvier : « Écologies visuelles : Expérience et vie des images à l’heure du capitalocène » (ère du capitalisme, NDLR).

Ce colloque accueillera aussi la sortie d’une résidence coordonnée par Sophie Suma et Simon Zara, Visual Ecologies, quatre artistes présenteront leurs travaux : Ornella Baccarani ; Sonia Verguet (designeuse culinaire) ; Julie Patarin-Jossec (sociologue) et Alexandra David.

Explorer les fonds marins

Ainsi mercredi 22 janvier à partir de 18h à la Cryogénie, Julie Patarin-Jossec, sociologue, cinéaste et performeur·se, se sert de ses explorations maritimes pour expérimenter différentes techniques d’imagerie. Développant un lien particulier à la matérialité de la photographie, la technique argentique lui permet de penser, dans sa démarche artistique, l’impact écologique des techniques utilisées pour créer.

Dans des séries de photographies et films, l’artiste fait parler la faune et la flore sous-marines, en tentant ainsi de reconsidérer la marchandisation des espèces et l’exploitation du vivant.

Pendant l’évènement, Julie Patarin-Jossec présentera son film The Measurement réalisé en 2023. Sa diffusion sera accompagnée d’un corpus de documents qui restituera son processus de recherche et l’articulera à son processus créatif.

Composé de photographies en noir et blanc tirées d’une exploration aquatique de l’artiste, The measurement présente un dialogue entre deux huîtres, enfermées dans une ferme aquacole, discutant de la politique spéciste et de la domestication des mollusques. 

Présentées comme les personnages principales de l’intrigue, les huîtres permettent à Julie Patarin-Jossec de repenser les manières de considérer l’univers non-humain. Elle critique un rapport qu’iel définit comme « colonial » à l’environnement (proposant d’articuler les questionnements écologiques à des revendications queers et féministes). Dans son travail, il ne s’agit plus de considérer le vivant comme une simple ressource mais plutôt de l’envisager comme un élément dont l’existence ne consiste pas à servir la vie humaine.

Penser la présence et l’absence de l’eau

Jeudi 23 janvier à partir de 19h30 à La Chaufferie, Ornella Baccarani, Sonia Verguet et Alexandra David s’associent à Béatrice Josse (curatrice, autrice, enseignante) pour une performance dînatoire immersive intitulée Slow-Water.

Ornella Baccarani est plasticienne et travailleuse de l’art. Son travail prend des formes diverses mais s’attache toujours à témoigner d’un ressenti intime et subjectif. Le quotidien la traverse et l’inspire : elle pense ses œuvres à partir du territoire, de ses habitants et de ses habitantes, du collectif et du monde qui l’entoure :

« À l’heure de la sixième extinction de masse, au moment où les idées climatosceptiques fleurissent sur X, avec la réélection de Trump, avec tout ce qu’on connaît de destruction du vivant, notre organisation sociale et économique qui considère le vivant comme une ressource, je véhicule malgré moi dans mes productions quelque chose qui va parler de cet état du monde. »

Ornella Baccarini

Au sein de ses créations, l’intime et le collectif coexistent et s’influencent en un mouvement perpétuel. Souvent, elle imagine des collaborations ou œuvres collectives. Durant leur résidence d’ailleurs, Ornella Baccarani et Sonia Verguet ont réalisé ensemble une œuvre abordant le port de Strasbourg. 

Penser l’eau jusqu’à l’assiette

Sonia Verguet est designeuse culinaire. À travers ses buffets, elle tente de créer des liens, de susciter des échanges entre les participants et les participantes, notamment à travers les « occasions de bavardage » engendrées par les projets qu’elle conçoit.

Dans le cadre de la résidence Visual ecologies et pour parler de la thématique de l’eau, Sonia Verguet travaille à partir d’aliments qui nécessitent peu d’eau pour pousser (oignons, algues, vermicelles de Konjac…). Elle invite les participants et les participantes à s’interroger sur la quantité d’eau dans leur alimentation et sur la place de cet élément dans notre quotidien. Dans ce cadre, la nourriture n’est plus une simple ressource mais véhicule une possibilité de sensibiliser à l’écologie. 

« Les designers enlèvent, c’est le but de notre travail d’épurer, dit-elle. Je trouve que les designers, de fait, ont un regard presque écologique sur les choses parce qu’ils vont à l’essentiel. » Dans ses projets, comme dans ceux d’Ornella Baccarani, chaque geste, chaque élément est pensé – au mieux – en fonction de son coût, dans une logique éthique et écologique.

Au sein de l’espace de la Chaufferie, ce moment de restitution propose une rencontre entre les des deux artistes. Les travaux d’Ornella Baccarani (textuels, sonores…), ainsi que l’atmosphère visuelle et sonore immersive ici pensées (luminosité tamisée, jeux de reflets, bruits d’eau…) amplifient l’expérience gustative imaginée par Sonia Verguet. Quant à Alexandra David, elle invitera le public à essayer de devenir une grenouille.

Une restitution en ligne

Fruit d’un partenariat entre le programme de recherche Cultures visuelles et la Cryogénie, ce projet a été pensé dans une volonté de mettre en lumière l’articulation entre recherches scientifiques et recherches artistiques. En plus de ces propositions pensées dans des lieux d’exposition strasbourgeois, il est possible d’accéder à une restitution en ligne de ces résidences (composée d’entretiens, de schémas, de textes… qui permettent de mieux comprendre le travail de recherche et de création des artistes).


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