Un nouvel engin fait son apparition en salle d’armes. À partir du 26 avril, la police municipale de Strasbourg s’est armée de caméras-piétons. L’objectif de ce dispositif expérimental est « d’apaiser les relations entre policiers et habitants » dans tous types d’intervention : dans l’espace public comme privé. Joseph Muller, chef de service de la police municipale, espère à terme munir « chaque agent » d’une caméra comme le permet la réglementation. Pour le moment, 26 agents formés, sur un effectif total de 130 à 140 policiers disposent chacun d’une caméra, avec un angle de vue large à 120 degrés.
Fixées à l’avant de l’uniforme, ces caméras doivent être visibles. L’appareil sera allumé, mais ce sont les policiers qui doivent déclencher l’enregistrement sonore et visuel en appuyant sur un bouton. Lors des interventions, le contrevenant doit être prévenu que la scène est filmée. D’une autonomie de 12 heures, le dispositif émet un bip et sa lumière rouge s’intensifie. La minute précédant la pression est aussi enregistrée, afin de mieux comprendre les raisons de la mise en marche.
Les images sont ensuite conservées pendant 6 mois sur un serveur externe situé en Irlande, avant d’être automatiquement effacées. Seuls le chef de service, son adjoint ou leurs équivalents hiérarchiques peuvent y avoir accès si des procédures judiciaires, administratives ou disciplinaires le requièrent. Sur ces fichiers, l’agent porteur de la caméra est lui aussi identifiable.
Entre 2016 et 2018, 242 villes françaises ont expérimenté les caméras-piétons. Joseph Muller et Nadia Zourgui, adjointe à la maire en charge de la sécurité, estiment que le rapport ministériel suite à ces essais est « positif ». Sous le mandat précédent, des discussions entre la mairie de Strasbourg et sa police avaient été entamées. Nadia Zourgui évoque une demande « unanime » de la part des policiers au moment de la publication du décret de 2019 qui autorise l’autorisation des caméras-piétonnes pour la police municipale.
« Sécuriser » et « pacifier les relations »
Face à la « montée de la violence » dont parle Joseph Muller (outrages, rebellions, injures) d’une part, et de nombreux courriers reçus par la mairie faisant état de « maltraitances » lors d’interventions d’autre part, Nadia Zourgui voit dans l’usage de ces caméras un système « gagnant-gagnant ». Pour les agents et pour les habitants. Elle liste plusieurs objectifs : « prévenir des incidents », « obtenir des preuves », « renouer le dialogue », « apaiser et sécuriser les relations ».
L’élue strasbourgeoise écologiste déplore des enquêtes n’ayant pas abouti, faute de preuves. Ces caméras permettront, selon elle, de « mieux traiter les affaires » et d’éviter le « parole contre parole » qu’instaurent des « morceaux de séquences diffusés sur le net ». Comment réagiront les policiers face à des citoyens qui filment leur travail, notamment s’ils ne déclenchent pas leur appareil ? Nadia Zourgui répond, évasive : cela « n’aurait aucun intérêt ». Et s’ils oublient de le porter ? « Non. Il y a un protocole et les policiers sont très disciplinés ».
Les premières séquences filmées seront aussi visionnées pour « former les nouveaux policiers », après la phase de test jusqu’au 21 juin. La municipalité étant quasi-assurée de généraliser le dispositif, le mois de mai sera surtout l’occasion de s’assurer du bon déroulement technique des opérations. L’achat total du matériel pour un équipement de tous les agents se chiffre à plus de 100 000 euros à destination de la société américaine Axon, spécialisée dans l’équipement vidéo des forces de l’ordre.
Concernant la police nationale, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a exprimé en 2020 vouloir « généraliser » la pratique en juillet 2021 dans un plan plus vaste de rééquipement des services de police.
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