Bérangère Ottermatte a 33 ans et ne se sent pas concernée par le malaise des enseignants pour cette rentrée 2012. Contractuelle pendant trois ans, Bérangère a connu la précarité de la fonction publique mais la situation des enseignants est toujours préférable, selon elle, à celle qu’elle a connu quand elle travaillait dans le secteur privé.
– Comment êtes-vous devenue enseignante ?
En fait, je n’étais pas destinée au professorat. J’ai tout d’abord passé un DUT Info-Com, puis un BTS de management dans l’événementiel pour devenir chef de produit dans une marque de sport. Le déclic est intervenu lorsque je préparais une jeune collègue à des oraux très importants. Elle a obtenu 17/20, et m’a dit que je devrais être prof. Lors de la crise en 2008, l’entreprise a mis la clé sous la porte. Le mardi, j’étais au chômage, le mercredi j’ai posé mon CV au rectorat, le jeudi, on m’a appelé pour me dire que j’étais engagée et le lundi, j’étais devant des élèves à Mulhouse !
– Comment êtes-vous arrivée au lycée des métiers René-Cassin ? Comment s’est passée cette rentrée ?
C’était en juin 2011. Je sortais de trois années comme enseignante contractuelle en management dans l’enseignement professionnel. Comme chaque année, nous devons formuler des vœux auprès du rectorat. En premier, c’était l’académie de Strasbourg, puis celle de Lorraine. Par chance, j’ai été acceptée à Strasbourg et engagée à René-Cassin. Certes, les méthodes de travail de l’enseignement technologique m’ont paru difficiles, car bien différentes de ce que je faisais avant, mais j’ai mis mon stress de côté et tout s’est très bien passé.
– Les enseignants-stagiaires bénéficient de trois heures de décharge par semaine pour suivre leur formation en parallèle des cours. Que pensez-vous de cette mesure ?
C’est indispensable pour les profs qui débutent leur carrière. Je n’en ai pas bénéficié de cette manière lorsque j’étais contractuelle. J’ai dû me former sur le tas. Par exemple, on nous apprend la façon de répartir les chapitres sur l’année ou à gérer des classes sensibles. Cependant, je trouve que cette formation devrait être organisée autrement. Il faudrait pour les jeunes profs une sorte de pré-pré-rentrée mi-août, ou même juste après avoir été acceptés aux oraux, pour ne pas arriver en classe sans être préparé de la sorte.
– Êtes-vous assistée d’un tuteur en ce début d’année scolaire ? Si oui, cela vous permet-il d’aborder cette rentrée plus sereinement ?
Étant donné que c’est ma quatrième rentrée, j’ai un peu d’expérience derrière moi. Mais être stagiaire n’a rien à voir avec le poste de contractuelle, je suis responsable d’une classe, j’ai un poste fixe… La présence de ma tutrice pendant mon stage est un appui indispensable. Elle m’aide à préparer mon planning, me conseille sur la façon d’enseigner les compétences à mes élèves, puis établit un bilan de compétences qui remonte jusqu’à l’inspection académique. Je ne suis pas notée, mais je sais ce que je dois éventuellement améliorer pour progresser.
– Quelle a été votre préparation pour cette rentrée ?
J’ai appris le 20 juillet que je rentrais à Cassin, le jour où le lycée ferme pour les vacances ! Du coup, j’ai dû attendre le 27 août pour connaître mes classes et mon programme. Alors, j’ai téléchargé sur le site de l’Education nationale un référentiel qui répertorie l’ensemble des compétences à enseigner dans ma matière et la façon de les aborder en classe. Puis, j’ai établi un planning, que j’ai soumis à ma tutrice. C’était assez intense, mais je suis habituée à être prévenue à la dernière minute, c’est le lot de tous les enseignants contractuels. Avant chaque séance de deux heures, je dois remplir une fiche pédagogique, où je donne les mots-clés du cours, ses objectifs et les compétences attendues chez les élèves. Remplir ces fiches me prend une à deux heures.
– Vous n’êtes pas forcément assurée d’être titularisée l’an prochain. Craignez-vous cette perspective ?
C’est vrai pour les profs stagiaires « habituels », mais mon cas est un peu particulier. Comme j’ai eu un bébé il y a quelques mois, j’ai dû interrompre mon stage pour le reprendre en cette rentrée jusqu’au mois de décembre. De plus, je viens d’acheter une maison ici et mon époux travaille à la CUS. Cet ancrage supplémentaire fait que ma titularisation est assurée et devrait intervenir en cours d’année scolaire. En revanche, je ne suis pas à l’abri d’une mutation dans le cadre du « mouvement national » dès la rentrée prochaine.
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