Le 23 avril, les électeurs de deux bureaux de vote tous situés dans la salle de la Bourse à Strasbourg avaient le droit de voter une deuxième fois. Dans le cadre d’une expérience menée par sept chercheurs universitaires, il étaient attendus à la sortie avec deux questionnaires.
Herrade Igersheim, chargée de recherche en économie à l’Unistra et au CNRS, a mené des travaux dont but était de tester d’autres modes de scrutin, où il était possible de donner un avis sur les 11 candidats. Sur les 1 874 électeurs des bureaux de la Bourse, 1 071 ont accepté de répondre (57% de « participation ») à ce test.
Approuver…
Dans un premier temps, il fallait dire à quel(s) candidat(s) on donne son approbation ou non, il était possible d’en choisir plusieurs… À ce petit jeu là, Jean-Luc Mélenchon reste en tête dans ces bureaux où il l’avait emporté (voir graphique ci-dessous), mais Benoît Hamon passe de la cinquième à la deuxième place. Emmanuel Macron, Philippe Poutou (!) et François Fillon suivent la marche. En moyenne, les participants ont donné un « avis favorable » à 2,41 candidats par « vote » alternatif.
… ou noter
Un troisième mode de scrutin demandait de noter les candidats : de 0 à 3 ; de 0 à 2 ; de -1 à + 1 ou de -1 à + 2. Différentes échelles de notations ont été testées aléatoirement (environ 230 réponse par échelle). Le classement final s’en est à chaque fois retrouvé chamboulé.
Là encore, Benoît Hamon remonte à chaque fois. Deux fois deuxième et une fois troisième, il arrive même en tête selon l’une des 4 échelle de notation. Sinon, c’est Jean-Luc Mélenchon qui l’emporte.
A contrario, Marine Le Pen et François Fillon régressent. La candidate du Front national se retrouve même deux fois bonne dernière lorsque la notation inclut des scores négatifs (-1 à 2 ou -1 à 1). Emmanuel Macron maintient son rang ou passe troisième.
La principale conclusion de cette étude permet de chiffrer un sentiment qui a émergé lors de la campagne : les électeurs de Jean-Luc Mélenchon appréciaient aussi Benoît Hamon, dont le programme était proche. Mais dans le scrutin uninominal classique, ils n’avaient qu’un bulletin de vote pour exprimer leur préférence. C’est aussi en partant de ce constat que plusieurs mouvements se forment à gauche.
Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon en tête au niveau national
Extrapolés à l’échelle nationale, ces résultats auraient propulsé comme duo de tête au soir du premier tour de l’élection présidentielle Emmanuel Macron (44,20% d’approbation) et Jean-Luc Mélenchon (43,25%). Le leader d’En Marche l’aurait emporté avec l’approbation et le vote entre 0 et 3. Celui de la France insoumise devance le nouveau président avec les trois autres notations
Parmi les 6 candidats arrivés plus loin à la Bourse comme au niveau national, on constate assez peu de changement, si ce n’est une remontée Philippe Poutou et à degré moindre de Nathalie Arthaud. C’est assez logique dans ce bureau de vote davantage marqué à gauche qu’ailleurs à Strasbourg et bien sûr en France.
Les électeurs de droite répondent moins
Les électeurs de ces deux candidats ont moins souvent répondu (ou davantage menti !) aux enquêteurs que ceux des autres candidats, mais ces résultats ont été dans la mesure du possible « redressés » compte tenu du score de chacun. Cette technique est néanmoins « imparfaite », nuance l’auteur.
Dans 4 autres villes françaises
Les mêmes travaux ont été mené dans 4 autres localités, à Hérouville Saint-Clair (Calvados), et trois communes d’Isère, Grenoble, Crolles et Allevard-les-Bains, avec parfois d’autres notations. Tous les scientifiques concluent que ces modes de scrutin sont accueillis favorablement et poussent vers le vote des personnes qui ont voté blanc. Enfin, ils évitent les affres du « vote utile ».
Les mêmes conclusions ressortent, à savoir des augmentations des scores de Jean-Luc Mélenchon et de Benoît Hamon, ainsi qu’une baisse de ceux de François Fillon et de Marine le Pen.
Dans ces 5 bureaux alternatifs, le score de Marine Le Pen était plus faible que sa moyenne nationale. Les auteurs de l’étude ont attendu fin juin pour divulguer ces résultats, de peur d’influencer le second tour et les élections législatives.
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