Quand elle se déplace, Bela Loto emmène toujours une mallette de la Maison de l’informatique responsable (MIR). Dans ces mallettes, un appareil de notre quotidien numérique, décortiqué. La directrice de la MIR explique :
« Devant le public, on sort un composant et on indique quel métal est utilisé pour le fabriquer, en quelle quantité et où se trouve ce métal dans le monde, dans quelles conditions il est extrait, etc. Et tout à coup, le coût écologique d’un ordinateur portable devient très concret pour les gens. C’est notre objectif : rendre visible l’immatériel car la consommation d’énergie par tous ces appareils n’est pas visible. »
Bela Loto est invitée par le Shadok et Rue89 Strasbourg pour une table-ronde sur la responsabilité environnementale du numérique, jeudi 16 mai à 19h.
Elle sera accompagnée par Romaric David, responsable du data center de l’Université de Strasbourg et membre d’Écoinfo, un collectif pour améliorer l’empreinte écologique de l’informatique dans la recherche française.
Écoinfo est né il y a une dizaine d’années tandis que la MIR a deux ans. Ces questions d’impact écologique du numérique commencent tout juste à atteindre le grand public, alors que plusieurs ordinateurs et smartphones ont déjà colonisé chaque foyer français.
« Il y a une souffrance dans les foyers français »
Pour Bela Loto, on assiste à un début de prise de conscience :
« Il y a une souffrance désormais dans les foyers français, on stocke des vieux ordinateurs, des téléphones pas si anciens mais qui ne fonctionnent plus bien… On ne sait pas quoi en faire, on est saturé… Les gens sentent bien que ce modèle n’est pas soutenable et nous sommes désormais assaillis de questions et de sollicitations pour organiser des ateliers et des rencontres sur ces questions. »
Il existe des filières de collecte et de recyclage, mais elles ne sont guère utilisées car souvent méconnues. Plus des deux-tiers de nos déchets informatiques rejoignent les poubelles du monde en Asie du sud-est ou au Ghana… La MIR a organisé en avril à Paris un festival de films documentant cette faillite planétaire.
Car la situation ne cesse d’empirer. Selon une étude de « The Shift Project », la part du numérique dans les émissions de gaz à effet de serre a augmenté de moitié depuis 2013, passant de 2,5 % à 3,7 % du total des émissions mondiales. L’intensité énergétique du numérique augmente de 4 % par an, à contre-courant de l’évolution de l’intensité énergétique du PIB mondial, qui baisse actuellement de 1,8 % par an. La consommation d’énergie directe occasionnée par un euro de numérique a augmenté de 37% par rapport à 2010.
Pour Bela Loto, le grand public doit absolument reprendre le contrôle de son environnement numérique :
« Il n’y a pas de solution à la consommation d’énergie et des ressources du numérique mais on peut, simplement, ralentir la progression. »
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