Dans une interview aux DNA, François Bayrou avait indiqué que l’Europe serait le thème central de son discours de Strasbourg. Tant pis pour les Strasbourgeois que l’Europe barbe, tous les candidats semblent s’être donnés le mot : à Strasbourg, on parle d’Europe.
Or pour François Bayrou, l’Europe est absente de cette campagne présidentielle, la faute à sa mauvaise image, puisqu’on ne parle d’elle que lorsqu’il est question de crises ou de mesures de restriction. Pourtant, mardi soir au PMC, François Bayrou a défendu devant 1500 personnes massées dans et hors de la salle que la crise en Grèce est plutôt due à un défaut d’Europe:
« La crise grecque est survenue parce que des gouvernements se sont mentis les uns aux autres pendant des décennies. Le drame grec a été provoqué par des mensonges d’Etat ! Ce dont l’Europe a besoin, c’est d’une transparence absolue sur les comptes publics des états membres. »
Pour faire régner cette transparence absolue, François Bayrou recommande une association des parlements nationaux, mûs en censeurs zélés de la Commission européenne. Mais il a pointé lui même que deux gouvernements ont refusé en 2005 qu’existe cette transparence et ce contrôle, ceux de France et d’Allemagne. On peut douter dès lors que les députés, viviers de futurs ministres, ne soient les meilleurs censeurs.
François Bayrou a évidemment surfé sur son analyse précoce de la crise de la dette sur le mode « je l’avais bien dit ». Pour lui, l’impératif doit être de sortir de l’endettement public et de mais il s’est déclaré favorable à l’instauration de la « règle d’or« , qui sanctuarise pourtant la poursuite de l’endettement en acceptant un déficit des comptes publics de 3%.
Un président de l’Europe élu
Mais la grande annonce de François Bayrou a été de proposer l’élection d’une espèce de « président de l’Europe » au suffrage universel. Selon lui, l’Europe pêche par manque de légitimité démocratique:
« Un labyrinthe de responsabilités, commissions, hauts-représentants, coupe le gouvernement de l’Europe des Européens. Pour que renaisse une politique assumée de grands choix, il faut un président de l’Union européenne et du conseil européen et qui serait élu au suffrage universel, afin qu’il dispose de la légitimité nécessaire. »
Mais François Bayrou ne s’est pas étendu sur les conséquences qui résulteraient d’une telle élection. Si un homme politique en Europe disposait d’une telle légitimité, il y a fort à parier qu’elle rentrerait en conflit rapidement avec les présidents et chefs de gouvernements nationaux. Et que ceux ci ne tarderaient pas à tenter de rallier derrière eux le sentiment national de leurs concitoyens… L’Europe est-elle seulement mûre pour les projets de François Bayrou ?
Pour Yann Wehrling, « passer aux Etats-Unis d’Europe »
Yann Wehrling, président du Modem-Alsace, a réagi à cette annonce:
« Elire un président au suffrage universel changerait la face de l’Europe. On passerait aux Etats-Unis d’Europe et alors là, la question ne se poserait plus de savoir si c’est le bon échelon ou pas pour telle ou telle politique… François Bayrou porte ce projet d’une Europe supra-nationale, et c’est le seul candidat à l’élection présidentielle à le faire. »
Paroles de militants
Martine, retraitée, de Strasbourg, au MoDem depuis sa création:
« C’est normal que François Bayrou soit resté vague sur l’Europe… Il faut convaincre d’autres pays quand même. Il veut sortir d’un couple franco-allemand qui impose sa vision aux autres pays et j’ai trouvé ça bien. Les bonnes idées peuvent venir d’ailleurs. J’ai tiqué lorsqu’il a mentionné la Grande-Bretagne comme un partenaire possible pour conduire l’Europe, mais je pense qu’il visait surtout la politique internationale pour laquelle l’Europe disposerait de deux sièges sur cinq au conseil de sécurité de l’ONU si on s’entendait avec l’Angleterre. »
Benjamin, jeune actif de Strasbourg, centriste :
« Au moins avec Bayrou, c’est un candidat qui donne à réfléchir. Il fait des phrases longues, il faut s’accrocher pour suivre sa pensée et c’est très bien. Pour moi qui cherche à justifier mon vote, je repars avec de la matière pour ma réflexion. Et notamment sur l’Europe, que je trouve opaque. Je vais me renseigner sur ces questions. Les discours de François Bayrou changent des petites phrases type « imposons les riches à 75% » qui ne laissent pas de place à la nuance. »
Corinne, jeune active, de centre-droit :
« Bon, c’est décidé au premier tour, je vote Bayrou. Au second par contre, je ne sais toujours pas. Evidemment, ça dépendra des présents mais tout est ouvert. Qu’il y ait un président de l’Europe, voilà une bonne idée ! Quand on avait Jacques Delors, on avait un capitaine à la barre et ça se sentait. Actuellement, l’Europe se mêle de tout et les débats se déroulent entre experts, ça ne va pas. »
La vidéo du meeting
Vidéo fournie par le service de presse de François Bayrou.
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