Première fausse piste livrée à notre esprit : le titre, « Bal en Chine ». Car non, ne vous y trompez pas, la pièce ne se déroule pas en Chine mais dans un immeuble multi-ethnique où les fenêtres des logements donnent sur une cour commune. Cinq personnages, chacun d’une nationalité différente, y vivent et s’épient mutuellement. Faits, gestes et traditions, tout est sujet à méfiance, disputes ou critiques. Leur regard n’accepte pas ces multiples différences jusqu’au jour où une famille chinoise débarque. L’ordre établi jusqu’alors est bouleversé : les personnages vont se rassembler autour de ce nouvel « ennemi » commun qui va leur faire oublier leurs nationalités respectives.
Cette arrivée génère une nouvelle solidarité dans l’immeuble : oubliées les anciennes querelles, toutes les récriminations sont dirigées vers les nouveaux arrivants suspectés d’être louches et criminels. Puis, un jour, l’Italien se rend compte que les Chinois n’ont jamais existé. Survient alors la déception, le désarroi, un vide impossible à combler. Pour y faire face, l’un des locataires se transforme en petite chinoise qui fascine à nouveau les autres qui adoptent alors les clichés du pays. Alors, à nouveau, tout s’illumine. Des couleurs, des textures, des tissus, tout s’enchaîne dans un rythme tourbillonnant : leur folie intérieure est révélée au monde à travers une mise en scène délirante.
Rire avec la peur de l’autre
Avec un humour décalé, Caterina Sagna met en scène des peurs contemporaines : la peur de l’autre et de ses différences. Entre deux dialogues, la danse fait place à des moments émotionnels. Les corps des comédiens se plient, se tordent, se tendent avant que la bouche récite le texte. Ici, pas besoin de mot, les mouvements révèlent les réactions et émotions des personnages. Au fil de la pièce, l’histoire se construit et se déconstruit aboutissant sur un chapitre complètement différent et surprenant. En utilisant son imagination, le spectateur peut alors faire sa propre interprétation de la pièce pour comprendre la subtilité du travail de la chorégraphe.
Pas question de racisme cependant car les chinois ne sont qu’un prétexte pour évoquer l’inquiétude que Caterina ressent dans le discours des personnes qu’elles croisent, la peur de ces nouveaux « envahisseurs » : la peur de l’étranger. Originalité, dépaysement et rires sont au programme. « Bal en Chine », une auberge espagnole à la chinoise.
Y aller
Bal en Chine, les 15, 16 et 17 janvier à 20h30 à Pôle Sud, 1 rue de Bourgogne à Strasbourg.
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