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Après l’attentat, les blessés oscillent entre rémission physique et traumatisme psychologique

La psychologue Faouzia Sahraoui et l’avocat Arnaud Friederich ont suivi de nombreuses victimes de l’attentat au Marché de Noël de Strasbourg. Ils décrivent tous les deux la longue convalescence des personnes blessées physiquement et la résurgence du traumatisme psychologique un an après la tragédie du 11 décembre.

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Hommages à l'entrée de la rue des Juifs (photo Abdesslam Mirdass)

1660 personnes ont été prises en charge à l’Espace d’information et d’accueil (EIA) des victimes depuis l’attentat du 11 décembre à Strasbourg. Aujourd’hui, 317 d’entre elles continuent de solliciter l’aide des psychologues et juristes de la structure, affirme Faouzia Sahraoui, psychologue et responsable de l’EIA situé rue du Jeu-des-Enfants à Strasbourg.

Comme Arnaud Friedrich, avocat de plusieurs victimes de Chérif Chekatt, elle estime que l’état des 11 blessés physiques n’est « pas encore stabilisé. La convalescence psychologique est en cours. »

« Il se remet à marcher mais… »

L’avocat Arnaud Friedrich défend, entre autres, une victime de plusieurs coups de couteau. L’homme avait tenté de barrer la route du tueur. « Depuis peu, il se remet à marcher, il se renforce physiquement, observe Me Friedrich, mais son état psychologique suit l’évolution inverse. » La psychologue y voit une tendance classique chez ceux qui « étaient actifs, qui ont essayé de faire quelque chose. Souvent, ces profils dynamiques parviennent à différer l’atteinte psychologique mais le traumatisme finit par resurgir. »

Faouzia Sahraoui a observé trois types de symptômes en accompagnant psychologiquement les victimes de l’attentat. « Il y a tout d’abord des personnes qui vivent le traumatisme partout, chez elles, au travail, au point que leur personnalité en est perturbée », décrit-elle. Puis il y a des victimes atteintes de trouble du sommeil, et d’états dépressifs. La situation de certains peut encore se compliquer avec des comportements addictifs, comme le jeu d’argent ou la consommation de stupéfiants.

Faouzia Sahraoui, psychologue et responsable de l’Espace d’information et d’accueil des victimes de l’attentat du 11 décembre 2018. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

« Les Strasbourgeois ont fait preuve d’une grande dignité »

« Je trouve que les Strasbourgeois ont fait preuve d’une grande dignité et d’une grande pudeur », affirme Faouzia Sahraoui, avant de donner l’exemple de cette dame âgée « qui venait seulement pour faire le café ». Peu de victimes psychologiques ont fait une demande auprès du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme : « Ils disaient vouloir laisser l’argent aux victimes et à leurs familles », se souvient la psychologue.

Arnaud Friedrich, avocat de plusieurs victimes physiques de l’attentat et de membres de la famille d’une victime. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

Ni l’avocat, ni la psychologue n’ont observé de « sentiment de haine » parmi les victimes. « Mais ils veulent comprendre ce qui s’est passé, comment il est entré dans le centre-ville, qui a fourni l’arme », affirme Me Friedrich. Pour l’entourage des victimes, des réunions toutes les 6 semaines ont permis d’organiser l‘hommage du mercredi 11 décembre 2019.

Le 31 décembre 2019, l’Espace accueil et information fermera ses portes. « On peut accueillir toute personne atteinte de près ou de loin par l’attentat en rebasculant sur nos moyens de droit commun », explique la responsable de l’EIA.


#Attentat de Strasbourg

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