Le professeur de philosophie Grégoire Perra a été relaxé de la plainte en diffamation et injures qui le visait. L’ancien enseignant en école Steiner était poursuivi par la Section Médecine Anthroposophique du Conseil National Professionnel des Médecins à Expertise Particulière (CNP MEP – SMA). Cette association de praticiens lui reprochait un article critique sur son blog, intitulé « Mon expérience de la médecine anthroposophique », publié en octobre 2018. (lire notre article).
« Son cheminement personnel explique son positionnement »
Après examen des douze passages incriminés, huit pour injures et quatre pour diffamation, les juges du tribunal judiciaire de Strasbourg ont considéré que les écrits de Grégoire Perra « même s’ils peuvent paraître brutaux, s’inscrivent dans un débat d’idées » et ne sont pas « discourtois » ou « grossiers ». Le professeur de philosophie « ne se contente pas d’asséner un propos, mais construit un développement qui est tout à fait de nature à faire l’objet d’une discussion » et n’aurait ainsi « pas eu pour objectif de blesser les tenants de la médecine anthroposophique ».
Sur les aspects diffamatoires, « son cheminement personnel explique son positionnement », poursuivent les juges. En effet, Grégoire Perra a été élève, puis enseignant dans deux écoles Steiner-Waldorf avant de quitter cette doctrine vers 2010. Ainsi, le tribunal a rejeté le grief de « mauvaise foi » et relève que son article « ne permet pas d’identifier un médecin en particulier », contrairement à ce que soutenait la partie adverse.
L’association anthroposophe lourdement condamnée
Au-delà de la relaxe, les juges ont lourdement condamné la section anthroposophique. La CNP MEP – SMA doit verser 10 000 euros de dommages et intérêts, car les juges estiment que les poursuites à répétition et surtout les importants montants réclamés relèvent « d’une manière de faire taire Grégoire Perra et s’économiser un débat public ». « Les poursuites ne sont pas en soit abusives », mais les importantes sommes demandées (jusqu’à 45 000€ dans une autre procédure, 37 000 pour celle-ci) envers un seul individu relèvent d’une « intention critiquable moralement », selon les trois juges.
Le CNP MEP – SMA doit aussi s’acquitter de 15 000 euros supplémentaires pour les frais engagés par Grégoire Perra pour sa défense, auxquels s’ajoutent d’autres frais de procédure courants.
« On espère que Grégoire Perra pourra s’exprimer sans craindre d’être poursuivi »
Avocat de Grégoire Perra depuis ses premiers procès (en 2013), Maître Marc François est très satisfait par cette condamnation en plus de la relaxe :
« Au-delà de l’absence d’infraction, c’est la première fois – après cinq procès remportés par Grégoire Perra (certains sont encore en appel, ndlr) – qu’il y a une condamnation pour dommages et intérêts, ce qui est assez rare pour une procédure en diffamation. On espère désormais que ce message très clair sera entendu et que Grégoire Perra pourra exprimer ses opinions sans craindre systématiquement d’être poursuivi. »
Grégoire Perra est un peu moins optimiste sur la portée d’un tel jugement : « On verra s’il y a un appel. Je ne suis pas sûr que cela freinera l’association d’anthroposophes car ils n’ont pas le sens des réalités. Ils veulent aller jusqu’au bout, alors qu’ils ont tout à y perdre ». Même si le professeur de philosophie pense continuer à « vivre avec la crainte de nouveaux procès », il compte poursuivre son blog pour « permettre à des personnes de s’en sortir ». « Ce qu’ils font contre moi, c’est aussi les méthodes qu’ils ont en interne », ajoute-t-il faisant part de « menaces » et de « rumeurs » à son égard dans la sphère privée et professionnelle.
Contacté, Claude Boudot, le nouveau président de la section Médecine Anthroposophique du Conseil National Professionnel des Médecins à Expertise Particulière a répondu : « Nous réfléchissons à la procédure à suivre » et que la décision d’un appel ou non sera prise et communiquée dans « les jours suivants ».
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