Les faits remontent à février 2013. Le Parlement européen engage des travaux dans le plus vieux de ses deux bâtiments de Strasbourg, le Winston Churchill, pour transformer l’ancien « bar des chauffeurs » en bureaux. Sur place, les ouvriers décident de démonter le coffrage d’un poteau porteur, ce qui n’était initialement pas prévu.
Seulement, en effectuant cette manœuvre, les ouvriers ont libéré des poussières d’amiante potentiellement cancérigènes contenues dans l’isolation du poteau. Le chantier est stoppé jusqu’aux résultats des analyses, qui confirment la présence du dangereux isolant deux semaines après l’accident. La zone est décontaminée avant que les travaux ne puissent reprendre.
Plus de 300 parties civiles devraient être entendues durant trois jours
Plus de 1 600 victimes potentielles ont été invitées à s’exprimer à la barre en octobre 2015. Environ 300 personnes s’étaient constituées parties civiles dont une centaine sans avocat. Faute de place et de temps pour toutes les écouter, le tribunal correctionnel de Strasbourg avait décidé de renvoyer une première fois le procès à janvier.
Le 7 janvier 2016, le procès est à nouveau reporté à la demande des avocats de la défense qui avaient reçu les conclusions des avocats de la partie civile trop tard et n’avaient pas eu le temps de les étudier.
Cette fois-ci, le procès devrait se dérouler sur trois jours à partir de mercredi, pendant lesquels la vingtaine d’avocats représentant plus de 300 victimes potentielles pourront exposer leurs arguments.
Face à ce groupe important, dont le nombre exact n’est pas communiqué, trois personnes seront assises sur le banc des prévenus : l’architecte en charge des travaux, Marie-Delphine Dochain, la société qui a effectué ces travaux, Stenger Plâtres & Staff et le coordinateur sécurité et prévention du chantier, Patrick K..
L’avocat de l’architecte, Me Renaud Bettcher, explique que sa cliente ne pouvait faire que le constat de l’accident et arrêter le chantier. En janvier déjà, l’avocat estimait que le Parlement européen devait être sur le banc des prévenus alors que l’institution s’est constituée partie civile.
Les parties civiles demandent à être reconnus en tant que victimes
Pour les parties civiles, l’enjeu est de pouvoir faire reconnaître en tant que maladie professionnelle une pathologie qui serait liée à l’exposition à l’amiante et qui pourrait survenir bien après l’inhalation des poussières, selon Me Carine Cohen Solal, qui représente environ 90 personnes :
« Le point le plus difficile dans ce dossier c’est de pouvoir justifier l’exposition de ces personnes, surtout sur le temps qui s’est écoulé. La majorité des personnes que je représente ont fait un plan pour indiquer leurs allées et venues dans le Parlement. Il y a des agents du Parlement qui ont leurs bureaux à proximité de la zone, des agents du Conseil de l’Europe, puisque certains passent par une passerelle à proximité de la zone pour aller manger à midi ; et il y a aussi des agents de sécurité qui font des rondes dans le bâtiment. Chacun a son explication. »
C’était aussi le point fort des conclusions du cabinet d’avocat Welsch & Kessler, représentant de la société en charge des travaux en janvier. Ils demandaient alors la preuve du passage des parties civiles à proximité de la zone de chantier. Dans ce document, le cabinet mettait aussi en avant le fait que l’amiante ne provoque des maladies que lorsqu’une personne a été exposée plusieurs fois à des poussières d’amiante.
Le procès doit se tenir mercredi, jeudi et vendredi dans la salle des procès d’assises, place d’Islande à Strasbourg. À l’issue de chaque journée, Rue89 Strasbourg vous proposera un compte-rendu d’audience.
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