« Parler de déconfinement aujourd’hui est délétère », estime Jean-Philippe Mazzucotelli. Le chef de service de chirurgie cardiaque aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg (HUS) a bien constaté une baisse de l’activité des urgences strasbourgeoises depuis quelques jours : 158 passages le jeudi 2 avril, contre 108 passages le dimanche 5 avril. Mais pour le chirurgien, cette évolution reste fragile : « Il ne faut surtout pas crier victoire. Le confinement reste fondamental pour éviter une deuxième vague. »
Un nouvel afflux redouté
Mi-mars, Jean-Philippe Mazzucotelli craignait une situation de « médecine de guerre » dans les hôpitaux alsaciens. Trois semaines plus tard, le chirurgien estime que le pire a été évité « grâce au dévouement exceptionnel du personnel soignant, à l’ouverture de nouveaux lits et aux transferts vers l’Allemagne, la Suisse, le Luxembourg et dans d’autres régions françaises (288 personnes à la date du 6 avril). » Face à l’éventualité d’un confinement moins respecté, le chef de service redoute un nouvel afflux de patients en Alsace :
« Est-ce qu’on pourra toujours transférer des dizaines de patients dans les prochains jours ? Si non, la saturation sera dramatique et on devra choisir qui réanimer par manque de places… »
« On était à deux doigts d’une implosion »
Dans le Haut-Rhin, le personnel soignant constate aussi une baisse de l’activité. Le directeur des urgences de Colmar évoque un pic à 65 patients Covid chaque jour : « Depuis le 5 avril, on reçoit entre 30 et 35 patients par jour. » Un « vrai soulagement » pour Yannick Gottwalles, dont l’établissement connaît enfin un semblant de répit : « Le personnel est moins sous pression, on dispose de tout l’équipement au niveau des protections, les procédures sont rodées, on ne manque pas de places… »
Mais le chef des urgences colmariennes craint aussi un relâchement dans le confinement. « Un nouvel afflux de patients serait catastrophique », prévoit Yannick Gottwalles. Le directeur rappelle qu’un service de dix lits de réanimation fermera d’ici peu : « Le personnel de la réserve sanitaire doit être réaffectée. » Selon le directeur, « il faut au moins prolonger le confinement de deux à quatre semaines. C’est la seule arme actuellement disponible pour que le virus ne circule pas. »
Le directeur redoute aussi l’impact psychologique qu’aurait une deuxième vague de Covid-19 sur son personnel déjà éprouvé : « Au début de la crise, on était à deux doigts d’une implosion totale des urgences… », rappelle Yannick Gottwalles.
« On reste sur nos gardes »
Dans le Haut-Rhin, 1 105 personnes suspectées Covid-19 étaient hospitalisées le jeudi 2 avril. Quatre jours plus tard, le département comptait 1 040 hospitalisations liées au coronavirus. Victor, infirmier-urgentiste au centre Emile Muller à Mulhouse, confirme cette tendance à la baisse : « Si on mélange Covid et non-Covid, on est passé de 180 passages quotidiens aux urgences à 80. C’est reposant… » Mais l’urgentiste refuse de s’exprimer sur le pic : « Nos médecins nous disent d’attendre jusqu’au 15 avril pour se prononcer. En attendant, on reste sur nos gardes. »
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