C’est un petit périmètre situé à l’extrême nord-ouest du quartier de la Meinau, bordé à l’ouest par l’avenue de Colmar, dans la continuité de la route de l’Hôpital précédemment décrite, au nord par la voie ferrée Strasbourg-Kehl, à l’Est par le Rhin Tortu (ou Krimmeri), les rues des Vanneaux et Ciriers, et au sud par la rue du Général-Offenstein – du nom d’un baron d’Empire, général de la Grande armée de Napoléon 1er.
Là, se côtoient le stade de football et les installations nécessaires au fonctionnement du club, (ré)aménagés entre 1906 et 1984, l’École supérieure du professorat et de l’éducation (ex-IUFM), construite en 1871-77 et 2006, un parc et des jardins familiaux, ainsi qu’un morceau du « quartier des villas » édifié dans l’Entre-deux-guerres et jusque dans les années 1970.
Un bout de ville plus récent que d’autres secteurs de la Meinau, telle, à l’ouest, la plaine des Bouchers (Metzgerau), occupée depuis 1321, d’abord pour faire pâturer le bétail avant l’abattoir, puis par des usines. Ou à l’Est, le domaine Schulmeister, édifié en 1807 autour d’un lac artificiel et d’un somptueux château (aujourd’hui détruit), et baptisé Mein Aue (ou « Ma prairie »), appellation dont le quartier a tiré son nom.
A la place du Mac Do, une auberge ouvrant sur un parc
Là, l’auberge « Zur Oberburg » (voir photo plus haut) est installée vers 1850 sur le lieu-dit Extenwurths Feld (jusqu’en 1921). Situé au pied du pont Suchard, à l’emplacement de l’actuel Mac Donald, ce restaurant est à la porte d’un parc, le Haemmerle’s Garten ou Jardin Haemmerlé, où les Strasbourgeois viennent se promener le week-end et canoter sur le Krimmeri.
En 1906, le restaurant décide de louer une prairie du Jardin au Fussball Club Frankonia, fondé en 1900 par des Allemands venus à Strasbourg après l’annexion de 1871. Le club transforme progressivement le pré en terrain de football, en nivelant le sol et en installant des « poteaux de but noir et blanc ». Le FC Frankonia compte sur les promeneurs du dimanche pour s’attirer des spectateurs et installe une main courante autour de l’aire de jeu.
1919 : le FC Neudorf devient le RC Strasbourg
Après un âpre combat juridique, c’est un autre club, le Fussball Club Neudorf, renommé Racing Club de Strasbourg en 1919, qui signe, un peu avant la déclaration de guerre de 1914, un bail pour l’utilisation de cette prairie entourée de jardins familiaux. A cause de la guerre, il faut attendre 1921 pour que la première tribune en bois, avec places assises, soit construite. En 1930, en face, une deuxième tribune permet d’accueillir des supporteurs debout – c’est là désormais que bat le cœur de ce que l’on commence à appeler « le stade de la Meinau ».
Tandis qu’en 1933, le RCS passe professionnel, en 1938, la Meinau accueille son premier grand évènement international : les huitièmes de finale de la Coupe du monde, opposant la Pologne au Brésil : 13 452 spectateurs payants, pour 20 000 personnes au total (voir photos ci-dessous).
À la fin des années 1940, la municipalité, propriétaire des lieux depuis 1927, décide de rénover le stade. Une nouvelle tribune d’honneur couverte en béton armé de 2 500 places et des nouveaux gradins sont inaugurés en 1951. Le stade, dédié jusqu’alors exclusivement au football, est doté d’une piste d’athlétisme comportant six couloirs. D’autres équipements sont créés, comme une salle d’éducation physique, une infirmerie et sept logements. Coût total de l’opération : 40 millions de francs.
En 1978, rebelote : la municipalité décide de reconstruire le stade en vue du Championnat d’Europe de football de 1984 organisé en France. Les tribunes sont démolies et reconstruites une à une pendant cinq ans. Le tout, pour 117 millions de francs.
Pas de Coupe du monde 1998, par d’Euro 2016
En 1992, l’organisation de la Coupe du monde 1998 est confiée à la France. Un an plus tard, Michel Platini, coprésident du Comité français d’organisation, propose à la ville de Strasbourg d’agrandir la Meinau pour pouvoir y participer. Le coût de la remise à niveau s’élève à 200 millions de francs. Rédhibitoire pour la Ville, qui refuse finalement de rénover l’enceinte.
Plusieurs projets de rénovation ou reconstruction se succèdent ensuite. L’ancien joueur du club Marc Keller, devenu manager général en 2001 (et actuel président du RCSA !), prépare une possible extension de l’enceinte à 35 000 places, en augmentant la capacité des tribunes nord et Est. Ce projet, encore en discussion en 2006 sous la présidence de Philippe Ginestet, n’aboutit pas.
Exit l’Eurostadium, le stade restera à la Meinau
En 2008, émerge le projet de construction d’un stade multifonctionnel, baptisé Eurostadium. En ligne de mire : l’Euro 2016. Il est prévu que le stade soit financé sur fonds privés (groupe Hammerson) et que le RC Strasbourg en soit le « concessionnaire exploitant ». Doté d’une capacité de 42 700 places, le projet de nouveau stade (250M€) comprend également 90 000 mètres carrés de surface commerciale. Le tout, hors de la Meinau, à proximité de l’aéroport d’Entzheim. En 2009, le projet tombe à l’eau. Suit un autre montage de reconstruction sur site pour 85M€ porté par la Ville, mort-né lui aussi.
Tandis que l’intérieur du stade vit au rythme des montées et descentes du RCS dans les tableaux nationaux, le voisinage, lui, est d’un calme olympien. Ainsi, entre le stade et le Krimmeri, est établie depuis 1871 l’École normale d’instituteurs, aujourd’hui École supérieure du professorat et de l’éducation, où sont formés les enseignants du primaire et du secondaire.
École d’instituteurs, avec vue sur le stade
De l’entrée, à hauteur de la station Krimmeri-Meinau, le visiteur a du mal à imaginer l’écrin de verdure incroyable dans lequel s’épanouissent bâtiments ancien (1871-77) et moderne (2006). La nature est présente partout, dans un parc, un petit jardin partagé, un friche épineuse. Le tout, avec vue sur les arcs en béton du stade.
En revanche, là où s’étendaient depuis 1703 le parc, les champs et la ferme de la famille Leitserberger, rebaptisés domaine de la Flachenbourg au tournant du XIXème siècle, il n’y a plus que du béton : le parking du stade, les rues de l’Extenwœrth, de Leitersberger et de la Flechenbourg (justement), où la municipalité à fait construire après 1934 un lotissement de villas et d’immeubles collectifs (ci-dessous).
Quartier résidentiel des villas, dès les années 1930
Un peu plus à l’Est de notre secteur, la partie nord du « quartier des villas » profite à plein de la coulée verte aménagée autour du Krimmeri. Les rues Erard, Pleyer et Staedel font référence à des artistes, musiciens ou orfèvres, tandis que l’avenue Christian-Pfister doit son nom à un universitaire strasbourgeois des années 1920. A noter que ce secteur résidentiel, à l’urbanisme très homogène (1930-1970), est aménagé selon un quadrillage qui exclut toute centralité. Dès l’origine, les commerces sont implantés le long de la route de Colmar et sont rassemblés désormais plus au sud, autour de la Canardière et de l’Ile-de-France.
Curiosité enfin, découverte dans cette partie nord de la Meinau : l’espace mixte et incertain autour de la rue des Vanneaux, entrelacs de chemins non-carrossables, d’allées de jardins familiaux aux palissades hérissées de piques et de clous, de rues en cul-de-sacs et d’innombrables terrains de sport. Là, un ensemble de petits immeubles a été construit en 1995 et baptisé « Clos des Vanneaux », sur des terrains occupés auparavant par une fabrique de bougies.
Aller plus loin
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