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« La ZFE, un traitement efficace qui sauve des vies », selon des médecins strasbourgeois

La municipalité a décidé de maintenir l’interdiction des véhicules Crit’Air 3 en 2025. Dans une tribune envoyée à Rue89 Strasbourg, les docteurs Thomas Bourdrel et Christian Michel, membres du collectif Strasbourg Respire, expliquent pourquoi ils soutiennent cette décision.

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Le collectif de médecins Strasbourg Respire signe une tribune dans Rue89 Strasbourg.

Imaginons un traitement capable en quelques années de faire baisser la mortalité respiratoire de 22%, et la mortalité cardiaque de 11%, qu’il soit disponible mais que pour des raisons politiques et budgétaires il ne soit pas rendu complètement disponible par les pouvoirs publics. Difficilement concevable, non ?

Ce traitement efficace nous l’avons, il se nomme ZFE (pour Zone à Faibles Émissions), il est disponible et déjà testé avec succès dans de nombreux pays. À Tokyo, à titre d’exemple, en moins de 7 ans, l’éviction des vieux véhicules diesel (équivalent des véhicules diesel Crit’Air 5, 4 et 3) a fait baisser la concentration en particules fines de 44%, la mortalité respiratoire de 22%, la mortalité cardiaque de 11%, la mortalité par cancer du poumon de 5% et par accident vasculaire cérébral de 6%.

Rappelons que les gaz et particules issues des moteurs diesel sont parmi les plus toxiques, responsables de nombreuses pathologies respiratoires, cardio-vasculaires, neurodégénératives, de cancers et d’effets (de type perturbateurs endocriniens) sur la grossesse. Les particules fines et ultrafines émises par les vieux moteurs diesel étant de loin les plus toxiques en raison notamment de leur richesse en hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) qui sont cancérigènes et de puissants perturbateurs endocriniens.

Un impératif de santé publique

Rappelons également que les systèmes de dépollution des véhicules diesel récents et anciens fonctionnent mal en ville, car la température nécessaire à leur bon fonctionnement est difficilement atteinte en usage urbain, de même, les filtres à particules s’encrassent très rapidement en ville.

Enfin, les diesels aux normes Euro 4 (bénéficiant de la vignette Crit’Air 3) sont ceux qui présentent le plus grand écart d’émission de dioxyde d’azote en conditions réelles comparativement aux données constructeurs (3).

Poursuivre le calendrier des ZFE – qui prévoit l’interdiction prochaine de ces motorisations – relève donc d’un impératif de santé publique !

Rappelons enfin que si certaines villes telles que Strasbourg sont sorties de justesse de l’obligation de maintenir et renforcer leurs ZFE, elles le doivent en grande partie – voire exclusivement – à une météo favorable ces deux dernières années, mais qu’il suffit de deux jours de conditions anticycloniques pour que l’air redevienne irrespirable. De plus, les normes européennes pour le dioxyde d’azote et les particules fines seront d’ici quelques mois révisées et bien plus sévères, ce qui rendra à nouveau obligatoire un renforcement des ZFE à Strasbourg et dans de nombreuses villes.

Mettre en pause les ZFE en retardant les interdictions des Crit’Air 3 – comme le propose le gouvernement – nous ferait prendre un retard très dommageable, tout en continuant à exposer les habitants à un air toxique, notamment les riverains d’axes routiers.

Comme tout traitement, même non médicamenteux, les ZFE ont deux effets indésirables : d’une part une impopularité relative et temporaire, et d’autre part un coût financier certain. Mais que valent ces dépenses publiques par rapport aux vies sauvées et aux milliers d’euros épargnés en dépenses de santé publiques ?

Rendre Crit’Air plus juste

L’impopularité de la ZFE quant à elle pourrait être nettement atténuée si l’État et les banques respectaient leurs engagements de prêt à taux zéro pour les revenus les plus modestes, si les aides financières étaient significativement relevées, l’aide au rétrofit plus développée (4) et si le système des vignettes Crit’Air était légèrement modifié dans une direction plus juste.

En effet, la classification Crit’Air est pertinente pour les émissions de polluants toxiques tels que le dioxyde d’azote et les particules fines, mais elle est absurde quand elle permet à un pick-up flambant neuf ou à une Porsche Cayenne essence de parader en Crit’Air 1 devant des familles modestes ayant du mettre au rebut leur vieille Clio Crit’Air 3 ! Ce paradoxe pourrait paraître anecdotique s’il n’était parfaitement insupportable de par le sentiment d’injustice et de mépris qui s’en dégage.

Cette inégalité serait pourtant très facilement corrigible : avec de nombreuses associations dont Respire et le Réseau Action Climat nous avions proposé que l’on prenne en compte le poids du véhicule et sa consommation afin que de tels mastodontes des routes ne puissent pas bénéficier de la vignette Crit’Air 1.

À l’heure de ce choix crucial, nos élus et élues de tous bords ne devraient se poser qu’une seule question : pouvons nous décemment renoncer à une mesure qui sauve et sauvera des vies, retardera ou empêchera le développement de maladies notamment chez nos enfants ? Les énergies politiques devraient se rejoindre pour rendre rapidement cette mesure efficace et acceptable, tout en continuant à développer les alternatives à la voiture.

Dr Thomas Bourdrel
Dr Christian Michel


#ZFE

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