La polémique était née en avril 2018, lors de la vente de la brasserie du Rocher du Sapin à la franchise de poulets-frits KFC. Est-ce la loi du marché ou la municipalité avait-elle les moyens de s’y opposer ? Selon l’adjoint au maire en charge du commerce Paul Meyer (La Coopérative, rallié à LREM pour les municipales), il fallait a minima durcir le permis de travaux pour décourager le projet. Mais l’élu admet que la municipalité manquait « d’outils juridiques ».
Surtout, la passe-d’armes interne à la majorité qui avait suivi la polémique a fait avancer l’idée d’un « périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité ». Une possibilité que permettent deux lois depuis 2005 et 2007. Plusieurs grandes villes, comme Bordeaux, Rennes, Toulouse, Montpellier ou Lyon, ont adopté ce dispositif.
La municipalité mieux informée
Qu’est-ce que cela va changer ? Avant, l’Eurométropole n’était informée que des cessions « des murs » et pouvait préempter en cas de changement d’usage. C’est ce qui avait été fait en 2000 place de la Cathédrale après la fin de la pharmacie du Cerf. Elle y avait implanté la Boutique Culture, jusqu’à cet automne, et barré la route d’une chaîne de restauration rapide.
Désormais, chaque vente d’un fonds de commerce, d’un fonds artisanal, d’un bail commercial ou d’un terrain dans l’enceinte d’un périmètre comprenant le centre-ville devra être déclaré à la municipalité. L’information remontera aux services de la Politique foncière immobilière, qui transmettra, à la Direction du développement économique et de l’attractivité (DDEA) de la Ville et l’Eurométropole.
Soumettre l’enseigne à débat
La Ville promet ensuite de soumettre chaque changement d’enseigne à la Chambre de commerce et d’Industrie (CCI), à celle des Métiers et de l’Artisanat (CMA), voire aux éventuelles associations de riverains et commerçants concernées. Si le cas fait débat, elle tentera ensuite de négocier avec les vendeurs pour trouver d’autres débouchés, voire soumettre des offres commerciales alternatives.
Si rien ne fonctionne, elle pourra racheter le commerce au prix de vente. Aucun budget n’est prévu pour de telles interventions, le but étant de « limiter au maximum les préemptions », dixit Laurent Maennel, le « manager de centre-ville » recruté en mai 2019. « Ce seront des arbitrages politiques au cas par cas », complète Paul Meyer.
Des décisions au cas par cas, sans budget réservé
Aucun critère objectif pour refuser une implantation n’a été dressé. Tout dépendra de la volonté de la municipalité. Néanmoins deux orientations émergent à écouter le maire Roland Ries (PS / LREM), Laurent Maennel et Paul Meyer : les chaînes de restauration sont particulièrement visées et d’éventuelles négociations viseront à favoriser l’artisanat indépendant. Tout un programme.
Le périmètre concerne le centre-ville élargi au quartier Gare et à la Krutenau. Il n’est pas étendu à toute la ville pour limiter les risques de recours juridiques.
Pour les terrains à vocation commerciale, la Ville ne pourra intervenir que quand la nouvelle surface se situe entre 300 et 1 000 mètres-carrés, une limite fixée par la loi. En clair, une telle délibération n’aurait pas pu empêcher l’implantation du magasin de vêtements à bas-prix Primark qui s’étendra sur 4 étages et 5 700 m². L’ouverture est désormais prévue vers la fin 2020 et non fin 2018.
Débat et vote le 16 décembre
À terme, la municipalité pourrait déléguer la gestion des locaux commerciaux préemptés à une de ses sociétés satellites, telle la Locusem. Le temps des négociations, la Ville devra s’engager financièrement à maintenir l’offre commerciale en place, en reprenant l’activité temporairement.
La délibération sera soumise au vote du conseil municipal lundi 16 décembre, à suivre en direct-vidéo commenté sur Rue89 Strasbourg à partir de 9h30. Le texte sera applicable 48 heures plus tard.
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