Pour son corps…
Au début, c’est assez simple, on court pour se sentir mieux : la volonté se débarrasser du goût du tabac qui colle à la mémoire du corps comme un vieux chewing-gum à la semelle d’une basket ; l’ambition de se perdre cette vilaine graisse jaune qui résiste depuis des années aux bonnes résolutions du 1er janvier ; la certitude que préserver son cœur permettra de mieux vieillir. Rapidement, un nouveau monde s’ouvre avec sa seule balance, un cardio- fréquencemètre ou les applis smartphone : poids, rythme cardiaque, distance, vitesse, calories brulées et autres indices de forme envahissent le quotidien, on s’applique, on fait attention à ce qu’on mange. Et puis, c’est de la physique élémentaire, personne ne remplit ses poches de cailloux avant de courir, alors mieux vaut éviter toute charge superflue. C’est rapide et simple.
… et sa tête
Au fils des séances, la maîtrise et la connaissance grandissantes du corps permettent d’affuter l’analyse et le cerveau comprend que courir c’est aussi un temps bénéfique pour l’esprit. Enfin, un créneau pour soi. C’est le moment où l’on est plus maman, papa, mari, épouse, salarié, manager… On oublie les enfants envahissants, les repas à préparer, le chef tyrannique, les collègues omniprésents, les soucis du jour et ceux du lendemain. Bref, c’est le mode pause et même si les muscles travaillent, l’esprit vagabonde et se recharge. D’un coup le disque dur paraît moins saturé. Comme si un mouvement de balancier allégeait le travail de la tête pour mieux permettre celui du corps.
Collectif ou individuel ?
Les années 80 représentaient le coureur en runner, l’übermensch athlétique qui casque sur les oreilles sillonnait l’espace urbain avec fierté. Le sport individuel par excellence. Mais à moins d’être doué, pour progresser, il faut apprendre. En rejoignant un club, on trouve une méthode, de la motivation et surtout un moyen d’échapper à sa playlist de coureur solitaire. Comme pour les autres sports ou pour un club de macramé, c’est aussi une rencontre avec les autres, parce qu’ils viennent d’arriver à Strasbourg et souhaitent s’intégrer, parce qu’ils souhaitent partager leur passion ; parce qu’ils aiment les gens. Alors oui, collectif avec en plus une flexibilité qui permet de choisir ses horaires et son terrain de jeu pour garder cette marge la liberté qui manque tant aux sports en équipes. Courir en parlant, c’est même un excellent indicateur pour éviter de courir trop vite lors des séances de fond. Preuve s’il en est qu’ensemble, c’est mieux.
Sensations inattendues
Chemin faisant, de petits bonheurs dont on ne soupçonnait pas l’existence surgissent. Un bien-être simple et nouveau : rythmer sa respiration et sa foulée pour une gestuelle harmonieuse comme un musicien travaillant son tempo. Sentir son tee-shirt coller au torse par la sueur sous la chaleur de l’effort. Se désigner mentalement un lièvre lors d’une séance d’entrainement et le suivre dans la douleur pour franchir simultanément la ligne au coup de sifflet de l’entraineur. Prendre la tête d’un petit groupe, donner la cadence tout en l’encourager d’une voix de stentor décomptant la distance avant l’arrivé. Ecouter le bruit entraînant des pieds qui foulent le sol autour se soi. Il en reste sûrement d’autres à découvrir.
Et pourquoi pas une course ?
Puis vient le temps d’accrocher un dossard sur son maillot. A chacun son moteur. Qu’il ne s’agisse que de vaincre le chrono, de soutenir une bonne cause ou du goût de la compétition, une course c’est un rassemblement populaire où chacun trouve sa place : les lents, les débutants, les lourds, les anciens, les warriors. Une communauté, de l’envie, de la volonté et souvent à l’arrivée de la joie et de l’émotion qui efface la douleur. Tout n’est pas que podium et médailles, c’est aussi partager ses fiertés et ses déceptions avec ceux avec qui on court.
Le nombre d’or
Pour finir, sorties après sorties, courses après courses, cinq petits chiffres commencent à trotter dans la tête, enflent et occupent les pensées pour former le nombre qui ne vous quittera plus. Bien que dépassé en distance par les ironmen et autres ultra-trails, les 42,195 km restent un mythe auquel chacun peut attacher son image intime qui va le guider. L’attraction est irrésistible et à l’image de la limaille de fer attirée par l’aimant du prof de physique en 6ème, un groupe d’entraînement se forme, interroge ses ainées, discute des heures entières de tactique de course ou des bienfaits du jus de goyave. Une fois le plan d’entrainement bouclé, chaque sortie a un but et les précédentes motivations semblent futiles. Est-ce un aboutissement, le marathon de Strasbourg du 28 octobre apportera peut être une réponse ?
Finalement, courir ne serait-ce pas un peu tout à la fois ? Une foule de possibilités qui fait que chaque fois qu’on enfile ses chaussures de sport, il est à peu près certain qu’un sentiment de satisfaction nous envahira quand on les retirera après avoir couru. Et toi riverain, pourquoi cours-tu ?
Serge Roehri
Coureur amateur
Y aller
Le top départ du marathon de l’Eurodistrict est donné à 9 heures, dimanche 28 octobre, au Zénith-Europe. Les coureurs sont invités à se présenter à partir de 6h30 pour récupérer leur dossard et leur puce.
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