« Il y a beaucoup de bagarres ici », souffle Abdou (le prénom a été changé). Comme son voisin Camara Ahmed Titiane, il a entendu un coup de feu résonner au squat Bugatti dans la soirée du jeudi 24 septembre. Un homme d’une vingtaine d’années, d’origine nigérianne, a pris une balle dans la jambe. Selon les Dernières Nouvelles d’Alsace, l’habitant de ce bâtiment de bureaux abandonné d’Eckbolsheim a pu sortir de l’hôpital.
Au début du mois d’août déjà, le squat Bugatti avait été la scène d’une bagarre impliquant une vingtaine de personnes. Certains d’entre eux étaient armés de couteaux ou de tessons de bouteille.
Tensions confessionnelles ou abandon des pouvoirs publics ?
L’origine de cette agression reste mystérieuse. Certains résidents évoquent des tensions entre Nigérians chrétiens et Tchétchènes musulmans. Deux témoins accusent Lahcen Oualhaci, le gérant du squat Bugatti, de favoriser la population musulmane du bâtiment.
Ce dernier nie tout favoritisme. Il préfère lier les difficultés à l’alcool et à la promiscuité subie par « plus de 200 habitants ». Selon l’ancien sans-abri, le tir dans la jambe s’expliquerait par la jalousie des agresseurs. La victime occupe une caravane aux abords du squat. Le véhicule serait bien plus confortable que le rez-de-chaussée de la propriété de Lidl. « Les gens n’ont que des bâches en plastique pour séparer leurs chambres », rappelle le chef du lieu.
Une problématique de sécurité
Lahcen Oualhaci regrette aussi le manque de soutien des pouvoirs publics pour assurer la sécurité du lieu :
« Il y a des résidents qui ont un contrat bénévole de sécurité… Mais tout est allé très vite avec ce tir. Moi je serais d’accord si la mairie mettait en place une sécurité professionnelle comme à l’Hôtel de la rue. Mais ça fait un an qu’on a aucune nouvelle de la mairie d’Eckbolsheim. »
Un agent de sécurité aurait-il pu éviter cette blessure ? Habitant du squat Bugatti, Camara Ahmed Titiane estime que oui :
« Jeudi, je suis rentré vers 17 heures et j’ai trouvé deux personnes avec ciseaux et couteaux qui agressait un Nigérian. Je les ai séparés mais ils sont revenus plus tard, l’un d’eux avec un pistolet et ils ont tiré ensuite… »
L’homme affirme s’être rendu à l’Hôtel de la rue, dans le quartier de Koenisghoffen, pour y observer la façon dont la sécurité est assurée : « Je ne peux même plus compter le nombre de bagarres qu’il y a eues au squat Bugatti, il y en a trop… »
Un commandement de quitter les lieux
Par communiqué de presse, l’association D’ailleurs nous sommes d’ici a rappelé la « responsabilité de l’Eurométropole et de la préfecture » avant de dénoncer des violences issues « de la précarité, de la misère totale, malgré l’alerte donnée par différentes associations humanitaires. »
Ces anciens locaux de formation ont été acquis par le distributeur Lidl, qui a initié peu après leur occupation une procédure d’expulsion. Un jugement autorisant une éviction a été prononcé le 10 juillet par le tribunal judiciaire de Strasbourg, donnant aux squatteurs un délai de trois mois pour évacuer les lieux. Le 16 juillet, un huissier a apporté au squat un « commandement de quitter les lieux » avant le 16 octobre.
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