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Supermarché à l’Elsau : « Pas avant 2023 », selon Hülliya Turan, référente du quartier

Hülliya Turan a été désignée référente de l’Elsau en juillet 2020. Quelques mois après sa prise de fonction, elle décrit les priorités de son mandat pour le quartier, entre supermarché, distributeur automatique et rénovation urbaine.

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Rue89 Strasbourg : En juillet 2020, vous avez été nommée référente pour le quartier de l’Elsau. Quelles sont les attentes et les priorités de la population du quartier ?

Hülliya Turan : En tant que référente pour le quartier de l’Elsau, j’ai pu confirmer mes constats de longue date puisque je suis moi-même issue du quartier où j’ai vécu de 1983 à 1998. C’est un quartier délaissé par les politiques publiques. Je n’ai pas peur des mots. Ce quartier n’a pas été investi, ni en terme d’investissements publics, ni en terme d’infrastructures. Les habitants le vivent et l’affirment, de même que les partenaires associatifs : « On a été les oubliés de Strasbourg ».

Hülliya Turan, adjointe à la maire de Strasbourg en charge de l’éducation et de l’enfance, élue référente pour le quartier de l’Elsau. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

Lors du dernier mandat, il y a eu ces choix de rénovation urbaine qui vont avoir un impact positif sur le quartier. La question qui va se poser est “comment va-t-on accompagner les habitants dans ce changement ?“. Mon choix aujourd’hui est de dire : oui, il y a besoin d’investissements publics et l’Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) investit une somme conséquente pour le territoire elsauvien. Mais il faut y réfléchir pour faire en sorte que ce ne soit pas que de l’investissement dans du matériel, il faut que le projet réponde également aux besoins des habitants.

Quelles sont les priorités de court terme de la politique municipale pour l’Elsau ?

Pour l’Elsau c’est simple : il y a une priorité au niveau du commerce de proximité et des lieux de rencontre pour les habitants. Regardez, on fait cet interview dans un centre socioculturel parce qu’il n’y a aucun endroit où on peut se poser pour boire un thé ou un café.

Aujourd’hui, la question c’est comment faire pour qu’il y ait un projet viable et durable sur le quartier en terme de commerce de proximité. C’est une de nos priorités. On a enfin signé un permis de construire fin septembre 2020. Il contient à la fois des espaces pour des commerces mais aussi des logements. Une partie des habitations sera en accession à la propriété et l’autre en location.

Permis de construire sur le terrain de l’ancien supermarché Leclerc dans le quartier de l’Elsau (Document remis)

Le permis de construire donne-t-il une idée des enseignes qui s’installerait dans le complexe ?

Le maître d’ouvrage du projet de centre commercial est le promoteur MARIGNAN. Le projet est composé de 2 lots comprenant 100 logements et 1250 m² de surface commerciale au total. Le lot 1 prévoit 45 logements locatif intermédiaire et 1000 m² de surface commerciales en rez-de-chaussée du nouveau bâtiment. Le lot 2 prévoit 55 logements en accession sociale sécurisée et libre et 250 m² de surface d’activité.

Les négociations avec les enseignes alimentaires sont en cours. La surface n’est pas encore définitivement arrêtée entre 500 et 600 m² a priori. Le reste de la programmation commerciale n’est pas arrêtée.

L’honnêteté sur le supermarché c’est dire quoi aujourd’hui ?

C’est de dire qu’on va donner tous les moyens pour qu’il y en ait un. Et si aucune enseigne ne veut s’installer à l’Elsau, parce qu’économiquement c’est pas rentable, qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce qu’on laisse les habitants ? Bien sûr que non. Donc pourquoi ne pas réfléchir à des alternatives ? Si aucune enseigne ne veut s’installer, on verra comment faire pour que la ville mette un hall municipal ou une épicerie sociale, quelque chose qui puisse répondre aux besoins des habitants. Dans tous les cas, les projets de commerce de proximité ne sortiront pas de terre avant 3 ans, grosso modo.

Quelles sont les autres priorités ?

L’autre urgence, c’est un guichet automatique. Ici il n’y a plus de banque depuis plus d’une dizaine d’années. Mettre en place une banque me paraît compliqué à l’heure actuelle. Mais un guichet automatique, ce sera une de mes priorités. Dans le cadre du permis de construire à l’entrée du quartier, cette dimension sera également prise en compte. J’ai fait le lien avec la Poste puisqu’on en a encore une sur le quartier. Il y a des pourparlers à avoir avec les structures existantes pour développer leur offre.

Dans le cadre de la rénovation urbaine, on souhaite redessiner le quartier à une échelle qui soit la plus agréable possible en s’appuyant sur l’existant. L’Elsau c’est quand même un quartier à proximité de prairies et d’espaces agricoles ou naturels très riches. Il y a donc un patrimoine à utiliser comme un levier pour faire de l’Elsau un quartier attractif ou plutôt attrayant au-delà même des habitants du quartier.

Que compte faire la Ville de Strasbourg face à la problématique du trafic de drogues ?

Ce problème ne relève pas des compétences de la Ville. Mais je pense qu’au niveau municipal, on peut mener des actions auprès de la jeunesse pour leur donner des perspectives d’avenir.

De quelles actions parlez-vous concrètement ?

Je pense que le fait de redessiner un peu le quartier, de mettre du commerce et de l’activité, ça peut donner de l’espoir aux jeunes. Ensuite je pense qu’il y a différents acteurs, comme les écoles, avec lesquels des projets pédagogiques pourraient êtres développés. Les enfants sont souvent friands de tout ce qui tourne autour de la terre. Cette idée de ferme urbaine par exemple pourrait donner des perspectives d’emploi. La possibilité d’avoir des services publics sur place, de qualité… Voilà c’est toute une série de pistes qui redonnent de l’espoir.

Est-ce que la Ville de Strasbourg est capable de dire aujourd’hui aux habitants de l’Elsau, « ceux qui souhaitent rester dans le quartier pourront rester » ?

Le projet de renouvellement urbain conventionné avec l’ANRU prévoit la démolition de 412 logements sur l’ensemble du quartier de l’Elsau, échelonnées entre 2021 et 2026. 

A ce jour, 2 immeubles sont en cours de relogements par OPHEA : le 40 Grünewald et le 8 Weiss. Ces deux immeubles représentent 79 relogements dont 4 logements attribués à des associations. 18 familles sur 75 ont fait part de leur volonté de rester à l’Elsau. 30 % des 75 familles résidantes à ces deux adresses ont d’ores et déjà accepté l’offre faite par le bailleur.

Pour le reste des adresses nous n’avons pas encore la connaissance précise des demandes car les diagnostics sociaux n’ont pas encore été réalisés. Les enquêtes sociales pour connaître les attentes des ménages se feront au fur et à mesure des démolitions. 

Visiblement, la part de ceux qui souhaitent rester n’est pas majoritaire. Même face à cette partie minoritaire, on ne va pas pouvoir reloger tout le monde à l’Elsau.

Est-ce qu’on a une idée par rapport à cette rénovation urbaine, d’une date et d’une première action ?

Le projet de renouvellement urbain comporte 2 secteurs opérationnels. Les travaux (hors démolitions) seront menés dans le calendrier suivant :  

Secteur 1 – L’entrée de quartier dont les travaux se dérouleront de 2021 à 2026

Secteur 2 – Le secteur Schongauer dont les travaux se dérouleront de 2024 à 2030

Les premières opérations dont les travaux sont prévues portent sur l’entrée de quartier : projet MARIGNAN (début des travaux en 2021), projet de salle de Boxe (début des travaux en 2022) et réaménagement des espaces publics (début des travaux 2023).

La deuxième étape, ce sera l’installation de la maison des services publics, à côté du centre socioculturel. Mais sur cette deuxième étape, c’est encore en débat, on n’a pas totalement arrêté les choses même si on sait qu’il y aura la mairie de quartier, la direction du territoire, la médiathèque, la poste si on arrive à les faire venir, une antenne de la Caisse des allocations familiales (Caf) et une antenne de la sécurité sociale.

Rue89 Strasbourg a parlé des projets de la FACCC ou des nouvelles enseignes qui ont ouvert rue Wateau entre le Calcio et les Beaux garçons. Est-ce que vous pouvez dire ce que la ville fait pour soutenir ce genre de démarches qui viennent dynamiser le territoire ?

Il y a un soutien à l’égard de ce type de structures, c’est un soutien financier, technique ou en termes de partenariats.

Rue89 Strasbourg a aussi rapporté qu’il arrivait que les fidèles elsauviens du lieu de culte de l’AJPE soient obligés de prier dehors. Est-ce qu’à ce niveau là ça avance ?

A ce jour, il n’y a pas de local alternatif identifié. 

Rue89 Strasbourg a publié un témoignage de jeunes amateurs de rodéo urbain. Ils aimeraient avoir un espace dans lequel ils pourraient pratiquer à l’Elsau. Est-ce que ce serait possible selon vous ?

Pour le moment, ce n’est pas un projet qui a été repéré comme un projet avec une forte demande. Si c’est un projet qui est monté par un groupe de jeunes avec toute une réflexion autour pourquoi pas.

Après, sur la question des rodéos urbains, je me pose les questions : pourquoi à un moment donné ces jeunes-là ont ce besoin ? Pourquoi ils l’expriment de cette manière ? Comment faire pour leur proposer d’autres activités ? Donc est-ce qu’il faut se dire « ils s’organisent donc on va les accompagner » ou est-ce que finalement il n’y a pas des alternatives qui pourraient leur permettre de développer d’autres activités ? J’étais au club de boxe de la rue Martin Schongauer hier. Il y avait une soixantaine de personnes. Voilà, comment les jeunes peuvent se défouler sans forcément se mettre danger.

Pour un espace ouvert au rodéo urbain, je ne dis pas oui ou non. Je dis juste que ça mérite plus de réflexion, pour voir si c’est vraiment une aspiration, s’il y a une volonté d’être dans des championnats… L’Elsau est aussi un quartier où il y a eu beaucoup de champions, que ce soit dans la boxe, le foot, le street workout… Il y a aussi des labels, des groupes de musique et rap. C’est presque une école d’excellence dans ces domaines. Donc si dans le domaine de la moto cross, il y a un projet, je dis pourquoi pas.


#Elsau

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