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Strasbourg – Brest en voiture électrique ? Mais quelle idée !

Le strasbourgeois Denis Huber s’est lancé un défi, celui de relier les extrêmes est et ouest de la France, soit plus de 1 000 kilomètres, en voiture électrique. Voici l’histoire de son voyage, une aventure du XXIe siècle.

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Denis Huber, motivé par l’aventure de la voiture électrique (Document remis)

L’idée de ce voyage m’est venue le jour où j’ai lu sur le site automobile-propre.com que quelqu’un avait fait Paris – Marseille aller-retour en voiture électrique, Je me suis dit qu’il faudrait que quelqu’un fasse l’axe Est – Ouest. Pourquoi pas moi ? J’ai alors cherché une personne et c’est mon cousin qui a accepté de m’accompagner dans ma Renault Zoé.

J’ai rapidement commencé à préparer le voyage avec Google Maps et le site Chargemap.com. Les capacités de la voiture sont de (plus ou moins) 140 km par plein d’électricité, et je compte recharger principalement dans les concessions Renault. Je cherche donc des concessions tous les 140 km environ avec une borne de recharge rapide. Une fois ces concessions trouvées, je leur téléphone pour avoir la confirmation qu’elles ont toutes une borne de recharge 22 kwh en état de marche.

Nous sommes obligés de partir en semaine pour disposer de l’amplitude maximum d’heures d’ouverture des concessions, car malheureusement la recharge n’est possible que de 8h à 18h et pas en entre midi et deux, ni le week-end.

La voiture a une position mode « éco » -qui comme sont nom l’indique est là pour faire des économie notamment sur la puissance du moteur ou le chauffage- que je décide d’utiliser tout le temps pour le voyage. Je programme aussi le GPS pour qu’il nous donne les « éco parcours » – route plus courte mais plus sinueuses genre départementale- histoire de mettre toutes les chances de notre coté.

Premier jour : test des horaires des concessions Renault

Nous partons donc le lundi 7 octobre à 8h15 depuis Holtzheim, destination Laxou près de Nancy. L’ étape fait 143 km, avec la traversée du col de Saverne. Nous avons mis 2h45 pour cette première étape et à l’arrivée il nous reste 4% de la batterie. Ouf ! première étape chaude. A notre arrivée à Laxou, la jauge batterie n’indiquait même plus de kilomètres disponibles… Avec les 4% restant nous aurions pu faire encore 5 km au maximum. Arrivés à Laxou vers 11h, nous demandons à pouvoir charger mais il faudra de longues minutes au responsable de la borne pour trouver le badge nécessaire. Du coup, cela a repoussé la fin de la charge à 12h15, au grand désarroi de cette personne qui nous aurait coupé la charge à midi pile, si une secrétaire n’avait accepté de rester avec nous pendant le quart d’heure restant.

Pour la deuxième étape, j’avais prévu d’aller à Vitry-le-François via la N4 – étape de 120 km réalisée en 1h30- A notre arrivée, je demande à charger et là – catastrophe ! – ils n’ont pas de borne accélérée. Le site Chargemap a indiqué de fausses informations et le coup de téléphone passé à la concession n’a visiblement pas servi à grand chose puisque la secrétaire m’a confirmé l’info. Je ne sais pas quoi faire et suis très énervé, dès la 2ème étape c’est une grosse tuile ! Le concessionnaire me conseille d’aller à Chalon-en-Champagne qui se trouve à 35 km, la Zoé indique disposer encore d’une autonomie de 40 km… Pas le choix ! Direction Chalon à 70 km/h max pour économiser et 40 km plus loin nous arrivons à la concession avec 3% de la batterie restante. L’étape aura finalement duré 2h30 pour 157 km. C’était chaud ! D’autant qu’à Chalon, l’accueil de la concession n’a pas non plus été très chaleureux…

Troisième étape direction Meaux à 122 km. Nous arrivons à 18h et demandons à pouvoir recharger. Là nouveau problème : les employés nous disent que la borne 22 kwh est cassée. Je suis terrassé ! Après discussion, un autre employé de la concession nous dit que non, finalement elle fonctionne. Nous commençons à recharger et comme à Meaux, le problème de la fermeture se pose. La charge termine à 19h15 mais un employé a accepté de rester un peu plus longtemps.

Quatrième et dernière étape de la première journée. Nous quittons Meaux pour aller à Maintenon. 132 kilomètre et 3 h plus tard nous arrivons à notre hôtel. La traversée de Paris par le périphérique sud et les petites routes impraticables (merci le GPS) auront fait de cette dernière étape la plus longue de la journée, mais tranquille niveau autonomie de la voiture. Il est 22h30.

Deuxième jour : les bornes fonctionnent, ou pas

Nous rechargeons dans la concession de Maintenon à 8h et partons à 9h15 avec un accueil super sympa de leur part. Direction Alençon 121 km et 2h15 plus tard nous arrivons. Il est 11h30 et demandons à recharger. Comme midi approche nous demandons le badge pour pouvoir débrancher seuls à 12h30 et le glisser sous la porte en partant. Heureusement- la personne accepte. Ce sera la seule fois durant le voyage où nous aurons le badge à notre disposition…

Direction Fougères à 106 km. Nous arrivons 1h45 plus tard et pouvons recharger sans problème.

La troisième étape est une des pires à l’aller comme au retour. La vraie poisse. Nous arrivons à Loudéac à 18h après 134 km, il nous reste 15 km d’autonomie. Nous demandons à recharger. Au début, ils avaient perdu le badge. Ils finissent par le retrouver mais la borne ne fonctionne pas, elle coupe tous les 0,08 kwh soit pour 22 kwh il nous aurait fallu des heures et des heures pour faire le plein. Je décide d’appeler l’assistance pour la première fois. Un employé fraîchement arrivé a cherché pour nous dans la ville une autre borne publique. Il en a trouvé une au Crédit agricole, mais seulement de 11 kwh – c’est moins bien mais toujours mieux que 3kwh. Nous annulons donc l’assistance Renault.

La borne salvatrice des « Vieilles charrues »

Avec les soucis de badge, plus ceux des bornes nous avons perdu 45 minutes et comme la borne du Crédit agricole est moins puissante le plein se fait en 2h. Il nous restait un quart donc 1h30 pour faire le plein. Alors là les calculs commencent avec mon cousin pour savoir s’il vaut mieux aller directement à Brest qui se trouve à 160 km ou bien faire une étape supplémentaire même après 19h. Sur Chargemap, nous trouvons une borne publique accessible pour Zoé dans un petit village, celui des « Vieilles charrues », Carhaix-Plouguer. Je téléphone pour savoir si la borne fonctionne et si elle est réellement disponible. La réponse est affirmative ! Sauvés ! Nous décidons de ne pas faire la totalité du plein sur la 11 kwh et de faire une halte à Carhaix-Plouguer pour être certains de ne pas tomber en rade et gagner du temps.

Une fois à Carhaix-plouguer après 1h20 et 72 km nous arrivons devant la borne et… elle ne fonctionne pas. Il est presque 21h, pour la deuxième fois, nous allons appeler l’assistance. Je donne les infos et ils me disent que le dépanneur arrive dans 30 à 45 min. Nous sommes à 80 km de Brest nous espérons qu’il pourra nous déposer à Brest. Une fois qu’il nous a rejoints, le dépanneur nous apprend qu’il est de la concession Renault et que, comme il nous reste 15 km d’autonomie, il nous propose d’aller recharger à la concession. Nous acceptons.

Problème, une fois sur place il ne savait pas qu’il fallait un badge pour charger et le chargeur de l’atelier ne fonctionne pas. Il essaie de téléphoner à ses collègues mais personne ne répond. Nous décidons tous les trois de chercher le badge dans les bureaux… Miracle, nous le retrouvons et la charge peut commencer sur la borne extérieure. Il est 22h45, nous repartons à 23h30 avec 66% et 100km d’autonomie pour gagner du temps.

Dernière étape : Brest à 83 km avec 1h de route; Nous arrivons à notre destination finale à minuit et demie le mardi.

Le voyage aller ce fût 1 076 km, 17 heures de voiture, 8 recharges, 152 kwh consommés et 30 kwh produits par la récupération de l’énergie soit 20% de la totalité. Pas mal !

La Zoé, une belle voiture, mais à garder pour les trajets domicile travail (document remis)

Troisième jour, retour toujours chaotique

Impossible d’atteindre Alençon avant la fermeture de la concession à 18h. On a traîné au départ et on a dû attendre notre tour lors d’une recharge. Nous leur téléphonons pour leur demander un service et faire comme à l’aller : c’est à dire qu’ils nous laissent le badge et nous leur glisserons sous la porte après la charge. Refus catégorique. Nous arrivons vers 20h devant la concession et même devant la borne… et je dois appeler l’assistance alors qu’un simple badge aurait pu nous sortir de cette galère !

Manque de chance, cette fois le dépanneur est… Citroën. Mais à force de tractations, il accepte de nous emmener en dépanneuse à notre prochaine étape, Maintenon, après deux heures d’un voyage très agréable où nous avons discuté des spécialités culinaires alsaciennes, que je me dois de lui envoyer. Comme quoi voyager en électrique ça crée des liens…

Quatrième jour, où l’on croise l’ingénieur Renault qui va bien

Trois recharges sans histoires à Maintenon, Meaux et Chalon-en-Champagne mais à Laxou, nous avons un souci de température.

L’autonomie de la batterie dépend beaucoup de la température extérieure et ce vendredi là, il faisait 5° soit 10 degrés de moins que les jours précédents. Conséquence au lieu disposer de 150 km d’autonomie, nous n’en avions qu’environ 135, ce qui ne suffisait pas pour rejoindre Laxou. Nous décidons d’ajouter une étape à Bar-le-Duc. A la concession, nous rencontrons Pascal, qui fait la route vers Strasbourg depuis Paris en Zoé. Après avoir constaté que les bornes extérieures ne fonctionnaient pas, nous disposons du plein via les bornes intérieures à 19h40. Et je remercie chaleureusement l’employé de Renault, qui a accepté de rester avec nous 1h40 de plus que son service…

Contraints de faire un détour par Sémecourt où une borne publique est disponible sur le parking Auchan, un voyant orange s’allume sur la Zoé qui marque recharge impossible. Je me résous à appeler une 4ème fois l’assistance. Une demi-heure plus tard Pascal, parti un peu après nous de Bar-Le-Duc, nous appelle pour nous prévenir qu’il arrive. Dépité, je lui explique mon nouveau souci et l’entend me répondre que ce n’est pas grave, qu’il va arranger ça. Je suis dubitatif, mais Pascal nous avoue alors qu’il est ingénieur chez Renault. Il nous dépanne en 30 secondes chrono avec une simple clé de dix.

Sachez donc que les Zoé du mois de mars 2013 ont « trop de gardes fou » par rapport à l’électricité et qu’elles se mettent « en défaut » rapidement. Renault a changé ses règles d’alerte et les modèles suivants n’ont plus ce problème. Si votre voiture est concernée et si vous rencontrez ce problème, il suffit de débrancher le pôle négatif de la batterie 12v pendant 5 secondes. Pour une solution définitive il faut aller chez son concessionnaire et demander le « dernier soft sur le BMS », selon Pascal.

Cinquième jour, retour en Alsace

Nous repartons de Sémecourt vers 01h00 du matin. Nous visons Sarrebourg où le Cora a une borne publique 24h/24. C’est même une borne 43 kwh, la seule du voyage, soit 35 min seulement pour recharger et même pas besoin du câble puisqu’il est fourni par la borne. Si tous les rechargements pouvaient être aussi simples et rapides ce serait un énorme plus pour le développement des voitures électriques. Nous arrions à Strasbourg à 4h30.

On l’aura compris, la voiture électrique n’est pas prévue pour sortir de chez soi… Bien des bornes ne sont jamais utilisées, et sont soit hors d’usage, soit on en a perdu les clés… Et encore, à condition d’arriver aux heures d’ouverture. Si seulement Renault donnait un badge pour utiliser ces bornes, ce serait déjà un grand pas en avant. Je fais plus de 1 000 km par mois avec, et ma Zoé me convient parfaitement. Mais pour aller à Brest la prochaine fois, je prendrai le train, électrique.

Denis Huber


#voiture électrique

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