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Suite aux révélations de Rue89 Strasbourg, une plainte pénale pour dissimulation d’informations dans le fiasco Stocamine

Rue89 Strasbourg démontrait en avril dernier que les informations transmises par Stocamine sur les 42 000 tonnes de déchets toxiques, placés sous la nappe phréatique à Wittelsheim, sont probablement inexactes. Alsace Nature porte plainte contre X et espère « enfin » obtenir un inventaire complet.

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Nouveau rebondissement à Wittelsheim dans le Haut-Rhin, où 42 000 tonnes de déchets industriels ultimes ont été stockées par l’entreprise Stocamine, sous la nappe phréatique, entre 1999 et 2002. Vendredi 25 juin, l’association Alsace Nature annonce, dans un communiqué, déposer une plainte pénale :

« Suite aux révélations des articles de Rue89 Strasbourg en avril et de la Badische Zeitung en juin, nous portons plainte contre X devant deux juridictions spécialisées, la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy et le pôle régional environnement de Strasbourg. »

L’objet de la plainte concerne plus particulièrement le fait de « fournir des informations inexactes sur l’origine, la nature, les caractéristiques et les quantités de déchets stockés ». L’association environnementale reproche aussi à l’administration de se « mettre volontairement dans l’impossibilité matérielle de fournir ces informations ». La peine encourue est de deux ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende et plus encore si les faits sont commis « en bande organisée ».

De très potentiels déchets irréguliers dans la mine

Dans une enquête publiée le 19 avril, en partie grâce aux déclarations de plusieurs témoins, Rue89 Strasbourg révèle la très potentielle présence de déchets irréguliers dans l’ancienne mine de potasse convertie en site de stockage. Un article du Badische Zeitung, publié le 1er juin, donne aussi la parole à un mineur. Celui-ci assure qu’il a vu, dans les galeries, des sacs et des conteneurs endommagés ainsi que des déchets médicaux, interdits. Me François Zind, avocat d’Alsace Nature, explique :

« En faisant référence aux déclarations de différents témoins, les deux articles révèlent la présence au fond de la mine de déchets non conformes à la réglementation. »

Cette action s’ajoute au recours administratif déposé par le Conseil départemental du Haut-Rhin (devenu Collectivité européenne d’Alsace), la Région Grand Est, la commune de Wittenheim et Alsace Nature, contre l’arrêté autorisant le confinement définitif des déchets. Rejeté en première instance par le tribunal administratif de Strasbourg, il a été porté devant la cour d’appel administrative de Nancy, qui a clôturé l’instruction le 9 avril. L’audience devrait avoir lieu fin 2021.

La mine Joseph-Else est toujours en activité, afin de consolider et surveiller les galeries. Photo : JFG / Rue89 Strasbourg / cc

Le ministère veut confiner les déchets, qui polluerons alors la nappe phréatique

Rappelons que le 18 janvier, Barbara Pompili, la ministre de l’Écologie, a décidé que les 42 000 tonnes de déchets industriels ultimes de Stocamine (société détenue par l’État, ndlr) resteraient sous la nappe phréatique. Si tel est le cas, de l’arsenic, du cyanure ou encore de l’amiante contamineront inévitablement, un jour, la plus grande réserve d’eau souterraine d’Europe, malgré le confinement par le béton qui est prévu. Le ministère juge :

« Les avantages potentiels d’un déstockage complémentaire des déchets ne sont pas démontrés et celui-ci présenterait des risques significatifs pour les travailleurs, tandis que la réalisation du confinement dans des conditions optimales est indispensable pour assurer la protection de la nappe d’Alsace. »

Extrait du communiqué du ministère de la transition écologique

Me François Zind rétorque :

« On n’est même pas sûrs de ce qu’il y a dans la mine alors comment peut-on affirmer que les impacts de la pollution ne seront pas graves ? Il y a tellement de mensonges et d’incertitudes dans ce dossier. On ne peut plus avoir confiance, l’enjeu est trop grand. »

Pour Alsace Nature, « l’objectif de cette nouvelle démarche est notamment qu’un juge d’instruction se saisisse du dossier ». Me François Zind estime qu’il serait alors possible « qu’un inventaire complet des déchets stockés au fond de la mine soit enfin réalisé ». Si les fraudes étaient avérées, « cela permettrait d’engager les responsabilités pénales et civiles des différents acteurs impliqués ». L’association se dit « prête à saisir le juge des Libertés d’un référé pénal environnemental, si les travaux de confinement venaient à démarrer, empêchant le déroulement de l’enquête ».


#Alsace Nature

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