« Il y a un doute sérieux sur la légalité de la décision de stockage des déchets pour une durée illimitée, à triple titre. » Mardi 7 novembre, le tribunal administratif de Strasbourg a communiqué sa décision suite au recours d’Alsace Nature demandant la suspension de l’arrêté préfectoral du 28 septembre qui autorisait les travaux de confinement des déchets de Stocamine sous la nappe phréatique. Le juge des référés donne raison à l’association écologiste.
Il estime tout d’abord que la décision d’enfouir ces 42 000 tonnes de produits toxiques est « susceptible de méconnaitre l’article 1er de la Charte de l’environnement, qui dispose que “chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé”. Le juge administratif cite le préambule de l’article en question : « Les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins. »
Le tribunal administratif de Strasbourg considère également que l’opération de confinement des déchets est « susceptible de méconnaître l’article L. 211-1 du code de l’environnement relatif à la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ». Et enfin, il affirme qu’il n’est « pas justifié de ce que les déchets stockés dans le bloc 15 (zone la plus endommagée de Stocamine suite à un incendie, NDLR) ne pourraient être déstockés ». Pour rappel, l’État défend le confinement des déchets en arguant qu’il est devenu trop complexe de les extraire. Ce que contestent Alsace Nature et des experts qualifiés.
Une décision provisoire
Dans son ordonnance, le tribunal administratif évoque aussi l’enquête de la gendarmerie de l’environnement sur la nature des produits présents à Stocamine. Un travail d’investigation de Rue89 Strasbourg publié en septembre a mis en lumière de nombreux envois de déchets irréguliers dans ces galeries minières par l’entreprise Séché. Certains ont provoqué un incendie et la fin de l’activité du site en 2002.
Il s’agit d’un nouveau rebondissement dans le dossier de Stocamine. Un premier arrêté d’autorisation du confinement définitif avait été annulé en octobre 2021. L’État avait ensuite tenté de commencer le chantier prétextant qu’il ne s’agissait que de travaux préparatoires, mais Alsace Nature avait réussi à stopper les opérations grâce à des recours. Me François Zind, l’avocat de l’association, salue une « nouvelle décision de justice qui demande à l’État de revoir sa copie » :
« Il n’a pas démontré que le déstockage est impossible, cela nous conforte. Pour nous, c’est évident, l’extraction des déchets est la meilleure solution pour préserver la ressource en eau potable. Surtout, c’est une consécration du droit des générations futures, qui constitue une belle jurisprudence. C’est une première. »
La décision de ce 7 novembre est provisoire car le juge des référés avait été saisi en urgence par Alsace Nature. Une décision sur le fond sera prise dans plusieurs mois. « Les parties peuvent présenter un pourvoi en cassation contre cette décision devant le Conseil d’État, dans un délai de quinze jours », rappelle le tribunal administratif. Ce dernier enjoint au préfet du Haut-Rhin d’assurer la maintenance du site et de l’ensemble des galeries en attendant.
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