Il est arrivé seul sur scène, presque sur la pointe des pieds. Stanislas Nordey s’est introduit vendredi soir au TNS devant le public strasbourgeois sous de timides applaudissements. Censé prendre les rênes de l’institution à la rentrée, l’ancien directeur du centre national dramatique de Saint-Denis n’est pas encore officiellement en fonction, car Julie Brochen n’a pas remis sa démission comme le prévoyait un accord oral avec le Ministère de la Culture.
Avant d’entamer la présentation des pièces de la saison 2014/2015, Stanislas Nordey souhaite effectuer un court « préambule ». Rires dans la salle, un peu gênés tout de même. Le metteur en scène de 48 ans parle d’abord de sa passion pour le théâtre qui l’a menée jusqu’à la capitale alsacienne, lui qui avait déjà candidaté il y a six ans. Ce n’est pas sur ce point qu’il est attendu. Il entre ensuite dans le vif du sujet. Personne n’ignore qu’un conflit implique l’ancienne directrice Julie Brochen, officiellement encore en poste, et le ministère de la Culture. Il remercie l’ensemble des salariés pour leur travail dans ces circonstances, qui permettra à la saison de se dérouler.
Julie Brochen a décliné l’invitation
L’imbroglio est évacué avec professionnalisme, bien que l’on n’ait guère de nouvelles informations sur la suite. Stanislas Nordey doit, ce soir, se plier à un exercice que lui-même qualifie de « délicat » avant de demander un peu d’indulgence aux spectateurs. Il a la lourde tâche de présenter, voire de vanter, aux potentiels abonnés la sélection de celle qui l’empêche de prendre ses fonctions. Stanislas Nordey avait proposé à Julie Brochen de présenter ensemble cette nouvelle saison, mais celle-ci, en congé maladie, a refusé.
Treize acolytes, acteurs, metteurs en scènes ou administrateurs le rejoignent sur scène pour détailler la programmation 2014/2015. Le maître de cérémonie est davantage confiné à un rôle de passeur de plat. Il semble même découvrir les subtilités de certaines mises en scène. Dans l’assemblée, beaucoup de membres ou d’anciens du TNS. « Trop », souffle-t-on dans le public.
Dans la sélection des représentations, Stanislas Nordey en a tout de même choisi une : Le Canard sauvage de Stéphane Braunschweig, qui n’est autre que… le directeur du TNS entre 2000 et 2008. Il n’est pas présent sur scène pour cause de représentation, mais celui qui est parti au Théâtre national de la Colline à Paris, indique par le biais d’une vidéo pré-enregistrée qu’il est très heureux de retrouver Strasbourg, la première fois depuis son départ. Décidément, les (anciens) directeurs du TNS sont au cœur de l’attention.
« C’est un vrai bonheur pour moi d’être ici au TNS » Stanislas Nordey pic.twitter.com/rMyujxcFmw
— TNSThéâtreStrasbourg (@TNS_TheatrStras) 5 Septembre 2014
À l’issue des deux heures, pas de question dans la salle, pleine à craquer. Les habitués comme ceux sur scène étaient bien venus parler de théâtre, avec passion. Quelques classiques (Le Malade Imaginaire, Cyrano de Bergerac), beaucoup de pièces au caractère politique (Hyperion, Martyr, Z – le programme complet sur le site du TNS).
Nombre d’intervenants ont rappelé leur attachement à ce lieu. Comme pour indiquer que l’inertie du TNS est si forte qu’une querelle interne, même à son sommet, ne saurait l’enrayer. Ce soir, Stanislas Nordey n’a pu imprimer sa patte sur son futur terrain de jeu. Le moment est inopportun. Nul doute qu’il aura à cœur de changer cela au printemps, lorsqu’il devra présenter un projet pour le TNS, le sien cette fois.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : Les raisons de l’éviction de Julie Brochen du TNS
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