La Société d’aménagement et d’équipement de la région de Strasbourg (Sers) va lancer à la fin de la semaine un appel à projets pour finaliser le programme de réhabilitation de la Manufacture des tabacs, en plein centre de la Krutenau. Elle en est propriétaire depuis l’année dernière. L’aménageur public et la Ville de Strasbourg ont déjà arrêté trois projets pour le site : l’installation du pôle de géosciences de l’Université, d’une annexe de la Haute école des Arts du Rhin – ex-Arts Déco, et d’une auberge de jeunesse. L’appel de vendredi concerne les espaces encore vacants après ces projets.
Plusieurs projets d’économie sociale et solidaire sont déjà dans starting blocks pour candidater, avec le soutien municipal. Parmi eux, une épicerie bio en circuits courts et un pôle d’entreprenariat créatif. Celui-ci est porté par Accro, l’association d’action pour le développement des organisations créé en 2014 avec le soutien de la Ville et de l’Université de Strasbourg. Son plan est déjà bien avancé. En 2014, l’Accro envisageait déjà d’acquérir 4 500 m² dans la Manufacture, d’y faire des travaux, de les aménager et de les équiper pour un montant total de plus de 10 millions d’euros. Somme qu’elle prévoyait de financer par des subventions de l’Eurométropole, de l’Union européenne, de l’Etat et de la Région.
Quelle place va-t-il rester pour de nouvelles initiatives ? Un collectif d’habitants de la Krutenau portait l’ambition de créer de l’habitat participatif. La collectivité et les élus leur ont déjà signifié cette année qu’ils fermaient la porte à cette possibilité. Certains d’entre eux pourraient désormais rebondir sur l’appel d’offres de vendredi pour faire des propositions concernant l’économie sociale et solidaire…
Première vente début 2017 pour l’Université
La Ville a déjà posé une condition non négociable pour tous ces projets : qu’ils soient autofinancés. La Sers a acquis en septembre 2015 le site de la manufacture pour 9,5 millions d’euros. A terme, elle le revendra par lots aux porteurs des différents projets validés. En attendant, cette première année de propriété lui a déjà coûté de l’argent en études et entretien de la cour de la Manufacture. Quelle plus-value tentera-t-elle de retirer de son opération ? Les négociations pourraient être âpres.
La première transaction devrait se faire dès le premier semestre 2017 avec l’Etat pour les locaux dévolus à l’Université. L’installation du pôle universitaire de géosciences est le volet le plus avancé de la transformation du site. L’ouverture des nouveaux locaux de l’Ecole nationale de l’eau et de l’environnement (Engees) et de l’Ecole et observatoire des sciences de la Terre (Eost) est prévue entre fin 2020 et début 2021.
L’université a déjà retenu quatre équipes d’architectes pour un concours sur ses espaces. Le projet définitif sera connu à la fin de l’année. Il doit consister dans la réhabilitation d’une partie de 9 000 m2 de bâtiments existants et dans la construction d’une extension de 700 m2 pour accueillir plus de 1 000 étudiants, 130 chercheurs et une cinquantaine de personnels administratifs. Les activités de recherche de l’Engees vont nécessiter d’installer des halles industrielles avec une cuve de 50m3 et des circuits de distribution d’eau.
En plus de l’achat par l’Etat de la moitié du site, l’université prévoit une enveloppe de 15 millions d’euros pour ces travaux, financés par le plan Campus.
Mystère sur l’auberge de jeunesse
En ce qui concerne la HEAR, c’est la Ville qui sera à la manœuvre après avoir revendu les locaux annexes et la chaufferie de l’école, rue de la Manufacture des tabacs. L’école prévoit d’ouvrir ses nouveaux locaux à l’horizon 2020. Pour l’heure, elle s’en est tenue à « un travail très fin de réflexion sur les reports d’activités » dans ces futurs locaux, explique son directeur David Cascaro.
Le projet d’auberge de jeunesse reste le grand mystère du programme. Des habitants de la Krutenau ont déjà fait savoir au maire et aux élus qu’ils n’y sont pas favorables. Pour eux, le quartier est déjà un lieu de vie nocturne et ils craignent des nuisances supplémentaires. Alain Fontanel, premier adjoint (PS) au maire de Strasbourg, a promis qu’il s’agirait d’une auberge calme du type du Ciarus, situé derrière le tribunal d’instance. D’après les informations de Rue89 Strasbourg, aucun projet n’est encore arrêté quant à ce lieu, ni aucun périmètre du site affecté.
Le site bientôt inscrit à l’inventaire des Monuments historiques
En attendant que tous les occupants de la Manufacture soient connus, la Sers a déjà nommé en début d’année un architecte conseil, Antoine Oziol. Son rôle et de « veiller à la cohérence globale du bâtiment et surtout de son extérieur. » Il a réalisé en coopération avec la Direction régionale des affaires culturelles un cahier des charges de respect du patrimoine pour donner un cadre général des possibilités aux différents projets. Cet effort de la Sers anticipe la probable inscription de la Manufacture à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques.
L’association des habitants du quartier de la Krutenau avaient saisi les Monuments historiques en 2011 pour empêcher le site d’être transformé en logements de luxe par le promoteur Scharf Immobilier. Cinq ans plus tard, en juin 2016, la Commission régionale du patrimoine et des sites s’est enfin penchée sur la question : elle a voté à l’unanimité en faveur de l’inscription des façades, de la toiture et de la cheminée de la Manufacture ainsi que de son barreau Est, situé au fond de la cour. Le préfet n’a toutefois pas encore signé d’arrêté de protection définitif. S’il le fait, en plus d’Antoine Oziol, les travaux de la Manufacture seront placés sous la surveillance d’un architecte des bâtiments de France ou d’un conservateur des Monuments historiques.
Les travaux de l’Université sont prévus pour en juin 2018. En attendant, le site sert occasionnellement de lieu de stockage pour les équipes de tournage de cinéma de la région.
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