Lundi 16 avril, tous les étudiants de l’Université de Strasbourg ont reçu un e-mail qui correspondait à un vote en ligne à propos des blocages qui ont lieu sur de nombreux bâtiments du campus central, pour s’opposer à la réforme de l’orientation ORE, à cause de la sélection qu’elle induit.
Ce courrier électronique contenait un lien à usage unique (ce que nous avons pu vérifier) pour toute adresse étudiante de l’Unistra, y compris ceux en stage ou internes de médecine qui ne sont plus sur les campus en cette période d’examen.
Trois possibilités
Ce vote proposait trois possibilités : « J’approuve les blocages », « Je n’approuve pas les blocages » et « Je ne me prononce pas ».
Dans les résultats transmis par la direction mercredi 18 avril en début de de matinée, 16 272 étudiants ont participé : 11 696 ont voté « contre » les blocages, 3 000 « pour » et 1 576 ne se prononcent pas. Environ 35 000 étudiants sur les 51 000 au total n’ont pas voté, soit un taux d’abstention de 70%.
Pas de vérification possible
Le problème avec les votes électroniques, et ce n’est pas spécifique à ce vote de l’Université, c’est qu’ils n’assurent pas un décompte aussi transparent que les votes à main levée ou avec des urnes, où les différents camps peuvent assister au comptage. Lors de l’AG homérique qui avait voté d’une courte tête la levée des blocus, les pro-blocage avaient reconnu la sincérité du vote.
Il n’existe pas de moyen matériel ou technique de vérifier ce résultat ce qui ne favorise pas la confiance dans ce contexte déjà tendu. Surtout quand dans ce cas, la direction est à la fois juge (organisatrice) et partie (favorable à la loi). L’outil de vote a été mis en place par le service informatique de l’Université .
Un sondage boycotté par « les étudiants et les étudiantes en lutte »
Les « étudiants et étudiantes en lutte » avaient appelé dans un communiqué envoyé mardi, à boycotter ce vote :
« La question « êtes-vous pour ou contre les blocages » n’engage aucun débat sur le fond et surtout, c’est un sondage qui profite d’un déséquilibre d’information et de communication qui avantage grandement la présidence (favorable à la loi ndlr).
Les lycéens et lycéennes qui sont autant concernés que les étudiants ne peuvent y participer. »
Un de leurs membres, Camille (nom d’emprunt) est surpris par les résultats du sondage :
« C’est énorme, 3 000 étudiants se sont tout de même prononcés en faveur des blocages alors que l’Assemblée générale des étudiants de Strasbourg avait appelé au boycott. C’est quand même une décision lourde à prendre que de dire « oui » aux blocages dans un sondage organisé par l’université. »
Les étudiants « en lutte » n’étaient pas convaincus par la garantie de l’anonymat, à cause du lien lié à une adresse e-mail personnelle.
Gabriel, autre étudiant, embraye :
« Un vote doit être fait après s’être assuré que les informations à son sujet ont bien été transmises. Sinon cela n’est pas démocratique. Ici, on a juste un sondage qui vient sans la moindre transmission d’informations préalable. »
Le président de l’Université, Michel Deneken, s’appuie au contraire sur ce résultat pour demander la levée du blocage :
« J’appelle aujourd’hui les étudiants attachés à la démocratie à reconnaître votre expression, à entendre ce résultat et à lever les blocages pour permettre à tous, étudiants et membres du personnel, de travailler dans des conditions de sérénité que tous méritent.
La levée des blocages permettra aussi à ceux qui le souhaitent de reprendre ensemble, dans le respect mutuel, la réflexion sur la loi « Orientation et Réussite des Étudiants » et son application à l’Université de Strasbourg. »
Déblocage et reblocage dans la nuit de mardi à mercredi
Mardi 17 avril, vers 23h, soit avant le résultat, des étudiants de l’Uni, syndicat d’étudiants classé à droite se sont alliés à des étudiants d’Action Française, mouvement politique royaliste (qui représentaient un tiers de la quarantaine de personnes sur place d’après eux), et d’autres étudiants apolitiques, pour débloquer les bâtiments a constaté un de nos journalistes sur place. Des JAM, « jeunes avec macron » étaient également présents en « rôle d’observateur ». Ceux-ci participaient tout de même en prenant part aux conversations pour organiser le déblocage.
Comme à l’accoutumée, des agents de sécurité missionnés par l’Université étaient également présents sans intervenir. Quelques heures plus tard, mercredi 18 avril, des « étudiants et étudiantes en lutte » ont à nouveau bloqué une demi-douzaine de bâtiments dont Le Patio et Nouveau Patio, le Palais universitaire ou le Portique.
Une Assemblée générale des étudiants se tient depuis 10h30 sur le campus à suivre en direct sur Rue89 Strasbourg
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