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Pour la rentrée 2023, un rectorat enjoué, des syndicats inquiets

À quelques jours de la rentrée, Olivier Faron, recteur de l’Académie de Strasbourg, a donné sa conférence de presse annuelle, se montrant enthousiaste et rassurant. Les syndicats craignent pourtant le manque d’enseignants formés ainsi que des classes surchargées.

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« Lundi matin, tous les élèves des 745 écoles du Bas-Rhin auront bien un professeur face à eux ». Jean-Pierre Geneviève, Directeur académique des services de l’éducation nationale du Bas-Rhin (Dasen), est catégorique. Dans certaines écoles même, il y aura trop de professeurs selon lui. Côté syndicat pourtant, l’estimation est différente. Un enseignant par classe lundi matin ? « On n’en sait rien », tranche Géraldine Delaye, secrétaire générale du syndicat FSU 67. « En tous cas en 2022, ce n’était pas le cas ».

Entre l’engouement du recteur d’académie et les craintes exprimées par la syndicaliste, l’écart est colossal. D’une part, l’institution affirme être guidée par la réussite de « ses » jeunes et se félicite d’un taux d’inscription au concours de professeur des écoles en hausse de 15%. De l’autre, on parle de l’épuisement des personnels éducatifs, l’impression criante d’un manque de reconnaissance et des démissions de plus en plus fréquentes.

21 postes d’enseignants en moins à la rentrée 2023

« Le ministère estime qu’il y aura 527 élèves en moins dans le Bas-Rhin en 2023, donc 21 postes ont été retirés », poursuit Géraldine Delaye. « Le souci, c’est que les prévisions démographiques ne collent quasiment jamais à la réalité du terrain », conclut-elle. Le nombre définitif de classes pour l’académie sera déterminé au courant du mois de septembre, en fonction du nombre d’enseignants mobilisables.

Pour le moment, le rectorat de l’académie indique que 748 classes seront ouvertes dans le premier degré (maternelle et primaire) et 129 dans le secondaire (collèges et lycées). « Si besoin, huit à neuf classes supplémentaires pourraient ouvrir », précise Géraldine Delaye qui craint des classes surchargées dans des établissements situés à Bischheim ou Schiltigheim.

La carte scolaire se fait en trois temps – janvier, juin et septembre – et permet d’adapter au mieux le nombre de classes pour éviter les effectifs trop importants. « Il faut 29 élèves en moyenne pour ouvrir une classe », précise-t-elle.

L’un des objectifs du ministère pour la rentrée 2023 est d’atteindre en moyenne 24 élèves par classe pour les classes de grande section, CP et CE1. « En moyenne », précise bien Jean-Pierre Geneviève. Ce qui signifie que pour les niveaux supérieurs, l’effectif peut être bien plus élevé.

Liste complémentaire et pacte enseignant

Parmi les problématiques que doit résoudre l’académie, celle des remplacements est redondante. Là aussi, le ministère fait des remplacements de courte durée l’une de ses priorités. Certains enseignants seront recrutés sur la « liste complémentaire », explique le Dasen, ce qui représente 73 personnes, précise Géraldine Delaye.

« Le pacte enseignant, qui est un engagement volontaire, permettra également de répondre à ce besoin de remplaçants en coordination avec les chefs d’établissement », poursuit Olivier Faron, recteur de l’académie. Présenté comme une « opportunité » pour les enseignants, ce pacte prévoit que les personnels de l’éducation nationale, enseignants ou administratifs, puissent ajouter à leurs missions d’autres charges de travail et être rémunérés en conséquence.

Olivier Faron (au centre), recteur de l’académie de Strasbourg, s’est voulu rassurant lors de la conférence de presse de rentrée vendredi 1er septembre 2023. Photo : CB / Rue89 Strasbourg / cc

Un pacte « très marketing » selon Géraldine Delaye :

« Dans les classes de primaire et de maternelle, les enseignants sont devant leurs élèves toute la journée. S’ils remplacent un collègue, c’est leur classe qui se retrouvera sans professeur. De même au collège, on ne s’improvise pas prof de math si on enseigne l’histoire géographie ! »

Côté académie pourtant, tant le recteur que ses directeurs se montrent optimistes. « On observe une forte mobilisation des enseignants et nous estimons à plus de 30% celles et ceux qui sont volontaires pour une mission ou plus », explique Nicolas Feld-Grooten, directeur académique des services de l’éducation nationale du Haut-Rhin.

Des contractuels pour les cours d’allemand

Selon lui, la seule tension sur le nombre d’enseignants se situe dans les voies bilingues. « Surtout dans les écoles primaires et maternelles », explique-t-il, liant cette carence au faible nombre d’étudiants en langue allemande dans les universités. Pour pallier, là-aussi, au manque de personnel, on a pensé à une autre méthode : embaucher des personnels contractuels, c’est-à-dire des employés en CDD qui n’ont pas passé le concours de professeur des écoles.

« On sait que l’académie a une enveloppe dédiée pour leur embauche », poursuit Géraldine Delaye. « Le problème, c’est qu’ils sont formés pendant trois jours, mais on ne devient pas enseignant en seulement trois jours. »

Selon Olivier Faron en Alsace, 2 à 3% des enseignants sont contractuels dans le primaire, 7 à 8% dans le secondaire. « Nous sommes dans la moyenne nationale », précise-t-il.

Des capsules vidéo en cas d’absence ?

Dernière solution décrite en cas d’absence de professeurs : le recours à des outils éducatifs en ligne, publiés par le Centre national de l’enseignement à distance (Cned). « C’est tout de même le premier lycée de France », lance le recteur, avant de préciser que cette solution devrait être mise en place de façon exceptionnelle.

« Nous avons rencontré les syndicats de parents d’élève pour les rassurer : il s’agit d’une démarche pédagogique et en aucun cas de remplacer les professeurs par des vidéos. »

En cas d’absence « anticipée » ou à cause d’une « contrainte très forte », le recours à des outils numériques sous la surveillance d’assistants d’éducation (AED) pourra donc être mis en place. Mais « uniquement pour des cas très particuliers », souligne à nouveau Nicolas Feld-Grooten.

Aucun chiffre sur les élèves sans abri

Interrogés sur la situation très particulière des élèves sans domicile fixe, que Rue89 Strasbourg estimait à 50 à Strasbourg en juin 2023, après avoir enquêté auprès des directeurs d’école, Olivier Faron et Jean-Pierre Geneviève ont rapidement éludé la question. S’ils trouvent le nombre de 50 « élevé », ils n’ont pas d’estimation à donner, un chiffre qu’ils estiment « difficile » selon eux à établir.

Mais le recteur assure pourtant, « suivre de très près » la situation et « répondre aux sollicitations des chefs d’établissement ». Il évoque également une collaboration avec la préfecture dans certains cas. « Une dizaine d’assistantes sociales travaille par ailleurs avec la Collectivité d’Alsace (en charge de l’aide sociale à l’enfance, ndlr) pour ces situations », précise de son côté Nicolas Feld-Grooten (Dasen du Haut-Rhin).


#rentrée

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