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Rencontre avec Barthélémy Toguo à la Chaufferie

Barthélémy Toguo, artiste camerounais d’envergure internationale, et qui suscite actuellement l’admiration de certains, s’est installé à La Chaufferie le temps de l’événement “Hémisphères vodous”. Retour sur cette exposition avec l’artiste.

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Barthélémy Toguo devant The House of Secrets, 16 janvier 2014. (Photo: Antoine Lejolivet / Haute École des Arts du Rhin)

L’exposition s’ouvre sur un étrange dispositif. L’installation intitulée The House of Secrets se compose de trois maisons en tôle rouillée, sans portes ni fenêtres. Seuls des trains en bois sortent de ces maisons, et tournent en petits circuits fermés.

« Ces trains représentent cette présence industrielle de l’Occident, dans ces territoires où le mystère et le vodou existent”. “Là on est aussi dans l’exploitation du sous-sol africain. »

Poupées africaines recouvertes de perles et autres objets du quotidien sont accrochés aux maisons. Au sol, de la ouate entoure les maisons tandis qu’une moustiquaire gigantesque qui descend du plafond vient fermer le dispositif, ne laissant aucune autre issue au spectateur que celle de contempler l’oeuvre au travers de ce rideau de tulle percée qui fait écran.

Vue de l’installation The House of Secrets de Barthélémy Toguo, 2014. © Barthélémy Toguo. (Photo: Antoine Lejolivet / Haute École des Arts du Rhin)

La production artistique de Barthélémy Toguo est kaleidoscopique, plurielle et hybride. L’installation n’est qu’un des nombreux langages artistiques utilisés par l’artiste, qui est aussi photographe, vidéaste, performeur et dessinateur.

« Ce qui me plait c’est la mise en scène ».

L’installation The House of Secrets est un espace complexe avec des histoires. Une sorte de support en soi qui accueille d’autres supports. Le langage artistique de Barthélémy Toguo comprend-il ? plusieurs dimensions ? Est-il un assemblage de plusieurs cultures, de plusieurs mystères ?

L’artiste est chef d’orchestre. Ses installations activent de nombreux éléments et réunissent les différents modes d’expression de l’artiste. Une consommation vorace de matériaux riches en textures et un vocabulaire récurent – je pense notamment à la moustiquaire et au coton – font que ses oeuvres ont une véritable efficacité visuelle. Barthélémy Toguo produit des images de sa propre réalité.

Il le dit lui-même :

« Généralement dans mon travail beaucoup de ressentis se côtoient : la violence côtoie le plaisir, le plaisir côtoie la laideur, la laideur côtoie la solitude, comme ici le beau côtoie l’exploitation du sous-sol qui côtoie le mystère du vodou. »

Oscillations entre références africaines et occidentales

Y aurait-il de l’eau à exploiter dans le sous sol ? La présence de bouilloires en plastique neuves tendent à suggérer cette idée. Dans cette installation, l’artiste paraît osciller entre références africaines, occidentales, et entre propositions personnelles, politiques et sociales, en rapport avec son vécu, son expérience. Il réagit au problème nord-sud de la diaspora en mélangeant éléments modifiés, éléments créés, et sorte de ready-made.

Selon ses propres mots “c’est un mélange de tout, de ressentis humains et des problèmes qui font partie de la vie. La mort fait partie de la vie, la beauté fait partie de la vie, l’exploitation de l’Homme par l’Homme fait partie de la vie, et c’est ça cette installation”.

Vue de l’installation The House of Secrets de Barthélémy Toguo, 2014. © Barthélémy Toguo. (Photo: Antoine Lejolivet / Haute École des Arts du Rhin)

Avec une telle proposition, Barthélémy Toguo dépasse les frontières, mettant en exergue cette idée de transculturalisme. “Je prône plutôt la paix et l’amour des religions et non la guerre dans laquelle on vit aujourd’hui”. Quel que soit le médium que l’artiste utilise, son oeuvre traite de questions politiques et sociales et porte en elle les blessures de l’histoire, la question des frontières, de la guerre et des inégalités sociales.

“C’est une bibliothèque de différents ressentis, une bibliothèque de la vie. Mes installations et mon travail sont comme les illustrations de notre vie (…) dans mon travail beaucoup de choses se côtoient et expriment ce qu’est la vie.”

Propos recueillis par Cécile R. et Anaïs Roesz le 16 janvier 2014.

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