19h37, le 24 avril, Marcel Kuhn, opposant convaincu à la construction de l’autoroute payante du Grand contournement ouest (GCO) de Strasbourg, reçoit un mail de la part de la municipalité de Mundolsheim : la manifestation censée se tenir le lendemain matin à partir de 7h est interdite pour des raisons de sécurité. Cet ancien secrétaire de mairie à la retraite reconnait immédiatement la non-conformité d’un tel arrêté, communiqué trop tard, uniquement à lui et affiché nulle part.
Avec Patrick Oudhart, policier à la retraite, anciennement en charge de la sécurité dans les manifestations, et Elisabeth Dupeux, conseillère conjugale et ancienne gréviste de la faim contre l’autoroute payante, ils avaient déclaré ce mini-rassemblement dans les délais. Les anti-GCO avaient déjà réalisé 22 événements similaires. Ceux-ci s’intitulent « action pont » et plusieurs étaient prévues ce jour-là. Le principe est d’afficher des banderoles sur un pont au dessus des autoroutes A4, A35 ou A351, le matin à l’heure de pointe, « pour sensibiliser les automobilistes aux divers problèmes que causera le GCO. »
Le 25 avril au matin, ils décident tout de même de manifester à Mundolsheim, tout comme d’autres opposants se rendent à Ostheim (Haut-Rhin) près de Colmar qui n’a pas pris d’arrêté de la sorte. Quelques minutes après leur arrivée, des gendarmes présentent l’arrêté municipal aux six militants sur place. Les activistes se conforment aux instructions des forces de l’ordre et décident de partir. Les gendarmes arrêtent tout de même les trois personnes qui ont déclaré le rassemblement. La procureure décide de les poursuivre.
Relaxés mais pas indemnisés
Mardi 14 octobre, selon des témoignages de personnes présentes dans la salle d’audience au tribunal correctionnel, Florence Dole, l’avocate des anti-GCO, insiste immédiatement sur la non-conformité de l’arrêté municipal. Elle soutient également que « la liberté de manifester est fondamentale et que seules des raisons valables peuvent empêcher un rassemblement de ce type. Il n’y avait aucun trouble à l’ordre publique et aucun problème de sécurité. »
Quand vient le tour de la représentante de la procureure, elle reconnait l’irrégularité de la notification. Elle plaide la relaxe collective pour les deux motifs de poursuites, le délit « d’organisation de manifestation interdite », ainsi que l’affichage de banderoles sur les gardes corps d’un pont. Elle précise néanmoins que ces banderoles peuvent déconcentrer les automobilistes. Me Dole rétorque qu’il s’agit d’un moment de la journée où les véhicules sont quasiment à l’arrêt.
Comme la procureure, elle demande logiquement la relaxe de ses clients, mais aussi une indemnisation à hauteur de 500 euros par prévenu pour les frais engagés à cause de la poursuite. Le délibéré est prononcé immédiatement : l’arrêté qui interdisait la manifestation est annulé et les militants sont relaxés. En revanche l’indemnisation est refusée.
À l’issue de l’audience, Me Florence Dole insiste sur l’aspect « politique » des poursuites :
« Les mairies ont pris un tel arrêté à cause de leur position sur le GCO (Vendenheim avait pris un arrêté similaire notifié plus tôt, aucune manifestation ne s’était tenue). Les poursuites sont aussi politiques, pour décourager les manifestants en Alsace. Elles ont eu lieu quelques jours après la promulgation de la loi dite « anti-casseurs ». »
L’avocate des militants anti-GCO ajoute « se réserver le droit de faire appel » pour obtenir l’indemnisation de ses clients.
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