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La Région Grand Est interpellée par des manifestants chinois sur l’arrivée de Huawei

Venus de plusieurs villes de France, des ressortissants chinois de plusieurs régions et opposés au régime communiste ont appuyé l’association Initiative citoyenne, contre l’implantation d’une usine Huawei à Brumath.

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Une centaine de personnes s’est réunie face au conseil régional du Grand Est. Dans la foule, une majorité de ressortissants du Tibet, du Turkestan oriental, la région où vivent les Ouïghours aussi appelée Xinjiang, de Mongolie, de Taïwan. Tous sont en France depuis des années et n’ont plus ou peu de contact avec leur famille.

Arrivé en 2011 en France pour ses études, Arman (prénom modifié à sa demande) n’est plus retourné auprès des siens depuis 2013. « Parmi les 24 raisons pour arrêter des Ouïghours, il y a le fait d’avoir voyagé en Europe », indique ce parisien de l’association Ouïghours de France. À sa connaissance, sa famille est « dehors mais pas en camp » de travail. Mais il n’a plus de contact direct depuis trois ans. La raison de sa présence ? « Huawei a développé une technologie de reconnaissance faciale contre les Ouïghours ». Pour un autre ressortissant, habitant à Strasbourg depuis 12 ans, la récente médiatisation de la cause ne le satisfait pas. « Beaucoup de pays en parlent plus qu’avant, mais il n’y a pas d’action ». Il raconte avoir « reçu des appels d’intimidations de policiers chinois, parfois avec des numéros français ».

Les drapeaux bleus représentent le Turkestan, une région peuplée par la minorité Photo : JFG / Rue89 Strasbourg
Plusieurs ressortissants tibétains sont aussi venus protester contre le régime chinois. Photo : JFG / Rue89 Strasbourg

Venue de Dijon, Huizen est restauratrice de spécialités « taïwannaises, mais présentées à l’européenne ». Habitant en France depuis 1990 et mobilisée depuis 2005, elle estime qu’il est crucial « d’informer les politiciens » :

« Huawei est soutenue par le Parti communiste chinois. Si on tient à nos libertés, il ne faut pas se laisser infiltrer par le régime. Cela ne concerne pas que nous les Chinois, mais tout le monde. »

Plus nombreux, des membres du mouvement spirituel Falung Gong arborent de grandes banderoles. Une édition spéciale de The Epoch Times, journal controversé et proche de ce groupe, est abondamment distribuée. Beaucoup de participants citent aussi le documentaire « Complément d’enquête » sur la grande offensive de la Chine. Alain Tong, le président de l’association française Falung Gong raconte son combat :

« J’habite en France depuis 1979. Le Falung Gong est une pratique de relaxation comme le tai-chi ou le yoga inventée en 1991. Je l’ai apprise à l’ambassade de Chine ! Mais comme cela a eu du succès dans les années 1990 avec des millions d’adeptes en Chine, le régime l’a diabolisée et persécutée. Il n’y a plus de culture chinoise en Chine, seulement celle du régime communiste. »

Les ressortissants chinois auraient aimé mobiliser des expatriés de Suisse ou d’Allemagne, mais la crise sanitaire interdit ces déplacements entre pays.

Alain Tong, président de Falun Dafa France. Photo : JFG / Rue89 Strasbourg

Peu de jeunes, mais déterminés

À la pointe de la défense du peuple Ouïghours, le député européen du mouvement « Place publique » Raphaël Glucksmann (lire son interview) insiste sur la mobilisation de la jeunesse pour cette cause. En ce jeudi hors vacances scolaires, à 11 heures du matin, ils n’étaient qu’une vingtaine sur la place Adrien Zeller.

Pour Kevser, en stage après un BTS Commerce, c’est sa « première manifestation ». Elle a voulu exprimer sa « solidarité avec des peuples musulmans persécutés, mais aussi d’autres religions comme les Chrétiens d’Orient ». Elle est accompagnée par Mokhtar, travailleur social « au long passé militant ». « On attend des actions de l’Union européenne », ajoute-t-il.

Kevser et Mokhtar font partie des plus jeunes manifestants. Photo : JFG / Rue89 Strasbourg

Autre jeune, Ariane, l’une des fondatrices du collectif « Strasbourg for Uyghours » créé fin janvier. « Nous sommes une quarantaine de membres actifs de 16 à 30 ans », explique-t-elle. « On nous enseigne la Shoah à l’école, mais pas ce qui se passe pour les Ouïghours », s’étonne celle dont c’est l’un des premiers engagements structuré.

Le jeune collectif Strasbourg for Uyghours était présent à la manifestation. Photo : JFG / Rue89 Strasbourg

Lettre à Jean Rottner

Venue de Bordeaux, la présidente de l’association « Initiative citoyenne » organisatrice de l’événement, Brigitte Guiraud a déposé une lettre ouverte à l’attention du président de la Région Grand Est, Jean Rottner (LR). Elle a été reçue plus d’une demi-heure par son directeur de cabinet, Alexandre Mora. « Je les ai sentis plus préoccupés que je n’aurais imaginé sur cette question des droits de l’Homme. Cela les interroge et ils veulent se renseigner davantage », indique-t-elle à la sortie de son entrevue. La réponse souvent opposée dans les débats sur les implantations contestées (comme pour Amazon) est « si c’est n’est pas ici, ce sera ailleurs ». Ce à quoi Brigitte Guiraud répond : « Les États-Unis, le Royaume-Uni, la Finlande ou l’Australie ont refoulé Huawei. D’autres entreprises peuvent faire l’affaire ».

La militante a adressé ses arguments à l’entourage de Jean Rottner, président de la Région Grand Est. Photo : JFG / Rue89 Strasbourg

La manifestation s’est prolongée devant l’institut Confucius rue du Maréchal Foch, avec une soixantaine de personnes. Cette journée d’action a été remarquée par le Consulat de Chine, au point de publier un communiqué. Il vilipende « l’utilisation des jeunes qui ne connaissent pas la vérité ». Et précise que le Xinjiang et le Tibet sont « prospères et stables », où « tous les groupes ethniques vivent et travaillent dans la paix et le contentement ». Une perception bien différente de celle de la diplomatie française. Le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a qualifié le 24 février les agissements dans cette région de « pratiques injustifiables à l’encontre des Ouïghours, et d’un système de surveillance et de répression institutionnalisé ».


#Brumath

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