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Rappeur de 14 ans de Hautepierre, EHM a déjà sorti ses premiers morceaux

À 14 ans, EHM, originaire du quartier de Hautepierre, a sorti le 22 mai sa première mixtape de dix titres : « La Zone ». Un projet né de la collaboration avec La Ruche, le studio associatif de Horizome, qui valorise les talents du quartier. Objectif pour EHM : être repéré et signer dans un label.

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Son nom d’artiste vient s’ajouter à la longue liste des artistes rap issus de Hautepierre : Moxxx, Sparrow, Djaz Djam’s, Marginal Tieks, 17Binks, James Gordon… À 14 ans, EHM a sorti le 22 mai son premier projet, « La Zone », une mixtape de dix titres dans laquelle le jeune rappeur jongle entre rimes et de lourdes instrus de style « trap », un courant musical né aux États-Unis au début des années 2000. Le projet a été réalisé en collaboration avec La Ruche, le studio d’Horizome, l’association implantée depuis dix ans à Hautepierre. Pendant un an, l’association a accompagné le jeune rappeur dans la réalisation de son projet. 

De son vrai nom Ephraïm Miguel, EHM explique avoir eu le déclic pour le rap en écoutant rapper son cousin, membre du duo 17Binks, : 

« Je me suis dit : moi aussi je peux et je veux faire ça. Quand j’écoute une instru, l’inspiration et les mots arrivent tout seuls. »

« Je raconte tout ce qui se passe en bas de chez moi »

EHM a opté pour un style épuré, et une manière de poser sa voix sur le rythme en phase avec la tendance actuelle. Des phrases courtes et des punchlines qui marquent l’auditeur. Le jeune hautepierrois dit volontiers s’inspirer des groupes et artistes qu’il écoute à l’instar des parisiens Koba LaD, 4Keus ou CG6.

Lui qui a grandi au cœur de la maille Karine n’a qu’à regarder par la fenêtre de sa chambre pour trouver l’inspiration. « Je raconte tout ce qui se passe en bas de chez moi », pose-t-il simplement. Quand on lui demande d’en dire un peu plus, il lâche un sourire gêné : « le deal, les courses-poursuites, la police, la vie au quartier… ». Des thèmes récurrents dans les sons de rap francophones que le rappeur belge Damso a théorisé dans le morceau « Comment faire un tube ? » (2015) : « Faut parler de drogue, de sexe, de sky, de maille ».

À 14 ans EHM a enregistré sa première mixtape au studio La Ruche, de l’association Horizome. (Photo OG / Rue89 Strasbourg / cc)

Pas de textes sur sa vie personnelle, dont il parle très peu en interview, mais EHM indique qu’il ne s’interdira pas d’évoquer le racisme ou les violences policières dans ses futurs morceaux.

D’autres jeunes rappeurs strasbourgeois, MNG et RND, de Cronenbourg, partagent le micro avec EHM. Trois lettres pour un nom de scène minimaliste et efficace, une tendance répandue parmi les artistes rap ou les noms de groupes : les pionniers NTM ou IAM, ou plus récemment SCH, JUL…

Une démarche déjà professionnelle

La connexion avec Horizome et le studio La Ruche, ouvert en 2018, s’est faite naturellement. L’association propose des sessions gratuites les mercredis après-midi pour les jeunes du quartier qui souhaitent enregistrer leurs sons.

C’est dans ce cadre que EHM est passé derrière le micro : 

« C’est là que j’ai enregistré tous mes sons. Je commençais à en avoir pas mal et je voulais faire des clip vidéos mais je me suis dit que diffuser plein de clips, ça allait être trop d’un coup. Alors avec Grégoire, on a décidé de faire une mixtape. »

Grégoire Zabé, plasticien et designer, membre d’Horizome, a un joué le rôle d’ingénieur du son. Avec Stéphane, un hautepierrois de 20 ans, il a encadré EHM tout au long de l’enregistrement de la mixtape : 

« Ce qui était impressionnant c’est que EHM et Sam étaient déjà hyper pros. En une session de deux heures de studio, l’enregistrement était hyper facile. On a rapidement eu 15 à 20 titres. La démarche était assez professionnelle. »

Près de 8 000 streams

Lors des sessions studios, EHM était accompagné d’Abdoul, son « manager » âgé de 15 ans, scolarisé au collège Truffaut. Après s’être lui aussi essayé au rap, « sans succès », sourit-il, l’adolescent a préféré encadrer et gérer la potentielle carrière de son ami : 

« J’ai vu qu’il avait du potentiel, qu’il était doué en freestyle (rapper en improvisant sur une mélodie, NDLR). Et vu qu’on était déjà meilleurs potes, je me suis dit qu’il avait besoin d’aide pour se lancer. »

Derrière Abdoul, les fenêtres du studio La Ruche où a été tagué « HTP Gang », l’identité musicale de Hautepierre (Photo OG / Rue89 Strasbourg)

Pendant les enregistrements, c’est Abdoul qui le structure, l’oriente et le conseille sur les textes et la manière de rapper. Les deux ados n’ont rien eu à dépenser : Horizome a acheté les « type beat » (une instrumentale influencée par un artiste, une chanson connue) pour environ 300 euros. Les revenus des « streams », générés sur les plateformes d’écoute, devraient servir à rembourser cette somme.

Depuis sa sortie le 22 mai, « La Zone » a été streamée près de 8 000 fois. Un score honorable pour EHM qui a aussi signé un contrat de distribution avec Horizome : l’association, en tant que label, traite directement avec les plateformes.

L’espoir de signer en major

Mais pour Grégoire Zabé, qui a passé un des deux mois du confinement à peaufiner les arrangements musicaux du projet, cette mixtape est aussi une forme d’alibi : 

« La musique est un prétexte pour prendre confiance en soi. La mixtape est une manière de mener un projet de A à Z et acquérir plus de compétences. »

Comme d’autres à Strasbourg, EHM a suivi l’ascension du rappeur Larry, originaire de l’Elsau, qui a signé en maison de disques en 2019 et dont les clips cumulent des millions de vues sur YouTube. Lui et son manager espèrent aussi être repérés et signer avec un label professionnel.


#Hautepierre

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