L’enquête de police avait été rapidement bouclée mais la procédure judiciaire aura pris son temps. Après deux reports, le procès de l’ancien directeur de la Maison des associations est prévu mardi 8 décembre devant le tribunal correctionnel de Strasbourg. Patrick Gerber, 57 ans, est accusé de harcèlement sexuel sur deux ex-employées et sur une stagiaire de l’UFC – Que choisir 67, association hébergée dans la structure de la place des Orphelins.
L’affaire avait été révélée par Rue89 Strasbourg. Ces trois jeunes femmes avaient eu à subir les gestes déplacés, les propos sexistes et les comportements intrusifs de Patrick Gerber, pendant plusieurs mois pour Louise et Nathalie, les deux ex-salariées alors âgées de 28 et 35 ans, et pendant une seule journée, traumatisante, pour Isabelle, alors âgée de 25 ans.
« Hâte que cette histoire se termine »
Elles ont toutes les trois porté plainte pour harcèlement sexuel. Louise a déménagé à l’autre bout de la France. Elle a fait le voyage pour être présente à l’audience de mardi :
« Le monde associatif strasbourgeois est tout petit… J’avais l’impression que l’ombre de M. Gerber planait sur chaque mission potentielle… J’ai préféré partir et j’ai bien fait, ça m’a permis de me reconstruire. »
Louise se dit « un peu tendue » mais elle a « hâte que cette histoire se termine, » d’autant que le volet social de l’affaire, devant le tribunal des prud’hommes, attend la décision du tribunal.
Isabelle a repris sa vie d’étudiante. Elle s’est « réinscrite aux concours » après une année de découragement et de dépression :
« Je relis le dossier et tout ça est encore très vif. J’ai très très peur de ne pas pouvoir supporter qu’on m’explique que ces gestes “n’étaient pas si graves” ou ce genre de truc… Je redoute l’audience, dans la mesure où elle sera quasiment à huis-clos à cause du Covid. J’aurais apprécié d’avoir le soutien de mes proches dans la salle. »
Un procès pour la cause
Les victimes espèrent que l’audience permettra de faire progresser la lutte contre le sexisme. L’association contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) s’est constituée partie civile. Juriste de l’association, Marylin Baldeck détaille :
« Pour les victimes, il est important que ce procès rejaillisse collectivement. Nous sommes là pour les soutenir et amplifier leur voix. Je note que l’enquête dans ce dossier a été exemplaire et complète, ce qui est très rare dans ces affaires, et qu’elle montre à quel point des remarques et des regards permanents sur ces femmes peuvent rendre impossible le travail dans ces conditions. »
Si l’enquête est aussi complète, c’est parce que Me Thomas Steinmetz, l’avocat de l’ancien directeur, a demandé un supplément d’information qui a été accordé par le tribunal. Mais pour Me Amandine Rauch, avocate de deux des trois victimes, l’effet boomerang de ces nouvelles auditions sera terrible :
« M. Gerber a cité plusieurs personnes en pensant qu’elles viendraient à son secours et il n’en a rien été. Sa plus proche collaboratrice parle de lui comme d’un “harceleur moral en puissance.” Deux autres anciennes collègues ont décrit les mêmes mécanismes, déjà présents plusieurs années auparavant dans une autre association… »
Contacté, l’avocat de Patrick Gerber, Me Thomas Steinmetz, n’a pas souhaité faire de déclaration avant l’audience de mardi.
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