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Pourquoi il n’y a pas toujours de Carola sur la carte

Pas de Fischer dans un bar ni de Carola, mais plutôt de la Meteor et du Perrier… que l’on ne retrouvera pas deux rues plus loin. Pourquoi peut-on boire certaines boissons dans un restaurant ou un bar et pas dans un autre ? Tout est une histoire de distribution et de préférences, les vôtres.

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À l’Happy Hours, on ne sert pas de San Pellegrino ni de Badoit mais de la Carola et du Perrier. (Photo NM / Rue89 Strasbourg / cc)

C’est une scène que l’on a tous vécue : « Une carola rouge s’il vous plaît ! », « Non désolé, nous avons du Perrier ou de la San Pellegrino » « Bon bah, Perrier alors. » Pourquoi ne peut-on trouver dans chaque bar de Strasbourg une eau produite à Ribeauvillé, au profit de flottes produites à des centaines de kilomètres ?

C’est simple : la plupart des bars et restaurants se fournissent directement chez un distributeur qui détermine les boissons proposées sur une carte. Certains bars fonctionnent en exclusivité avec ces distributeurs, ce qui leur permet de bénéficier de diverses remises. D’autres décident d’éviter ce circuit et se retrouvent donc avec des marques indépendantes avec qui ils prennent contact directement : la brasserie Uberach par exemple.

D’autres encore optent pour les deux systèmes, ce qui leur permet à la fois de satisfaire les envies d’incontournables de la boisson et de proposer des petits plus qui font la différence. Un autre cas de figure se présente encore : lorsque les bars ou restaurants se fournissent chez Métro, qui propose également un système de livraison.

Le choix de l’un ou l’autre distributeur dépend surtout du coût de revient, de la réactivité et des conditions de paiement : un restaurateur préférera toujours un distributeur ou un fabricant lui permettant de régler sous 60 jours par exemple, le souci des exploitants étant surtout de préserver leurs trésoreries.

Un système finalement assez opaque, autant vis-à-vis du fonctionnement que des prix, hérité d’une mauvaise réputation : les patrons de bar et distributeurs ont longtemps été soupçonné de négocier « sous le manteau ».

Deux distributeurs se partagent les bars de Strasbourg

À Strasbourg, deux distributeurs se partagent le marché : France Boissons et l’Alsacienne de Boissons. La première, leader sur le marché national, est une filiale du groupe Heineken et possède trois entrepôts en Alsace. La seconde, régionale de l’étape, est détenue par Dominique Kennel et Francis Gineste et n’est implantée que sur un seul site, à Mundolsheim. Ces intermédiaires fournissent la plupart des boissons aux établissements de restauration.

Chacun des distributeurs propose l’ensemble des grandes marques nationales de boissons. Une sélection de produits, propre à chacun d’entre eux, vient gonfler le catalogue. C’est le cas à l’Alsacienne de Boissons, dirigée par Francis Gineste :

« Nous faisons entrer de nouvelles références en fonction des demandes de nos clients qui nous souhaitent parfois proposer des produits spécifiques. C’est ce qui nous amène, par exemple, à avoir aujourd’hui 80 références de whiskys. »

L’entreprise adhère à une plateforme spécialisée dans la livraison d’alcool de toutes marques, ce qui lui permet une certaine réactivité dans ces cas de figure.

« On est aussi livrés par des entrepôts spéciaux, ou affiliés à telle marque de boissons, ou encore des indépendants. »

Les services : ou comment un distributeur se démarque de son concurrent

Plus que sur le catalogue de boissons, c’est sur le nombre et la qualité des services proposés que les distributeurs tentent de se démarquer. Bien sûr, les promotions ou autres opérations spéciales sont monnaie courante. Mais d’autres prestations permettent de fidéliser les clients comme la fourniture du matériel de tirage pression pour les bières (et le SAV qui va avec) ou même de broyeurs de verres cassés.

Les catalogues, les prix, les services : des arguments que les commerciaux des distributeurs mettent en avant lorsqu’ils démarchent de potentiels clients. Car ce sont bien les distributeurs de boissons qui convainquent les bars ou autres restaurants, et non l’inverse. Des VRP itinérants vont vanter les mérites de l’entreprise sur le terrain. Ce sont eux qui vont éventuellement proposer des promotions sur les boissons, ou bien suggérer tel ou tel produit. D’autres commerciaux se chargent, quant à eux, de prendre les commandes au téléphone.

Mais pour Francis Gineste, les distributeurs ne cherchent pas à mettre en avant une marque plus qu’une autre :

« On est là pour répondre à la demande, pas pour faire le marché. »

Le prix, nerf de la guerre

La quantité de produits disponible ne cesse de croître. France Boissons dispose d’un catalogue de plus de 20 000 références, de l’eau minérale au rhum ou au café. Au milieu de cette liste qui peut paraître sans fin quand on la consulte, c’est au gérant de l’établissement de faire son choix.

Au restaurant strasbourgeois Le Dôme, à deux pas de la cathédrale, les amateurs de Carola seront déçus. C’est la Lisbeth qui est servie sur les tables. Charles Béguille, responsable de salle de l’établissement explique :

« Il n’y a pas de raisons particulières qui font qu’on choisit une marque et pas une autre. Sauf s’il y a une promotion évidemment. Dans le catalogue, on regarde ce qu’ils ont : Pepsi ou Coca, ou telle marque de jus de fruit. »

Parlons du cas Perrier : à l’époque on trouve Perrier dans quasiment tous les bars. La marque était en situation de quasi-monopole et pratiquait donc des prix assez élevés. Badoit arrive et fait de gros efforts sur ses prix poussant alors les exploitants à se tourner vers elle. Car l’idée qu’elles ont derrière la tête est de se démarquer pour inciter le consommateur à acheter ses produits lorsqu’il fait ses courses.

La San Pellegrino fait partie des eaux gazeuses qui fonctionnent très bien. (Photo Wayne Mah / Flickr / cc)

L’argument premier pour les bars et restaurants est donc le prix. Logique, l’activité doit être la plus rentable possible. Mais l’image de la marque a aussi sa place. C’est le cas pour Sébastien Dime, gérant co-associé, qui a ouvert le bar Le Mantra le 22 juillet dernier :

« Dans notre famille, on a déjà deux brasseries à Strasbourg. On se sert de cette expérience pour faire nos choix. On prend les boissons qui fonctionnent le plus et qui ont le meilleur rapport qualité/prix. Là, par exemple, on va abandonner la Carola rouge, pour ne garder que deux eaux gazeuses : la Perrier et la San Pellegrino. On a constaté qu’elles fonctionnent mieux. »

C’est aussi une histoire d’image de marque

À l’Happy Hours, le gérant, Ahmet Key, se laisse aussi guider par les prix. Sauf dans de rares cas, comme pour la Perrier :

« Ce choix n’a rien à voir avec le prix. La Perrier reste, d’ailleurs, un peu plus chère que la Badoit. C’est une question de marque. Elle a une image plus qualitative, plus noble. »

Le bar ne sert que des petites bouteilles en verre de 25 centilitres, qui coûtent aussi chères à l’achat qu’une grande bouteille en plastique d’1,5 litre. Certains clients se plaignent des 3,50 euros qu’elle coûte, mais rien n’y fait, la marque passe bien au-delà du prix.

Enfin, certaines marques proposent des animations autour de PLV (publicité sur lieu de vente). C’est le cas, par exemple, de Sköll qui a proposé à l’Happy Hours, une animation avec distribution de tee-shirts, ou autres haches gonflables. Des opérations qui séduisent les gérants d’établissement qui ne refusent jamais une animation qui ne leur coûte pas plus cher et qui peut amener des clients.

Ces choix sont donc aussi commandés par la demande et donc susceptibles d’évolution. Une marque qui fonctionne aujourd’hui peut ne plus être autant consommée demain. Un commerce qui dépend donc principalement des consommateurs.

Petits bonus en passant, Perrier mise beaucoup sur son image sensuelle voire sexuelle comme le prouvent ces deux publicités, l’une datant de 2014 – qui a d’ailleurs causé une polémique, la marque étant accusée de sexisme -, l’autre datant de 1976 réalisée par… Serge Gainsbourg :

 


#Carola

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