Après l’école, Pieter Hugo devient photographe, sans études particulières. Il a alors 20 ans mais, son premier appareil photographique, il l’a reçu à l’âge de 12 ans et les premières photographies qu’il a prises représentaient un sdf. L’observation de la société et du monde qui l’entoure est alors déjà au centre de ses préoccupations :
« Mon travail est intimement lié à mon expérience d’enfant en Afrique du Sud. C’est vraiment difficile de les séparer. Même si j’aimerais penser que mon travail est basé sur des prérogatives complètement personnelles, il est toujours très lié à la topographie de l’endroit où j’ai grandi et à la constante appropriation de cet espace. (…) Au début, je pense que la photographie m’a servi de prétexte pour vraiment me poser ces questions. Tout vient d’un engagement avec le monde. »
Cet engagement, il le poursuit aujourd’hui et l’exposition This Must Be The Place en est un bon aperçu.
Les méchantes et un peu bêtes hyènes du Roi Lion, peut-on les apprivoiser ? A priori oui, de ce que l’on peut voir dans la série The Hyena and Other Men (Nigeria 2005-2009). Elles sont grosses, charpentées, la gueule fermée par une muselière et elles sont tenues en laisse. Pieter Hugo, pour la réalisation de cette série, a passé huit jours en compagnie d’une communauté possédant trois hyènes, des singes et des pythons.Sortes de diseurs de bonne aventures qui, vendent potions et remèdes magiques, ils gagnent leur vie, tels une troupe de cirque, en passant de villes en villes et en donnant des représentations avec ces animaux.
Plusieurs séries à voir
À la galerie, plusieurs séries, sont visibles. Ainsi, outre celle des dresseurs de Hyènes, vous pourrez découvrir aussi les séries Messina/ Musina (Afrique du Sud, 2006), The Wild Honey Collectors (Ghana, 2005), Nollywood (Nigeria, 2008-2009) ou encore Permanent Error (Ghana, 2009-2010). Cette dernière présente les déchetteries de l’occident en Afrique : c’est, entre autres, au Ghana dans le bidonville Agbogbloshie, à Accra que se trouve une décharge à ciel ouvert spécialisée dans les appareils électroniques tels téléphones portables ou encore ordinateurs.
Ambiance de fin du monde, d’apocalypse dans ces photographies : la terre devient déchetterie mais suffisamment loin de nos yeux occidentaux pour qu’on ne se rende pas trop compte de méfaits de notre société consumériste. Là-bas, la terre est noire et la pollution si dense que rien ne peut plus pousser sur ces terres dévastées : il n’y fait pas bon vivre. Et pourtant, c’est aussi un lieu de travail, de retraitement des déchets, de récupération de composants, etc. Re-choc. Les photographies de Pieter Hugo nous mettent face à ce que l’on feint d’ignorer : mais pour combien de temps ? D’après le titre, l’erreur est permanente : « Fatal Error » pourrait-il être un titre encore plus parlant ?
La galerie Stimultania, par cette exposition nous convie dans un imaginaire trash, dérangeant et violent mais non dénué d’humour : à Nollywood, le Hollywood nigérian, il y a tellement de productions que l’acteur est peut-être autant anonyme que tout un chacun. Mais il n’y a pas que cela : le noir en Afrique du Sud, au Cap, peut faire partie, même si c’est peut-être dans une relation d’équilibriste, d’une famille blanche. Chacun cherche sa place, Pieter Hugo se fait le témoin de ce monde qui nous est inconnu, nous montre nos dérives mais, pourtant, dans toutes ces photos, c’est la vie qui domine…
Y aller
« Pieter Hugo – This Must Be The Place ». Exposition jusqu’au 17 mars 2013 à Stimultania, 33, rue Kageneck à Strasbourg. Ouvert du mercredi au dimanche de 14h à 18h30. Entrée libre. Article précédemment publié dans: www.lifeproof.fr
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