En comparaison avec le chaos qui règne au sein de l’Assemblée nationale, le conseil municipal de Strasbourg ne peut qu’être plus paisible. Pas de 49-3 ni de motion de censure, pas de guérilla parlementaire, mais un ordre du jour qui se consacre à des sujets aussi variés que l’ouverture d’une maison France Services, le régime indemnitaire des policiers municipaux ou la prolifération des punaises de lit.
Ce lundi 9 décembre (à suivre en direct à partir de 10h), les élus strasbourgeois se pencheront aussi sur le rapport d’activité et de développement durable 2023. Ce document de plus de 150 pages mentionne notamment l’état de la précarité à Strasbourg, et les politiques adoptées par la municipalité pour y faire face.
Pauvreté en hausse
En reprenant les chiffres indiqués dans le rapport, on relève une augmentation quasi constante du taux de précarité, c’est-à-dire du nombre de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté. À Strasbourg ce taux passe de 24,80% en 2015 à 26% en 2018 et stagne depuis à ce même niveau, jusqu’en 2021.
Parfois lacunaire, le document ne livre pas de chiffres plus récents. Même cas de figure sur le territoire des 33 communes de l’Eurométropole, où le pourcentage passe de 19,50% en 2015 à 20,7% en 2021. Dans le Bas-Rhin, « près de 53% des allocataires du RSA habitent à Strasbourg, alors que la ville ne représente qu’un quart de la population du département », souligne encore le document.
Dans le détail, le rapport met en exergue la forte proportion de jeunes précaires : le taux de pauvreté chez les moins de 30 ans stagne à 33% en 2021. Chez les personnes de plus de 75 ans, une progression plus nette s’observe, passant de 8% en 2015 à 14% en 2021.
Inventaire des mesures en place
En quelle mesure ce constat est-il imputable à une municipalité et non au gouvernement ? « On peut se demander ce qui a été fait pendant quatre ans pour diminuer la pauvreté », interroge la conseillère d’opposition Céline Geissmann (PS). « Je ne dis pas que tout est de la faute des écologistes, puisque l’évolution de la pauvreté est multifactorielle. Mais est-ce que nos politiques publiques ont permis d’atténuer le choc ? Aujourd’hui je n’en suis pas sûre. » « On se bat avec une cuillère dans un océan », se défend Benjamin Soulet, co-président du groupe majoritaire Strasbourg écologiste et citoyenne. « Ces questions de pauvreté suivent surtout des logiques nationales, parfois même européennes et mondiales. »
L’élu ne nie pas pour autant les marges de manœuvre locales, assurant que la municipalité cherche à jouer un rôle positif sur la vie et le retour à l’emploi des précaires ; il met notamment en avant la réforme de la tarification solidaire, ou le lancement d’un programme améliorant l’accès aux droits sociaux. « Un de mes plus gros regrets durant ce mandat, ça reste l’échec du programme Territoire zéro chômeur », reprend Benjamin Soulet. « Tout ça à cause d’une collectivité qui refuse de jouer le jeu… » En l’occurrence, la Collectivité européenne d’Alsace, qui avait refusé de donner suite au programme visant à faciliter l’accès à l’emploi des chômeurs.
Responsabilité de l’État
« En plus de nos actions, la Ville a pu également faire du plaidoyer auprès des autorités compétentes, en prenant position par exemple contre des projets de loi néfaste pour les précaires, comme la réforme de l’assurance chômage », complète Floriane Varieras, adjointe aux solidarités et également co-présidente du groupe Strasbourg écologiste et citoyenne.
« Je refuse d’adhérer au discours de déresponsabilisation totale de la Ville », insiste l’élu d’opposition Pierre Jakubowicz (Horizons). « La municipalité a quand même des marges budgétaires, elle peut notamment mobiliser les 2 millions d’euros d’économies du CCAS (Centre communal d’action social, NDLR). » « De la part du centre et de la droite, ces critiques me font rire jaune », rétorque Floriane Varieras. « Il faut rappeler que c’est Renaissance et la droite qui sont au pouvoir depuis sept ans au gouvernement. » Concernant les excédents du CCAS, l’adjointe aux solidarités précise qu’ils ont été dépensés durant les années 2023 et 2024, principalement dans le service d’hébergement suite aux sinistres, mais aussi l’amélioration des conditions d’accueil ou le renforcement du personnel.
Chargement des commentaires…