Tout ce qu’elle aime est sucré et gras
Marina a 26 ans et deux adorables petites filles de 4 et 2 ans. C’est une jolie rousse irlandaise qui pèse 133 kilos pour 1,60 m. Elle n’arrive pas à courir pour rattraper ses filles dans la rue quand l’une d’elle lui échappe. Sa famille est une famille d’obèses majeurs. Elle ne sait pas faire la cuisine, ne mange pas de légumes. Tout ce qu’elle aime est sucré et gras. Elle me dit vouloir être opérée de l’estomac pour maigrir. Je lui explique les critères pour accéder à cette chirurgie dite « bariatrique » : un régime suivi de longue durée, un avis psychiatrique et un bilan général et endocrinologique. Elle m’explique tout de suite : « Docteure les régimes, c’est pas la peine, j’y arrive pas ».
Je l’adresse en consultation de chirurgie bariatrique qui me la renvoie pour suivi de poids. Elle va perdre très difficilement 5 kilos en un an. La consultation psychiatrique est purement formelle : pas de contre-indication à la chirurgie. On lui propose un sleeve , c’est à dire un shunt partiel de son estomac. Les effets secondaires sont un transit rapide (diarrhées fréquentes) et la nécessité d’une supplémentation en vitamines. Deux ans plus tard, elle pèse 80 kilos et se sent beaucoup mieux dans sa peau. Elle travaille et n’est plus essoufflée. Elle a appris à cuisiner depuis, et les légumes sont devenus ses amis.
Elle a mis des sous de côté pour ses prothèses mammaires
Carine est étudiante, elle finit ses études à Strasbourg. Elle a été opérée dans sa région d’origine, il y a 2 ans et demi pour une obésité majeure : 140 kg pour 1,68 m. On lui a proposé un by pass c’est à dire un shunt complet de l’estomac. Elle a perdu 60 kilos. Elle a des injections de vitamines tous les trimestres et quelques fois des perfusions de fer. Elle vient me voir pour la suite de la prise en charge : reprise de l’excédent cutané des bras des cuisses et du ventre et mise en place de prothèses mammaires. Le remboursement de ces dernières n’est pas assuré par la sécurité sociale. Elle a mis des sous de côté en travaillant de nuit. Elle est ravie d’avoir eu recours à cette solution du by pass malgré la lourdeur de cette chirurgie. Elle me dit avoir été désespérée avant.
J’étais assez réticente à la chirurgie de l’obésité dans un premier temps. Pour moi, la prise en charge devait être diététique associée à de l’exercice physique. Mais en m’installant et en voyant régulièrement des patients pour ce type de demande de perte de poids importante, j’ai eu à faire comme beaucoup de mes confrères à des cas désespérés de ce que l’on appelle des obésités morbides (qui rendent malade). Les régimes sont pour certains obèses pires encore que l’obésité, ils s’acharnent à maigrir avec beaucoup d’efforts et reprennent à toute allure les quelques kilos perdus, quitte à en avoir plus après chaque tentative. J’ai un jour calculé qu’une de mes patientes qui faisait un tas de régimes totalement farfelus avait perdu en tout 220 kilos entre l’âge de 50 et 62 ans, pour un poids final de 160 kilos. Son poids à 50 ans était totalement normal pour sa taille soit 65 kilos pour 1,68 m. J’ai dû lui demander de m’apporter des photos d’elle tant j’avais du mal à y croire.
Complications très peu nombreuses
La chirurgie de l’obésité a fait beaucoup de progrès depuis mon installation, avec des complications somme toute assez peu nombreuses au vu de celle de l’obésité morbide. Elle devient du coup un recours plus fréquent dans ces cas, où plus aucune prise en charge diététique ne marche. La mortalité de cette chirurgie est de 0 à 1%, les effets secondaires présents dans 10 à 15% des cas (transit rapide, hypoglycémies, etc.).
Avec le temps, je ne propose plus de régimes hypocaloriques stricts à mes patients, mais un changement d’habitudes alimentaires plus définitif associé à une reprise d’activité physique modérée, mais régulière. Il me semble que les résultats sont plus durables, même si moins spectaculaires.
Sur ce, je saute dans mon maillot avec mes kilos de trop et je vais piquer une tête dans la Méditerranée. Bonne fin d’été à tous. 😉
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