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Orangerie : la Ville planche sur un après-zoo

Du changement en vue pour les animaux du zoo de l’Orangerie ? Alors que la justice doit bientôt rendre sa décision sur une plainte contre le zoo, la Ville de Strasbourg a décidé de traiter cette question dans le cadre d’une réflexion globale sur « la place de l’animal en ville ».

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Un des lynx de Sibérie du Zoo de l’Orangerie et sa cage surmontée du « mât » à cigognes (Photos Marc Gruber)

En octobre 2013, l’association Code Animal avait déposé une plainte contre le zoo pour non-respect de la loi relative à la détention des animaux dans un établissement zoologique et pour violations du code rural. L’association y répertoriait toute une série d’infractions selon elle, en termes de santé, bien-être et sécurité des animaux, à commencer par l’impossibilité de voler pour des oiseaux, le bétonnage des cages des singes et des lynx et l’absence de barrière d’1,80 m de haut pour protéger les animaux des troubles extérieurs.

270 000€ par an pour les Amis du zoo

Alors que la Justice fait son enquête et doit se prononcer dans les mois qui viennent, la Ville de Strasbourg a continué à soutenir le zoo et a investi dans la mini-ferme attenante. L’Association des amis du Zoo de l’Orangerie, qui gère ce zoo gratuit, perçoit chaque année 270 000 euros de subventions. D’autre part, 800 000 euros ont été dépensés l’année dernière pour la rénovation de la mini-ferme. L’objectif est de générer un minimum de recettes, avec un accès payant et la vente de merchandising, mais aucun chiffre d’affaires n’est disponible pour le moment.

Les visions divergent entre l’association qui gère le zoo, les défenseurs des animaux, et la Ville à qui le parc de l’Orangerie appartient. Mais tous sont d’accord pour dire que les choses doivent changer. Claude Rink, le directeur, estime qu’il ne s’agit que d’une question de moyens et répète ce qu’il a déjà dit aux pourfendeurs de ces dernières années :

« Nous aussi, nous aimerions améliorer les conditions de vie des animaux, même si nous estimons que les attaques contre le zoo ne sont pas justifiées. Et même si nous percevons une subvention de la Ville, elle n’est même pas suffisante pour couvrir nos frais de fonctionnement. Et, bien sûr, nous savons qu’il manque une partie de la barrière de protection des animaux, mais, là encore, c’est à la Ville de régler cette question, puisque c’est son terrain.

Il y a trois ans, on nous avait proposé un tracé, mais nous l’avons refusé, car la barrière passait à 8 mètres des singes, autant dire que le public ne verrait plus rien ! On aimerait aussi avoir des caméras pour prévenir les actes de vandalisme : en 2014 nous en avons répertorié trois, avec des grillages découpés, même si aucun n’animal est sorti. Quant aux lynx de Sibérie, Filou et Prunelle, je rappelle qu’ils sont frère et sœur, nés en captivité comme les autres animaux du zoo. »

Les grilles actuelles des singes et des lynx (Photo Marc Gruber)

Un groupe de travail sur l’animal en ville

Mais les mentalités et les lois évoluent. Les parcs et jardins zoologiques, apparus en Europe au XVIe siècle pour étudier, mais aussi exhiber les animaux exotiques, ont, un peu partout, évolué dans leurs aménagements et leurs objectifs. Les Européens sont plus sensibles au bien-être animal et remettent en question, pour certains, le principe même du maintien d’animaux sauvages en captivité. La distraction des humains ne peut donc plus être l’unique justification du maintien des bêtes en captivité, notamment en milieu urbain.

La solution viendra peut-être d’une réflexion plus globale, non pas limitée au zoo, mais tenant compte du rapport général entre humains et animaux en ville, puisque Strasbourg a été élue capitale française de la biodiversité en 2014. D’autres questions comme les animaux errants et les pigeons font par exemple partie de cette problématique globale. C’est en tout cas ce que veut croire Christel Kohler (sans étiquette mais élue sur la liste PS), adjointe au maire en charge de la ville en nature et ville nourricière :

« Nous savons que, sur le zoo, il y a tout un travail à faire et que les choses doivent changer, c’est d’ailleurs pour cela que nous avons investi dans la mini-ferme. Le parc de l’Orangerie doit garder un endroit où le public peut être en contact avec la faune, mais cela n’implique pas nécessairement un zoo au sens traditionnel du terme, même si je n’ai pas d’a priori sur la maltraitance.

On peut imaginer par exemple un observatoire de la faune urbaine, puisque la faune est très riche à Strasbourg et dans les environs. Nous travaillons sur cette question avec le recrutement d’un chargé de mission à la Mairie et le lancement d’un groupe de travail [voir encadré], qui s’est réuni une première fois le 3 février à la ferme Bussière, en présence d’Allain Bougrain-Dubourg. Le groupe de travail se réunira pour une discussion de fond fin mars. Entre temps, je compte rencontrer les Amis du zoo. »

Un projet qui doit tenir la route

Christian Braun, directeur de la Ligue pour la protection des oiseaux en Alsace (LPO) qui est membre du groupe de travail, explique pourquoi l’initiative était nécessaire et quels sont les objectifs :

« Nous ne sommes qu’indirectement impliqués dans cette discussion car notre mandat est limité aux oiseaux sauvages. Beaucoup de personnes nous ont interpellé sur le sort des grands tétras en captivité au zoo, et nous pensons que le concept de zoo est dépassé. Par ailleurs, le site de l’Orangerie est trop petit pour les normes actuelles. Quant au concept d’observatoire de la faune locale, il est séduisant mais assez flou. En définitive il vaudrait mieux valoriser la richesse de la faune alentour, car Strasbourg a des atouts énormes par rapport à d’autres villes avec la proximité du Rhin et une multitude d’espace verts. Le problème actuel est que cette richesse n’est pas valorisée: par exemple Paris et Albi ont lancé un programme pédagogique sur un couple de faucons pélerins en ville, mais ici personne ne sait que des faucons pélerins nichent dans la cathédrale et aux alentours de Strasbourg ! Après des années d’immobilisme tout le monde joue le jeu de la concertation et il a fallu du courage pour prendre le problème à bras le corps. »

C’est aussi l’avis de ceux qui demandent la fermeture du zoo depuis des années au conseil municipal, comme le rappelle l’adjoint au Maire Éric Schultz (EELV), qui préférerait agrandir la mini-ferme :

« À l’Orangerie il n’y a pas de place pour un zoo digne de ce nom, à commencer parce qu’il n’a aucun point de fuite pour les animaux ou d’endroit où se cacher du public. Nous avons déjà investi dans la mini-ferme, alors pourquoi ne pas l’étendre en se limitant à des espèces locales ? Les Amis du zoo ont fait un travail formidable depuis 30 ans pour la réintroduction des cigognes, mais en ce qui concerne le zoo, le rapport au vivant et les mentalités ont évolué, il y a un soutien populaire pour une démarche qui consiste à ne plus exhiber des lynx erratiques en ville. On a enfin un groupe de travail qui peut être le cadre adéquat pour faire bouger ce dossier. »

Filou, Prunelle et leurs amis attendent avec impatience ce qui va être décidé, à moins que le tribunal de Strasbourg ne pousse la Mairie à bousculer son calendrier.


#animaux

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