Jean-Sébastien Scharf, plus connu à Strasbourg pour ses promotions immobilières, se désole en constatant l’éloignement des citoyens de la politique. Comme il bénéficie de quelque aisance financière, il lance lundi 3 octobre un site appelé « One Vote« , dont l’objectif est de permettre aux citoyens de prendre part aux débats parlementaires en cours.
Le principe est simple : lorsqu’une loi est en préparation à l’Assemblée nationale, une entrée est créée sur One Vote. Les internautes peuvent alors commenter cette loi et « voter » pour ou contre. À la fin du débat parlementaire, les résultats sont envoyés, pour chaque circonscription, aux députés. Dans l’esprit de Jean-Sébastien Scharf, One Vote pourrait servir d’outil permanent de consultation de l’avis des électeurs :
« Je ne suis pas pour la dictature de la démocratie directe, les élus nous représentent, ils ont le droit d’être en désaccord avec une partie de leur base électorale, même si elle est majoritaire. Mais prenons le cas de la Loi Travail, on a vu sur Internet des pétitions mais où les citoyens ne pouvaient simplement déclarer que leur opposition. Quant à Facebook, il est difficile voire impossible d’y mener un débat d’idées sérieux. Au final, Internet et les réseaux sociaux n’aident pas beaucoup à la diffusion des enjeux législatifs, ni au dialogue entre les élus et leurs électeurs. »
Vous avez un e-mail de votre député
À la fin du débat parlementaire, le député peut utiliser One Vote pour envoyer un email à tous les participants inscrits de sa circonscription et qui ont voté sur une loi :
« Cela permettra aux élus d’expliquer leur vote aux citoyens. Ils le font déjà, au travers de leurs lettres d’activité parlementaire mais qui les lit ? Là, ils pourront envoyer un e-mail à des gens qui se seront informés sur la loi en discussion, et qui auront exprimé un avis. À chaque projet de loi, il y aura donc une remontée de commentaires de la part des internautes vers le député, et un avis de la part du député envoyé aux internautes, on aura donc des échanges et c’est bien ça le but. »
One Vote est conçu comme une succession de forums, très simples, un pour chaque projet de loi. Les internautes peuvent publier leurs commentaires sous chaque intitulé d’une loi en discussion, il n’y a aucune explication, aucun résumé, « par souci d’équité », indique Jean-Sébastien Scharf. Mais le résultat est que le site est très austère. Il faut déjà avoir une bonne idée des projets de loi en cours de discussion car la seule aide qui est fournie par One Vote est… un lien vers le projet de loi in extenso sur le site de l’Assemblée Nationale, un texte incompréhensible pour le commun des citoyens.
Pas de business model
Entièrement autofinancé, Jean-Sébastien Scharf s’est donné un budget de 25 000€, One Vote n’a pas de « business model. » Piochant les projets de loi directement depuis les bases de données de l’Assemblée Nationale, le site est prévu pour fonctionner sans apport manuel, avec un budget de fonctionnement minimal. Jean-Sébastien Scharf se laisse un peu de marge pour évoluer sur cette question :
« Si le site atteint une certaine audience, alors peut-être que je mettrai de la publicité. Et je réfléchis aussi à des solutions pour proposer du marketing ciblé, par exemple pour des partis politiques. D’autres pistes peuvent être envisagées mais la priorité, c’est de faire en sorte qu’un maximum de gens participent et que les députés jouent le jeu. »
Dans sa phase de lancement, One Vote ne cible que les débats à l’Assemblée Nationale, délaissant les étapes au Sénat. Mais Jean-Sébastien Scharf a bien l’intention de dupliquer One Vote si les internautes s’emparent de cet outil, par exemple pour des version locales au niveau des régions ou des métropoles.
Une procédure d’inscription renforcée
Pour que les votes soient significatifs, empêcher une manipulation et assurer au débat une certaine tenue, One Vote fait valider l’adresse e-mail à chaque nouvel inscrit ainsi que son numéro de téléphone portable. Jean-Sébastien Scharf propose également aux internautes de renseigner leurs thématiques préférées (transports, sécurité, éducation…) ainsi que la couleur de leurs derniers votes, et d’indiquer s’ils sont adhérents à un parti politique.
Des informations sensibles, très rarement demandées sur Internet, mais Jean-Sébastien Scharf assure être en conformité avec les préconisations de la Commission nationale informatique et libertés (Cnil). S’il réussi à constituer un fichier d’utilisateurs suffisamment étoffé avec de telles données, il aura peut-être trouvé son business model.
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