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Municipales : la couleuvre, mets préféré des petits partis qui fusionnent

Secret de polichinelle durant une bonne partie de la campagne, François Loos (UDI) a rejoint dès dimanche soir Fabienne Keller (UMP), arrivée en tête au 1er tour des élections municipales à Strasbourg. Alain Jund (EELV) n’en a jamais fait mystère, c’est avec Roland Ries (PS) que l’alliance de second tour était scellée dès le départ. Ce qui n’a pas empêché les écologistes et les centristes d’avaler quelques couleuvres.

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Roland Ries (PS) et Alain Jund (EELV) s’allient au second tour, comme prévu (Photo MM / Rue89 Strasbourg)

A première vue, les écologistes s’en sortent mieux que les centristes. Roués aux alliances de second tour, Europe écologie – Les Verts (EELV) et le parti socialiste ont bien déminé le terrain avant le 1er tour. Le programme commun et les places ont été discutés lors de nombreux réunions en amont du 23 mars, le tout finalisé lors de 36 heures de négociations serrées dans la nuit de dimanche à lundi et lundi toute la journée.

En 2008, les Verts obtenaient 6,37% des voix au 1er tour, tandis que Roland Ries (PS) en engrangeait 43,90%. Dans la foulée, les écologistes raflaient 7 places, dont 6 en position éligible, deux postes d’adjoints (urbanisme et social) et un poste de conseiller municipal délégué à la démocratie locale.

EELV mieux représenté sur la liste d’union, mais pas d’influence sur le programme

Avec un écart de voix bien inférieur dimanche 23 mars, 31,24% pour Roland Ries et 8,52% pour Alain Jund (notons qu’il s’agit des mêmes tête de liste qu’en 2008, comme à l’UMP…), les écologistes ont pu négocier 14 places sur la liste de second tour, dont 8 à 10 en position éligible. « Ce qui n’a pas été sans douleur », reconnaît Roland Ries. En cas de victoire, il n’est pas illogique de penser que le nombre de postes attribués aux colistiers EELV sera plus élevé. Sans doute un vice-président de la CUS, trois adjoints et un conseiller municipal délégué.

Il n’empêche, cette représentativité renforcée (et le report de voix espéré qui va avec, dont cette fois le PS ne peut pas se passer) est bien la seule chose que les écologistes ont obtenu. Au niveau du programme, il semblerait que l’on reste peu ou prou à celui du PS, agrémenté de formulations remaniées, comme cela a été convenu en 2008 – voir document ci-dessous. D’ailleurs, avant dimanche, un programme commun ne devrait pas être diffusé, mais seulement une « profession de foi » commune, à laquelle sera annexée par la suite une « feuille de route » discutée entre les parties à l’entrée de l’été. En cas de victoire, toujours.

Le programme du PS amendé par les Verts en 2008

Lundi, Roland Ries a assuré que le programme socialiste avait été « amendé, corrigé et enrichi » suite aux discussions entre ses équipes et celles de son (toujours) adjoint à l’urbanisme. Il a reconnu que « des points de désaccords anciens subsistent [ndlr, la vidéosurveillance, le rallye, les antennes relais…] et que d’autres sont apparus récemment [ndlr, le GCO] ».

Seulement voilà, aucune mesure concrète du programme d’Alain Jund ne semble avoir été intégrée (3 000 logements vacants remis sur le marché en 6 ans, 300 nouveaux jardins partagés, ville à 30 kilomètres/heure, etc.) et, plus étonnant encore, le PS ne s’est engagé à renoncer à aucun point gênant pour les écologistes, comme le quartier d’affaires international. Seule concession, nous confie-t-on, la « transition écologique » fait son apparition dans les 4 axes de la campagne PS-EELV du second tour.

« Les destins individuels des uns et des autres ne m’intéressent pas »

Pour Mathieu Cahn (PS), co-directeur de campagne de Roland Ries, il n’a tout simplement pas été question de « marchandage ». Il s’explique :

« On a travaillé longuement à une profession de foi commune avec les projets qui nous rassemblent. On n’a pas joué les marchands de tapis. On a plus négocié sur les formulations que sur les propositions. Concernant la liste, on l’a juste faite coulisser. On a construit une équipe écologiste et socialiste et pas fait une aumône caporaliste (sic) comme Fabienne Keller à François Loos. Par ailleurs, dans cet entre-deux tours, les destins individuels des uns et des autres ne m’intéressent pas [ndlr, cf. les cris d’orfraie des responsables du Parti radical de gauche, dont la seule colistière sur la liste PS-EELV(-PRG) glisse en position non-éligible, de la 46ème à la 58ème place]. »

Les divergences de fond, des « nuances » minore Mathieu Cahn, ressurgiront dans le mandat à venir, comme dans celui qui l’a précédé. Mais, comme le précise un colistier EELV, « tout le monde est convaincu du fait que la fusion est nécessaire pour peser sur les politiques menées. Les écolos ne peuvent pas disparaître du conseil municipal ».

François Loos, candidat UDI, n’a pas attendu très longtemps avant de rejoindre Fabienne Keller, candidate UMP. Il a diffusé un communiqué en ce sens dès 23h30 (Photo Adrien Valjean)

A droite au contraire, la convergence des politiques envisagées est évidente, hormis peut-être sur l’ouverture plus franche de Strasbourg vers Kehl et l’Allemagne chère à François Loos. Mais les centristes (7,55% des voix, contre 32,92% pour l’UMP) ne sortent pas victorieux de cette fusion. Si la tête de liste UDI prend la deuxième place, seuls 7 de ses colistiers intègrent la liste UMP-UDI-Modem, dont 4 en position éligible. Aucun engagement n’est pris quant à la présidence de la CUS, poste en-dessous duquel un ex-ministre ne saurait descendre, juge notamment Robert Grossmann, désormais électron libre après 49 ans à l’aile droite de l’hémicycle strasbourgeois.

« Sur la liste UMP, certains n’ont pas ouvert le bec pendant 6 ans, d’autres font ça pour le pognon… »

« Aumône caporaliste » pour Mathieu Cahn (PS), « carpétisation » (sic) de François Loos pour Éric Schultz (EELV), et alliance malheureuse pour quelques colistiers de François Loos qui n’ont pas souhaité se joindre au rassemblement de la droite. Pour Anne Schumann, numéro 4 de la liste UDI, il n’était pas question de figurer sur cette liste. Celle qui a été l’une des opposantes les plus farouches à la municipalité PS-EELV sortante, surtout sur les questions de transports, regrette :

« François [Loos] s’est fait bouffer (sic) par Fabienne Keller. Après 19 ans au conseil municipal dont 7 en tant qu’adjointe (gare et marchés publics), ma décision était prise de ne plus travailler avec elle. Je n’avais pas non plus envie de faire 6 ans d’opposition de plus en cas de défaite. Sur sa liste, il y a des gens qui n’ont pas ouvert le bec entre 2008 et 2014, d’autres qui y sont parce qu’ils ont besoin de pognon… Chez de nombreux colistiers de François, je n’ai d’ailleurs pas senti un grand enthousiasme à faire campagne avec l’UMP. »

Anne Schumann n’était pas prête non plus à travailler aux côtés de Jean-Emmanuel Robert et Geoffroy Lebold, avec qui un contentieux est toujours entre les mains de la justice, celui du financement de l’association Strasbourg 2014. Numéro 3 de la liste de François Loos, Luc Wehrung, président de l’Asser, association marquée à droite à la Robertsau, n’a pas non plus souhaité intégrer la liste d’union. Non-encarté à l’UDI et encore moins à l’UMP, le Robertsauvien assume ne pas avoir envie de « jouer les bouche-trous » sur une liste UMP dont l’image « ne [lui] correspond pas ».

L’UMP comptabilise ses colistiers UDI d’avant la fusion

A l’UMP, on se défend d’avoir phagocyté la liste UDI sans lui faire suffisamment de place. L’argument développé par l’entourage de Fabienne Keller frise la mauvaise foi : l’UDI était déjà sur-représentée sur la liste UMP avant la fusion. Jean-Philippe Vetter, collaborateur proche de Fabienne Keller, remarque :

« En faisant les comptes, avec Bornia Tarall, Jean-Charles Quintiliani, Marc Merger et d’autres [ndlr, mis en congé forcé de leur parti], l’UDI a 13 places. Avec le Modem, le centre compte 21 personnes sur la liste, l’UMP 19 et 25 places sont occupées par des personnes de la société civile. Combien portent un regard neuf sur la politique sur la liste de Roland Ries ? La nôtre représente la grande famille de la droite. Il y a une grande convergence sur le projet, en matière de rayonnement, d’Europe, d’économie, et une hyper bonne ambiance dans l’équipe. Notre alliance est naturelle, celle d’en face, artificielle. »

A noter que l’un des colistiers de François Loos, qui figure désormais sur la liste de Fabienne Keller, Francis Hebting (n°54), est membre du collectif contre le tram sur pneu à Kœnigshoffen, dont la tête de file a déposé un recours (gracieux et désormais contentieux) contre le tracé prévu par la municipalité sortante. Cette tête de file n’est autre que Pierre Ozenne, n°9 de la liste menée par Alain Jund au 1er tour, et… numéro 53 sur la liste PS-EELV au second tour. Questionné sur la présence de ce trublion sur la liste d’union, la tête de file EELV s’est énervé : « Ça, c’est le cirque ! Ce n’est pas sérieux ! Il faut arrêter avec ça ! » Sujet ultra-sensible, on vous dit.


#élections municipales 2014

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