Le 29 décembre 2017 à Strasbourg, Naomi Musenga appelle le Samu du Bas-Rhin. Elle a mal, très mal mais au téléphone, son interlocutrice se moque d’elle. La conversation, glaçante, a été enregistrée et publiée sur le site de l’hebdomadaire alsacien Heb’Di.
Après un échange entre l’opératrice et la régulatrice (écouter ci-dessus), qui lui explique en riant « qu’elle va mourir », l’opératrice du Samu s’adresse à Naomi en ces termes :
- « Allô…
- Si vous ne dites pas ce qu’il se passe, je raccroche…
- J’ai très mal
- Oui ben, vous appelez un médecin.
Oui, vous allez mourir certainement un jour comme tout le monde… Vous appelez SOS Médecins, c’est 03 88 trois fois 75. Vous avez compris ? - Aidez-moi, madame, j’ai très mal…
- Je ne peux pas vous aider, je ne sais pas ce que vous avez…
- J’ai très mal au ventre…
- Oui, ben vous appelez SOS Médecins, 03 88 75 75 75, je peux pas le faire à votre place. Ou alors votre médecin traitant. Voilà, au revoir. »
- Naomi Musenga est morte quelques heures plus tard. Elle avait 22 ans, elle était mère d’une petite fille. Après avoir réussi à appeler SOS Médecins au terme de cinq heures d’attente, elle a été transportée, encore consciente, à l’hôpital par le SMUR. Elle a fait deux arrêts cardiaques, a été transférée en réanimation et est morte à 17h30, le 29 décembre 2017.
Défaillance multiviscérale sur choc hémorragique
Selon le rapport d’autopsie que s’est procuré Le Monde, Naomi Musenga a succombé des suites d’une « défaillance multiviscérale sur choc hémorragique. » Plusieurs organes se sont arrêtés de fonctionner, ce qui peut résulter de facteurs variés mais l’autopsie du corps n’a été pratiquée que le 3 janvier, soit 112 heures après la mort de la jeune femme. Elle rapporte que le corps de Naomi Musenga était alors en « état de putréfaction avancée multiviscérale. »
La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a réagi mardi sur Twitter en faisant part de son « indignation ». Il s’agit pour elle de « graves dysfonctionnements » et demande une enquête de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). La ministre s’est engagé à ce que la famille « obtienne toutes les informations, » ce qui serait bien car rien que pour obtenir cet enregistrement, la famille a dû batailler ferme avec les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) pendant cinq mois !
Et ce n’est qu’après la révélation par Heb’Di de ce scandale que les Hôpitaux ont lancé une enquête administrative sur ces événements, le 3 mai. À l’AFP, Christophe Gautier, directeur général des HUS, a indiqué que « la première analyse plaide pour une procédure de traitement d’appels qui n’est pas conforme aux bonnes pratiques. » L’enquête doit durer trois semaines. En attendant, l’opératrice a été affectée « suspendue à titre conservatoire » dans la journée du 9 mai a expliqué le directeur Hôpitaux universitaires à plusieurs médias dont France 3 Alsace, sur la base des premiers éléments de l’enquête.
Une pétition sur Change.org réclame « Justice pour Naomi » et notamment des « sanctions exemplaires », ainsi qu’une prise de conscience du problème à tous les échelons.
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