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Mathieu Wernert : peintre inspiré par l’art urbain

Mathieu Wernert, disquaire de 37 ans, a toujours vécu à Strasbourg. Né de son amour pour la musique, sa peinture s’inspire largement des espaces urbains, de préférence désaffectés, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs.

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(Photos Matthieu Mondoloni)

Quand avez-vous décidé d’être artiste ?

« Vers 15-16 ans. J’ai toujours dessiné et je voulais que mes dessins soient toujours plus grands. J’ai pris des cours à l’école, entre midi et deux, pendant que les autres faisaient du ping-pong. Puis je me suis mis à la peinture. J’ai fini par y penser tous les jours. Je voyais que d’autres arrivaient à en vivre et je me disais : pourquoi pas moi ! Ce n’est pas mon cas aujourd’hui, mais mon truc, c’est d’exposer dans de beaux lieux. Les questions financières ne sont pas la priorité. Pour ma prochaine exposition à La Boutique par exemple, j’ai carte blanche, et c’est assez séduisant ! »

Votre entourage a-t-il eu une influence sur votre choix ?

« On a toujours fait des activités artistiques : ma mère peint en amateur, ma sœur écrit. J’ai toujours vu beaucoup d’expositions. Tous les enfants dessinent, certains s’arrêtent et passent à autre chose sans trop qu’on sache pourquoi. Mais si les parents les encouragent, peut-être y a-t-il plus de chances qu’ils continuent ? Mes parents m’ont toujours motivé, et aujourd’hui ma femme et mes enfants ont pris le relais. »

Mathieu Wernert est venu à la peinture en regardant et copiant des pochettes de disques.

Où avez-vous appris ce que vous savez ?

« Dans les livres. Je suis autodidacte en peinture et j’ai feuilleté beaucoup de livres d’histoire de l’art. Mon père était amateur de jazz et je me suis intéressé à la musique très tôt. J’ai beaucoup regardé les pochettes de disques, celles des labels Blue Note et Impulse, puis celles des disques de rock. Cela a commencé avec Andy Warhol et le Velvet et le lien est ensuite vite trouvé vers le pop art, Basquiat, Keith Haring et toutes les cultures urbaines. C’est ainsi que je me suis intéressé à l’art contemporain. Beaucoup d’artistes de ma génération viennent de là : le hip hop était très important dans les années 1990. »

A vos débuts, qui avez-vous essayé d’imiter ?

« Basquiat et Bacon, qui m’a beaucoup marqué à l’adolescence. Son livre d’entretiens avec David Silvester est une bible pour moi. Si on veut comprendre la peinture, il faut lire ce livre ! J’ai aussi beaucoup recopié les pochettes de disques de Christopher Wool. »

Le Port du Rhin me fait voyager

Comment décririez-vous votre univers ?

« Il est musical et urbain. J’écoute des choses très différentes – jazz, pop, rock, électro, beaucoup de soul – et j’aime la ville ! Qui ou qu’est-ce qui m’inspire en ce moment ? Les gens en général. À la Fnac, on voit vite beaucoup de monde (ndlr : Mathieu Wernert est vendeur au rayon disques). Et les paysages urbains. Le port du Rhin par exemple : c’est un lieu industriel et froid qui me fait voyager. On pourrait être à Amsterdam, à Manchester ou à New York, car tous les ports se ressemblent. Les usines désaffectées m’inspirent aussi : j’ai vu beaucoup de livres de photo sur Détroit, comme celui de Marchand et Meffre. Il y a aussi Après le déluge de Robert Polidori sur la Nouvelle-Orléans après Katrina. »

" Quand je ne viens pas à l'atelier pendant plusieurs jours, je suis frustré !"

Comment et quand travaillez-vous ?

« Je travaille dans mon atelier, dans la maison de mes parents à Illkirch, les mardi, mercredi et jeudi de 9h à 14h. Comme au bureau, et sans exception. C’est une discipline que je m’impose. D’ailleurs, c’est quand je n’ai pas envie d’y aller que ça marche le mieux ! Quand j’arrive avec beaucoup d’idées, je peins moins bien. Et je réutilise tout, je découpe, je colle, d’où l’idée d’arracher, de gratter la peinture dans mes dernières toiles, pour révéler ce qui est en dessous. »

Pourquoi avez-vous choisi de vous rester à Strasbourg ?

« J’ai toujours vécu ici, j’aime cette ville, je la trouve belle. En voyageant, je me rends compte qu’on est vraiment bien lotis. La ville est assez grande mais ressemble à un village. On finit par connaître et par croiser beaucoup de monde, c’est très agréable ! Mais je serai obligé de partir si je veux avancer, à Paris, Londres ou Berlin. À Strasbourg, il n’y a pas d’avenir pour les plasticiens… Ici, on n’arrive pas à rencontrer les gens. D’ailleurs, de tous les gens que je contacte pour leur montrer mon travail, ceux qui me répondent sont à l’étranger… »

De La Mandragore à Monsieur Bricolage

Quels sont vos lieux favoris à Strasbourg ?

« J’aime le café La Mandragore derrière la Fnac. C’est un lieu très agréable car un peu en recul. Si on ne connaît pas Strasbourg, on ne tombe pas dessus. Et j’aime bien le décor, entre un pub anglais et un film de David Lynch. Et j’aime aussi beaucoup Monsieur Bricolage, mais vraiment ! J’y vais une fois par semaine, j’y reste une heure, je regarde ce qui existe et ça me donne des idées. Je vais aussi très souvent au Star. Ce serait dramatique que ce cinéma disparaisse. J’y ai eu de vraies joies, en découvrant des films rares, des documentaires. J’aimerais que mes enfants ne connaissent pas que l’UGC, qu’ils puissent avoir d’autres propositions. »

Les peintures de Mathieu Wernert sont comme des pans de murs découpés dans des lieux en friche.

Y aller

« 46m² », exposition de Mathieu Wernert à La Boutique, 10 rue Sainte-Hélène (dernière exposition avant fermeture du lieu).
Du 26 avril au 30 mai, de 10h à 12h et de 14h à 18h – 33 (0)9 52 17 45 23. Mathieu Wernert sera présent les mardis, mercredis et jeudis après-midi de 14h à 16, ainsi que les dimanches 6 et 13 mai de 14h à 18h. L’évènement sur Facebook.


#culture

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