Avec le « Plan vélo » voté le 25 juin (voir notre article), l’Eurométropole continue à inciter ses habitants à pédaler. Depuis le 1er juillet, les particuliers résidant dans la métropole peuvent bénéficier d’une aide à l’achat pour l’acquisition de vélos à assistance électrique (VAE). Ils peuvent toucher entre 300 et 500 euros selon le type de vélo et selon leurs conditions de ressources. La municipalité a également mis en place une prime de 150 euros pour l’électrification d’un vélo classique. L’aide est rétroactive et concerne également les achats de VAE depuis le 1er janvier.
612 dossiers de demandes d’aides
Depuis juillet, 612 dossiers de demandes d’aides ont été déposés. La municipalité en a traité environ 500. Alain Jund (EELV), vice-président de l’Eurométropole en charge des mobilités, se réjouit de l’accueil du dispositif :
« Nous avons une idée un peu plus précise des profils : des personnages âgées mais aussi des salariés qui prennent ce vélo pour se rendre au travail. Le VAE peut être une alternative à la voiture ou aux transports collectifs. Il est également utilisé pour la pratique sportive. Tout le monde peut donc s’y retrouver. »
Un vélo électrique coûte en moyenne 2 000 euros. Il est possible de trouver des modèles d’entrée de gamme à partir de 400 euros. Le prix d’un vélo très haut de gamme peut même atteindre jusqu’à 12 000 euros. La durée de vie de la batterie dépend de la marque et du fabricant. Pour les premiers prix, la durée moyenne est seulement de 2-3 ans. En revanche, pour du haut de gamme, la batterie peut tenir jusqu’à 10 ans. « En théorie, une batterie tient 1 100 cycles de charge complets, sachant que l’idéal est d’être le plus possible entre 40 et 90 % de la charge. Il ne faut pas trop la laisser se décharger, et ne jamais la charger à bloc », précise Vincent Morel, salarié de la boutique Bike Avenue, avenue des Vosges.
Les VAE classiques, ainsi que les vélos cargo à assistance électrique sont éligibles pour bénéficier de l’aide de l’Eurométropole. La collectivité conseille d’acheter « un vélo de qualité plutôt qu’un vélo électrique à 500 euros. En effet, on sait que cela joue sur la qualité et la durée de vie de la batterie. L’objectif n’est pas de jeter le vélo au bout de peu de temps », indique Alain Jund.
Une augmentation des achats de VAE en raison de la crise sanitaire
Dans l’Eurométropole, une trentaine de magasins sont « partenaires véloptimistes » du dispositif. Pour les revendeurs, il n’est pas toujours facile de suivre la cadence car le secteur connaît des ruptures de stock. Sylvain Kozlik travaille dans la boutique Tendances cycles, avenue d’Alsace :
« Nous vendons beaucoup plus de VAE depuis 4-5 ans. Nous vendons à peu près tout ce que nous commandons, c’est-à-dire une centaine par an. Malheureusement, il y a du retard dans les commandes. Nous avons été livrés au mois de juillet au lieu de mars. »
Vincent Morel, salarié depuis 3 ans chez Bike Avenue, confirme cette tendance :
« La vente de vélos en général a augmenté depuis les confinements. Les gens ne voulaient plus prendre les transports en commun. L’année dernière, on vendait 1 vélo électrique pour 5 vélos classiques. Donc la vente de vélos électriques représentait environ 40% du chiffre d’affaires. Il est trop tôt pour donner les chiffres de cette année mais c’est vrai qu’on est en rupture de stock. Les délais d’attente sont de 6 mois environ. Il y a des ruptures de stock partout. La France est moins bien approvisionnée que d’autres pays comme l’Allemagne, les Pays-Bas qui sont des plus gros usagers de vélos électriques que nous. »
« Tous les gens qui viennent me parlent de l’aide »
Dans le cadre de l’aide à l’achat de l’Eurométropole, il est également possible de faire motoriser un vélo classique. Positionné sur ce créneau, la jeune entreprise Ohm & Watt a ouvert en mai 2021. Le directeur Thomas Hampe-Kautz prépare les vélos électriques dans l’atelier situé derrière la boutique :
« Nous sommes très pris depuis que nous avons ouvert car pour l’instant, nous sommes les seuls à Strasbourg à pouvoir assembler sur place. Tous les gens qui viennent me parlent de l’aide. L’électrification coûte 890 euros quel que soit le modèle. Nous avons également des délais records : nous mettons environ une semaine pour préparer le vélo, contre 6 mois d’attente en moyenne pour acheter son VAE. »
Thomas Hampe-Kautz n’a plus qu’à tout assembler sur le vélo : la batterie en lithium et le moteur qui pèse environ 3,9 kilogrammes. Les normes sont contrôlées : la classification VAE correspond à une limite de 25 km/h, une puissance de 250 watts, et un capteur de pédalage seul. « C’est beaucoup plus difficile à débrider qu’une trottinette. Il faut un mot de passe pour entrer dans le système, donc il faut vraiment être doué en informatique », précise le directeur de Ohm & Watt.
Le composant principal de ces vélos est donc la batterie en lithium :
« C’est l’élément le plus cher et le plus fragile du vélo. Le prix peut aller de 200 à 400 euros euros. 90% des pannes que nous avons sont liées à la batterie. Les gens ne font pas forcément attention, la laissent au soleil quand il fait trop chaud, dehors l’hiver ou alors sous la pluie. »
Thomas Hampe-Kautz, directeur de Ohm & Watt
Des batteries reconditionnables qui le sont de moins en moins
Lorsque la batterie du vélo électrique devient défectueuse, il faut donc trouver quoi en faire. Il existe deux solutions : le reconditionnement ou le recyclage. À Haguenau l’entreprise Presta-batterie est spécialisée dans le reconditionnement des batteries, c’est-à-dire qu’elle remplace les cellules usagées par des cellules neuves à l’intérieur de la batterie. Fondée en 2014, elle compte aujourd’hui 6 salariés. Son directeur Philippe Dardel explique que la société est également débordée :
« Nous reconditionnons environ 1 000 batteries par an et en ce moment, nous en refusons une centaine par mois car nous n’avons pas assez de main d’œuvre. Cela nous prend entre une semaine et dix jours mais les délais peuvent être plus longs ces derniers mois. Avec l’explosion du secteur, nous avons des pénuries de matières premières, notamment les cellules lithium-ion. Une batterie reconditionnée coûte entre 250 et 400 euros, dans les 300 euros en moyenne. »
Un procédé qui paraît donc écologique. Mais la tendance est en train de s’inverser depuis quelques années selon le directeur de Presta-batterie :
« Nous avons un problème depuis 3-4 ans, certains fabricants font en sorte que les batteries ne soient pas reconditionnables. Cela concerne uniquement le haut de gamme pour l’instant. Sauf que ce sont des batteries qui coûtent entre 700 et 900 euros. Ils font cela pour protéger leur marché. Donc oui reconditionner c’est écologique, mais cela pourrait changer si les batteries ne sont plus reconditionnables. »
Autre option : le recyclage des batteries. Corepile et Screlec sont les deux éco-organismes en France agréés par l’État. Ce sont des sociétés privées sans but lucratif à qui l’État a donné une mission d’intérêt général : la gestion des déchets de piles et accumulateurs.
Seulement 25 000 batteries recyclées par an
L’entreprise Corepile, basée à Paris, compte 7 salariés et bénéficie de l’aide de 300 salariés travaillant dans les entreprises de collecte et traitement qui sont utilisées par Corepile. La filière piles et batteries portables existe depuis 20 ans. En revanche, l’éco-organisme a lancé sa filière spécialisée dans les vélos il y a 3 ans et demi. Le directeur général de Corepile, Frédéric Hédouin explique qu’il y a encore peu de besoin en termes de recyclage des batteries :
« Ce sont des produits qui ont une durée de vie moyenne de 8-10 ans. De plus, avec un VAE, le cycliste doit pédaler, la batterie aide seulement dans les montées et à aller plus vite. Elle est donc beaucoup moins sollicitée que la batterie d’une trottinette par exemple. Nous recyclons 25 000 batteries par an, ce qui est très peu si on compare au nombre de piles recyclées qui est de 500 millions par an. Ce sont essentiellement des batteries de vélos mais nous ne trions pas par typologie de batteries ; nous récupérons des lots de batteries souvent non identifiables et parfois même partiellement démantelées. «
Environ 65 à 70% de l’ancienne batterie sont recyclés
Pour récupérer les batteries, l’entreprise envoie un container de stockage et de transport à ses partenaires dans lequel il faut stocker les batteries. Quand il est plein, un collecteur passe et emmène le container au centre de tri. Le recyclage des métaux se fait ensuite selon deux catégories de procédés : la pyrométallurgie, par voie thermique, et l’hydrométallurgie par voie chimique. Corepile travaille avec deux usines en France : Euro Dieuze Industrie, à Dieuze, en Moselle (filiale de Veolia) et Snam, basée sur le site de Saint Quentin Fallavier (Isère).
« Pour résumer, on les passe dans un four pour déstructurer la matière. Nous récupérons environ 65 à 70% de l’ancienne batterie, qui sont ensuite réinjectés dans l’industrie métallurgique. C’est donc une économie circulaire. L’acier par exemple sert à faire de l’inox, utilisé pour tout ce qui est électroménager. Les 30% restants sont dépollués puis incinérés. »
Frédéric Hédouin, directeur général de Corepile
Un manque d’informations sur le recyclage
L’éco-organisme compte 1500 revendeurs partenaires sur le territoire, et seulement 5 à Strasbourg. Le département du Bas-Rhin compte une vingtaine de points de collectes, chez les marchands de vélos. Certains des revendeurs strasbourgeois interrogés ne savaient pas que ces organismes existaient.
Pourtant, depuis le 1er octobre 2017, les magasins sont dans l’obligation d’accepter les batteries de vélo électrique à recycler de leurs clients. Pour Frédéric Hédouin, c’est aussi aux citoyens d’aller chercher l’information :
« L’information est disponible sur Internet. Nous n’avons pas les moyens de faire des grandes campagnes de communication. Mais l’information circule de plus en plus, les marques en parlent. Et il faut aussi le temps que les batteries arrivent à la fin de leur durée de vie. »
L’Eurométropole de Strasbourg a prévu une réunion à la rentrée avec les vélociste pour réfléchir au devenir des batteries. « Nous réfléchissions à la création d’une filière locale et nationale. Nous souhaitons développer à la fois le reconditionnement et le recyclage », indique Alain Jund.
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