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Manif’ des fonctionnaires : « On ne voit que notre coût, pas le travail qu’on produit »

Malgré la pluie, à Strasbourg, plus de 1 000 personnes ont répondu à l’appel de dix syndicats de la fonction publique mardi 10 octobre. Ils dénoncent notamment le gel de la valeur du point d’indice, le rétablissement de la journée de carence, la suppression envisagée de 120 000 postes et plus globalement un « démantèlement de la fonction publique ».

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Comme le 12 septembre pour les travailleurs du secteur privé, le cortège de manifestants a démarré sous la pluie mardi matin, place Kléber à Strasbourg. Sous leurs parapluies, agents de la fonction publique, mais également salariés venus par solidarité, se sont mobilisés contre « les mesures négatives prises à l’encontre de la fonction publique », mais plus largement contre la politique économique du gouvernement.

« Macron, Macron, Macron, Macron, ta loi travail nous prend pour des cons. Macron, Macron, Macron, Macron, ta loi travail nous la rejetons. » Après quelques couacs de sono, les hymnes contre la « loi travail » se font à nouveau entendre, bien qu’à l’origine la mobilisation concerne les mesures prises à l’encontre de la fonction publique.

« Si ça continue, bientôt il n’y aura plus de service public »

Gel de la valeur du point d’indice, rétablissement de la journée de carence, suppression envisagée de 120 000 postes, compensation « floue » de la hausse de la CSG… Autant de mesures qui ont poussé les fonctionnaires à descendre dans les rues mardi. Le cortège paraît clairsemé, pourtant plus de 1 000 personnes ont participé à la manifestation strasbourgeoise. Et si tous n’ont pas battu le pavé, la journée de grève a été très suivie dans l’Éducation nationale : 37 écoles étaient fermées ce mardi 10 octobre.

Après un début de parcours sous la pluie, le temps a fini par être un peu plus indulgent envers les manifestants qui dénoncent un « démantèlement de la fonction publique ». Ils font notamment le parallèle avec la réforme du Code du travail.

« L’État se comporte comme n’importe quel patron »

Dans le cortège, un enseignant en collège à Cronenbourg, en zone d’éducation prioritaire, dénonce :

« Dans quelques années le service public n’existera plus. Ça rejoint ce qu’il se passe avec la « loi Travail ». La destruction du CDI et du statut des fonctionnaires, c’est la même chose. C’est la précarisation pour tout le monde. On assiste à la destruction de tout cadre pérenne du travail. Aujourd’hui, le travail est purement une exploitation qui ne sert à rien d’autre qu’à faire du profit. Dans le cadre de la fonction publique, l’État se comporte comme n’importe quel patron, il cherche à faire des économies, à augmenter ses bénéfices. »

Car la façon dont le gouvernement s’inspire des méthodes de l’entreprise pour gérer l’administration passe mal. Corinne, infirmière au centre hospitalier d’Erstein :

« On est de plus en plus stigmatisé au niveau de la fonction publique. On ne voit que le coût, pas le travail qu’on produit.  Nous, notre slogan au niveau de la santé c’est « je suis une richesse pas qu’un coût ». Mais aujourd’hui on ne parle que coût, coût, coût… Les conditions de travail, c’est quelque chose qui dépasse le gouvernement. »

Malgré la pluie, plus de 1 000 personnes se sont mobilisés en réponse à l’appel des syndicats de la fonction publique, mardi 10 octobre (Photo Manon Weibel / Rue89 Strasbourg )

Léo, 17 ans, étudiant en classe préparatoire hypokhâgne dans un lycée strasbourgeois, envisage d’être enseignant. Il est donc là car il se sent visé, mais aussi parce qu’il a conscience que s’il en est là aujourd’hui c’est bien grâce au service public :

« J’ai été formé par la fonction publique, donc j’en fais l’éloge. Les enseignants, les hôpitaux, les policiers, tous ces gens là nous permettent de vivre. Nous, on a été à l’école de la République, on nous a éduqué grâce à la fonction publique donc il faut la protéger, la choyer et c’est pas du tout ce qu’on est en train de faire. »

Une colère générale contre le gouvernement

Au-delà des réformes en cours, pour le privé ou le public, les récents choix budgétaires du gouvernement ne passent pas. Si les pancartes aux slogans reprenant les dérapages de Macron ont été moins nombreuses lors de cette manifestation, les membres du cortège ne sont pas pour autant plus indulgents avec le chef de l’État : « on a un président des riches, qui fait des cadeaux à ceux qui sont fortunés », se révolte Ariane, qui travaille à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Bas-Rhin.

L’ensemble des syndicats de la fonction publique, pour une fois unis, ont appelé à participer à cette journée de mobilisation (Photo Manon Weibel / Rue89 Strasbourg)

Même son de cloche du côté de Jean, enseignant en lycée professionnel :

« Il faut absolument riposter contre la politique de ce gouvernement qui est aux ordres et aux service du grand patronat. Cette mobilisation sera utile à condition qu’on arrive à créer un mouvement plus général, plus important. Le gouvernement et les capitalistes derrière ne reculeront pas à la première escarmouche, mais je reste confiant. Les grands capitalistes ont besoin des travailleurs, mais les travailleurs n’ont pas besoin des capitalistes. »

Ariane espère que c’est le début d’une prise de conscience :

« On est en train de remettre en cause tous les services publics. Ce mouvement est enclenché depuis plusieurs années. Macron, c’est la continuité d’une casse des services publics et de la sécurité sociale en particulier. »

Les représentants des agents devaient rencontrer le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, ce mardi 10 octobre, mais le rendez-vous a été reporté au 16 octobre. Le Premier ministre Édouard Philippe a en tout cas déjà déclaré « assumer pleinement les mesures prises« .


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