Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Logements sociaux : les terrains cédés par l’État ravivent les tensions

Pour favoriser l’habitat social, le ministère du Logement prévoit de céder, parfois gratuitement, des terrains de l’État aux collectivités locales. Sur les 931 espaces proposés, 31 ont été répertoriés en Alsace, dont une dizaine à Strasbourg et dans la CUS. Problème : certains n’ont pas été pris en compte et d’autres ont déjà été vendus. Retour sur cette liste de la discorde, aussitôt publiée, aussitôt critiquée.

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89 Strasbourg, abonnez-vous.


Au 1er janvier 2007, la CUS comptait 48 478 logements sociaux, soit 80 % de l'offre du Bas-Rhin. Ici, la SERS aménage plus de 200 logements aidés à la Meinau (Photo Archi-Strasbourg / CC)

« Du grand n’importe quoi ». C’est ce qu’a affirmé Yves Bur, maire UMP de Lingolsheim et ancien député, à propos du plan Duflot pour le logement social. Des mots qu’il justifie par la confusion créée en France, et notamment en Alsace, autour de la liste des terrains cédés par l’État aux collectivités locales alsaciennes.

Dans sa commune, un terrain de 23 400 m² situé rue des Peausseries a été listé comme disponible pour la construction de logements sociaux. Or, il a été déjà a été acheté en novembre 2010, pour 1,6 million d’euros hors taxes, dans le cadre d’un projet d’éco-quartier.

Autre erreur notable, concernant un emplacement de 3 600 m² sur le quai Sturm à Strasbourg. Mentionné sur la liste, il est en fait la propriété d’un promoteur.

Philippe Bies, député PS du Bas-Rhin et vice-président chargé du logement à la CUS, admet que la liste comporte des erreurs et affirme que d’autres propriétés strasbourgeoises de l’État pourtant disponibles n’y apparaissent pas :

« L’ancienne gendarmerie de Neudorf, le quartier Lyautey, la caserne Marco et la Cour des douanes le long de la Route du Rhin ne font pas partie de la liste. Pourtant, au moins pour les deux premiers d’entre eux, ce sont des emplacements de plusieurs hectares où il est possible d’engager un vrai travail de mixité locative, avec une part de logements sociaux. »

Pour l’opposition, un « bétonnage massif » de Strasbourg

En revanche, de très grands terrains, comme celui de Strasbourg-Cronenbourg, sont bel et bien exploitables. Avec ses 25 000 m², ce site proche de la gare centrale devrait accueillir 1 800 à 2 000 logements, en grande majorité de l’habitat collectif structuré en plusieurs petits ensembles favorisant la mixité sociale et locative.

Le secteur de la gare aux marchandises de Cronenbourg accueillera bientôt entre 1800 et 2000 logements, en grande partie aidés (Photo Archi-Strasbourg/CC)

L’opposition strasbourgeoise ne partage pas du tout cet enthousiasme, tout en se défendant d’avoir un discours anti-logement social. Dans un communiqué, Anne Schumann, conseillère municipale Nouveau Centre, dénonce un « bétonnage massif » de la capitale alsacienne, impulsé selon elle par Roland Ries et Jacques Bigot. Elle affirme que la capitale alsacienne et la CUS concentrent « 80 % de l’offre de logements sociaux » dans le Bas-Rhin, « contre 50 % en 2009 ».

Une évolution « complètement fantaisiste », rétorque Philippe Bies, qui tient à rappeler que le Conseil général, tenu par l’UMP, « adopte lui aussi une politique volontariste » de construction de logements sociaux, avec « 600 à 800 nouvelles habitations par an ».

Pour éviter de nouveaux couacs et calmer la polémique, une liste retravaillée et quasi-définitive des terrains disponibles à la réhabilitation ou à la construction de logements sociaux devrait être publiée aux alentours du 15 septembre. Soumise à partir d’aujourd’hui au Sénat, puis le 24 septembre à l’Assemblée Nationale, elle sera modifiable à tout moment si une ville en fait la demande.

La majorité de la CUS hors-la-loi sur les logements sociaux

Sur les 27 communes de la CUS, 15 d’entre elles, dont Souffelweyersheim et la Wantzenau, sont en infraction vis-à-vis de la loi SRU (Solidarité et rénovation urbaine).

Le texte prévoit 20% de logements sociaux au minimum, et peut-être bientôt 25, dans les villes de plus de 3 500 habitants. La sanction financière pourrait aussi être quintuplée si le plan Duflot est adopté par le Parlement tel qu’il est actuellement présenté.

Lors de son discours, Philippe Bies a affirmé que la priorité de la CUS dans le dossier des logements sociaux était "une meilleure répartition de l'effort" dans leur construction (Photo JLP)

Paul Tedeschi, adjoint au maire de Souffelweyersheim chargé de l’urbanisme, explique comment la commune, avec 7,52 % de logements sociaux, s’acquitte de sa pénalité sans sortir un denier public :

« Nous avons dernièrement mis à disposition deux terrains à un tarif inférieur à celui du marché, l’un pour construire 18 logements sociaux, l’autre pour une résidence dédiée aux personnes âgées. A chaque vente, l’État prélève la différence entre le prix d’achat et le prix estimé, ce qui nous permet de payer l’amende sans avoir à prendre de l’argent sur le budget de la commune. »

Contactée, la mairie de la Wantzenau a reconnu être très loin du minimum de logements sociaux requis, mais a refusé de préciser les chiffres. A Strasbourg, environ 1 700 logements sociaux nouveaux sont créés chaque année. Le gouvernement a annoncé la construction de 110 000 habitations par an d’ici 2016 sur l’ensemble du territoire français.


#Anne Schumann

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles
Partager
Plus d'options
Quitter la version mobile