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L’Ogaca liquidée dans une ambiance fin de siècle

L’agence de conseil aux entreprises culturelles Ogaca a été placée en liquidation judiciaire par la chambre commerciale du tribunal de Strasbourg lundi 11 février. La santé financière de l’association qui employait une douzaine de salariés était fragile depuis des années. Une structure a été créée pour reprendre l’activité de paie, tandis qu’une partie de l’équipe veut poursuivre l’accompagnement vers la professionnalisation des artistes.

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L'équipe de l'Ogaca a vidé les locaux ce mardi (doc remis)

Que s’est-il passé à l’Ogaca ? L’association établie depuis près de 30 ans à Strasbourg et œuvrant dans l’accompagnement et le conseil aux entreprises culturelles a déposé le bilan et a été placée en liquidation judiciaire par la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg lundi 11 février. La surprise a été totale, y compris même pour les financeurs publics de l’association, qui assuraient pourtant plus des deux tiers des recettes. Ils n’ont pas été appelés à la rescousse par les dirigeants pour combler un passif de plus de 100 000€, sur un budget annuel d’environ 750 000€.

Les dirigeants ont fait le constat que l’association était structurellement déficitaire, comme l’explique Stéphane Bossuet, président de l’association et directeur par intérim de l’Ogaca :

« Le passif était trop lourd. Les belles années des formations aux acteurs culturels sont derrière nous. Nous n’avions pas de perspectives pour redresser les comptes et puis… il y a une dimension humaine. Qui pour incarner le projet Ogaca ? »

Car l’Ogaca a été créée en 1984 par Luc Jambois, qui en a été l’unique directeur pendant toutes ces années. Positionnée sur l’accompagnement des artistes vers la professionnalisation et l’aide aux artistes précaires, l’association a peut-être raté quelques virages dans un environnement qui a évolué. C’est en tout cas l’analyse d’un des administrateurs de l’Ogaca, Joël Beyler, par ailleurs directeur-adjoint de la coopérative d’artistes Artenréel :

« Des structures que nous avions accompagnées au début se sont développées jusqu’à assurer une partie de nos missions. Et la conjoncture sur le marché des formations avait mis en tension le budget de la structure depuis des années. La dynamique de projets était à bout de souffle, l’association n’a pas su se réinventer à temps. »

Deux échecs impossibles à rattraper

Résultat : lorsqu’il a fallu rembourser une subvention du fonds social européen (FSE) de 35 000€ à la suite d’une inadéquation des missions mises en place, et qu’une formation n’a pas reçu une certification à temps, créant un manque à gagner d’environ 50 000€, les comptes de l’association ne disposaient d’aucune marge pour absorber ces revers. Une procédure d’alerte a été déclenchée en janvier 2013 et la procédure de redressement judiciaire a suivi, jusqu’à la liquidation lundi.

L’équipe a indiqué sur la page Facebook de l’Ogaca qu’il s’agissait là d’une « aventure qui se termine ». Mais d’autres pourraient suivre, car les missions que l’Ogaca effectuait étaient cruciales pour nombre de petites entreprises culturelles de Strasbourg, comme la gestion de la paie. Plus de 300 compagnies d’artistes utilisaient ce service, qui sera repris au sein d’une nouvelle structure, Ogaca-Paie, dont le responsable sera l’ancien responsable du service, Marc Hartstreisel. Quant aux missions d’accompagnement vers la professionnalisation, elles pourraient être poursuivies par une équipe restreinte, comme l’explique Stéphane Bossuet :

« Il est possible qu’on parvienne à mobiliser les acteurs publics autour de cette seule mission, essentielle car les artistes qui débutent sont démunis face au monde du travail. Ce service devant être gratuit, tout l’enjeu sera de voir quelles seront les collectivités prêtes à nous suivre. Quoiqu’il en soit, une partie de l’équipe est toujours motivée pour poursuivre cette mission. »

Une équipe fissurée

Et il fallait le préciser, car les tensions au sein de la petite structure avaient fini par fossiliser son action. L’air y était devenu irrespirable, selon le témoignage de plusieurs salariés qui préfèrent rester anonymes, avec une équipe de direction présentée comme largement absente. Depuis le départ du fondateur, Stéphane Bossuet n’était formellement assigné à sa mission de direction que quatre heures par semaine… ce qui en dit long sur l’autonomie à laquelle était parvenue la petite équipe.

A la Ville, Daniel Payot, adjoint au maire en charge de la culture, indique qu’il rencontrera les porteurs d’un nouveau projet :

« En 2008, on avait déjà pris la décision de continuer à soutenir l’Ogaca. Parce que les missions d’accompagnement des artistes sont essentielles. On n’a guère le choix. Sans eux, toute l’économie des petites compagnies est fragilisée, à la merci de cabinets pratiquant des tarifs qui sont hors de leur portée. »

En 2009, un audit du ministère de la Culture avait pourtant déjà alerté la structure et ses financeurs sur le fait que le fonctionnement de l’association n’était pas viable. Mais rien n’avait vraiment changé. En juillet 2012, l’Ogaca avait même posté une annonce pour recruter en CDI un conseiller culturel.


#Ogaca

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